En réponse à l’éditorial de Stéphanie Grammond sur le phénomène Éric Zemmour en France, publié le 5 décembre dans le cahier Contexte.

En novembre dernier, le Parti conservateur du Québec (PCQ) tenait son premier congrès depuis l’élection d’Éric Duhaime comme chef. Et sincèrement, si on se fie aux propositions adoptées par ses membres, on peine à comprendre comment on peut associer le parti ou son chef à l’extrême droite, comme le fait l’éditorialiste en chef de La Presse dans son texte du 5 décembre dernier.⁠1

En effet, du fait de ses politiques sociales, le PCQ pourrait davantage se qualifier de « progressiste-conservateur » ou de « libéral classique ».

Bien sûr, le PCQ définit le rôle de l’État d’une manière qui répugne viscéralement à tous ceux pour qui tout doit être conçu, produit et distribué par le mammouth syndicalo-gouvernemental. Le « modèle québécois », après tout, fait démesurément et aveuglément confiance à l’État employeur.

À la différence du gouvernement actuel, plutôt interventionniste en toutes matières, le PCQ fait davantage appel à la concurrence dans les moyens de distribution des services sociaux plutôt que de soutenir des monopoles hypersyndiqués. Il privilégie une redistribution directe aux citoyens, alors plus libres de faire leurs propres choix.

Avec ses 38 000 membres, le PCQ est maintenant le parti qui en compte le plus. Ayant canalisé la grogne autour d’un état d’urgence qui n’en finit plus, peut-on honnêtement parler de populisme d’extrême droite quand on observe qu’ailleurs, un tel état d’urgence n’existe plus ?

Peut-être le peut-on en se basant sur des orientations en matière d’immigration, alors ? Or, le chef du PCQ offrait d’augmenter ou de diminuer l’immigration en fonction des besoins du marché du travail. On est loin du populisme d’Éric Zemmour, non ?

Ces thèmes qui divisent

Stéphanie Grammond s’inquiète des thèmes qui divisent nos sociétés : anxiété identitaire, islamophobie, protectionnisme. Mais bien franchement, si j’avais à associer ces thématiques à un parti, ce serait bien celui de la Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault.

Ce gouvernement a fait de ces thèmes sa première priorité depuis le jour 1 de son arrivée au pouvoir. Mis à part l’épisode pandémique, voyez le bilan de la CAQ : baisse des seuils d’immigration, loi 21 sur la laïcité (dont l’intention était visiblement de calmer les craintes des Québécois envers l’islam radical), projet de loi 96 sur la langue officielle du Québec.

Ce que pense Éric Duhaime de ces projets de loi ? Être parfaitement en accord avec la lettre d’opinion d’André Pratte du 16 mai dernier ⁠2, où ce dernier déplore que toute une série de droits fondamentaux sont niés. De l’extrême droite ?

Quant au protectionnisme, constatons la signature du gouvernement Legault en matière de protectionnisme culturel, économique et identitaire.

J’y reviens donc. Anxiété identitaire, islamophobie, protectionnisme. Ça, c’est le bilan de la CAQ de François Legault, ne nous y trompons pas.

Stéphanie Grammond dit qu’il est « préoccupant de constater que le PCQ se classe en deuxième position dans les sondages, avec 18 % des intentions de vote dans la région de Québec ». Et pourquoi donc ? N’est-il pas mieux d’entendre ces voix qui tentent de participer à la démocratie ? Préférerions-nous qu’elles ajoutent au cynisme, au décrochage démocratique, au mépris des classes intellectuelles et médiatiques ?

J’ose encore croire que non.

1. Lisez « Zemmour dans notre rétroviseur » 2. Lisez la lettre d’opinion d’André Pratte Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion