Sylvain Rivard ne méritait pas d’être cloué au pilori dans l’émission Enquête

Le jeudi le 21 janvier, la très sérieuse émission Enquête à Radio-Canada se risquait dans le champ miné de l’identité autochtone, sujet qui mérite une approche moins agressive.

Dans ma lettre, je vais aborder seulement le cas de Sylvain Rivard, qui a été le premier à être cloué au pilori. Nous y avons vu défiler des images hors contexte avec des perceptions présentées comme explication sérieuse. J’ai sérieusement tiqué quand j’entendais le journaliste présenter mon ami Sylvain comme un vil imposteur.

Hier, je lisais un beau message de dame Joséphine Bacon qui soulignait sa gentillesse, sa générosité et ses grandes connaissances. J’étais émue d’entendre notre chère Joséphine placer ces mots de sagesse en appui à notre ami commun.

Je partage ma réaction à la suite de ce reportage d’Enquête. Moi, je suis une Innue, j’ai été adoptée très jeune par une famille québécoise qui m’a gardée proche de mon histoire, de ma culture et de ma famille innue. J’ai eu également à entendre des jugements sur mon « métissage ». L’un des cadeaux que la vie m’a offerts, c’est que je suis une personne bien implantée dans mes deux cultures, innue et québécoise. Donc, ces jugements me font sourire et ne m’atteignent plus.

Le contexte

Je prends un moment pour revenir sur un mot souvent perverti ou volontairement mis de côté, le mot « contexte »…

Je ne peux m’exprimer pour les autres, mais en regardant Enquête jeudi passé, concernant mon ami (oui, oui, mon ami) Sylvain Rivard, je me demandais : ils étaient en quête de quoi ? De le détruire ? D’encourager, comme avec les autres intimidateurs, le harcèlement ?

Je connais le contexte des images qui ont défilé sur mon ami. Non, je n’ai pas honte, il est mon ami et il le restera, et je ne serai pas troublée si cela modifie l’attitude de certaines personnes envers moi… Parfois, il faut se tenir debout. On ne peut pas toujours se dissimuler derrière une idéologie ou un clavier.

Lorsque les premières images de M. Rivard sont apparues, il faut préciser que le contexte était celui de la commémoration de la Grande Paix de Montréal (1701), qui a eu lieu en 2001. M. Rivard était présent à titre de comédien et de coordonnateur pour Terre en vue. Son mandat était de présenter les tenues vestimentaires des autochtones de l’époque. Il expliquait également les tenues vestimentaires d’autres autochtones qui l’accompagnaient dans l’extrait. C’est l’une de ses spécialisations. Il est reconnu pour son expertise dans ce domaine.

Un autre extrait était celui où on le voyait lors d’un voyage en Allemagne. Une aînée abénaquise lui avait donné l’autorisation d’interpréter quelques chants abénakis et de montrer une danse plus touristique que la danse traditionnelle. Bref, loin de nuire à la nation abénaquise, il en a fait plutôt la promotion, et ce, en collaboration avec plusieurs autochtones de cette nation et des autres. Nous n’avons sûrement pas la même définition de ce qu’est l’appropriation culturelle !

De plus, mon ami est sollicité pour ses connaissances et son expertise, non pour ses origines.

Je tiens d’ailleurs à préciser que les détracteurs dans ce reportage n’ont jamais tenté de communiquer avec M. Rivard pour ouvrir un dialogue. Ils ont préféré de loin l’utilisation des réseaux sociaux pour régler leurs comptes et tenir des propos mensongers dépourvus de contexte, en plus de faire preuve de haine et de diffamation. Mais ça, bien sûr, ce ne fut pas mentionné dans le reportage (vous n’avez qu’à regarder leurs profils Facebook pour découvrir la hargne qui les habite).

Finalement, je déplore que le journaliste ait délibérément refusé d’interviewer des autochtones qui ne partagent pas du tout les positions des réfractaires vues dans le reportage. Bref, un reportage assez censuré et biaisé, merci.

Ne jamais oublier le contexte !

Pourquoi M. Rivard a-t-il refusé de parler au journaliste d’Enquête ? Parce que le ton du journaliste était accusateur et qu’il refusait d’entendre sa version. Le journaliste voulait qu’il ne réponde qu’aux accusations de certains individus.

Je n’oublie pas que M. Rivard a été le premier, quand je débutais dans le milieu avec mon recueil, à me donner de judicieux conseils, à me guider dans les salons du livre, à m’encourager lorsque j’avais des doutes. Et tout ceci, sans jamais rien attendre en retour.

On connaît cela, être privés de contexte, nous, les peuples autochtones. On nous a tellement privés de contexte que cela nous a fait vivre du racisme, de l’exclusion, de l’intimidation et une absence de reconnaissance.

Alors, rappelez-vous cela avant de jeter la première pierre à Sylvain Rivard.

Je nous souhaite de guérir de nos blessures et de ce trauma intergénérationnel. Dans le chemin de la résilience, il faut persister.

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