Le gouvernement du Québec rendra publique sa prochaine mise à jour économique le 25 novembre prochain. Le ministre des Finances, Eric Girard, voudra alors donner aux Québécois l’heure juste sur l’évolution de l’économie québécoise, sur la situation financière du gouvernement et sur la mise en place de plusieurs mesures pour améliorer la situation économique.

Parmi ces mesures, il y en aura certainement plusieurs pour mieux faire face à la pénurie de travailleurs et pour bien colmater certaines failles importantes dans l’offre gouvernementale de services essentiels à la population.

Nous sommes dans une période charnière où on espère sortir graduellement de la pandémie, poursuivre la croissance économique d’avant la pandémie tout en réparant les avaries causées par la pandémie elle-même et en protégeant mieux l’environnement. On espère faire tout cela alors que le vieillissement accéléré de la population engendrera pour les 15 prochaines années une pénurie de travailleurs et une forte hausse de la demande de soins produits par le système public de santé. Et en plus, le gouvernement voudra continuer de réduire graduellement le poids de son endettement. Il aura donc devant lui un programme très ambitieux, presque impossible à réaliser pleinement. Je n’ai aucun doute : il faudra que le gouvernement définisse une liste de priorités et qu’il fasse des choix difficiles.

Pour réaliser tout cela et pour faire les meilleurs choix, il me semble essentiel que le gouvernement ait un plan à long terme sur un horizon d’au moins 15 ans, jusqu’au moment où on atteindra l’apogée du vieillissement de la population et où la pénurie de la main-d’œuvre commencera à se résorber.

Le gouvernement, comme plusieurs autres, s’est très mal préparé pour faire face au vieillissement de la population, même si ce choc avait été très bien prévu, il y a des décennies. De façon similaire, la gestion des infrastructures a été également mal planifiée, que ce soit sur le plan de l’acquisition de nouveaux actifs ou sur le plan du maintien en bon état des actifs existants. Dans ces deux cas, une planification et une gestion sur un horizon trop court expliquent une partie non négligeable de ces défaillances.

Au-delà du cycle électoral

Les plans budgétaires de cinq ans relativement détaillés doivent reposer sur un plan à long terme moins détaillé qui aide le gouvernement à faire les bons choix pour passer au travers d’une grande partie du choc du vieillissement de la population et pour protéger le mieux possible notre environnement. Il faut aller au-delà du cycle électoral de quatre ans. Il faut cesser de remettre à plus tard la mise en place de mesures nécessaires. Il faut avoir un plan à long terme. C’est mon premier souhait pour la prochaine mise à jour économique.

Il faut avoir une bonne idée de quel sera le futur taux de croissance moyen du PIB, des revenus du gouvernement et de la demande pour divers services gouvernementaux. À l’aide de simulations, le gouvernement cherchera à trouver la meilleure combinaison de mesures pour maximiser le bien-être des Québécois. Parmi ces mesures, il faudra choisir celles qui vont le mieux atténuer la pénurie de main-d’œuvre, dont les seuils d’immigration qu’on désire pour les 15 prochaines années.

Mon second souhait est relié au besoin de colmater les failles dans l’offre gouvernementale de services essentiels à la population. Ces failles sont apparues plus clairement ces dernières années.

Ici, je parle de failles importantes dans plusieurs domaines : les soins offerts aux personnes âgées, les soins offerts aux personnes ayant des maladies mentales, les services de la DPJ, l’aide aux élèves en difficulté (dont l’ampleur des retards a fortement augmenté durant la pandémie). Plusieurs de ces failles avaient été dénoncées bien avant le début de la pandémie par des intervenants indépendants, bien informés et crédibles. Trop souvent, le gouvernement les a minimisées ou a mis en place des solutions qui n’ont pas fonctionné ou qui n’ont eu qu’un effet mineur.

Il est temps que le gouvernement soit plus transparent et qu’il fasse des plans pour apporter une solution à ces défaillances et qu’il prenne des mesures pour résoudre à long terme ces problèmes qui ont causé une perte considérable de bien-être pour de nombreuses personnes vulnérables et même des pertes de vie. La mise à jour doit présenter des solutions et rassurer la population sur le fait que ces failles seront colmatées et ne réapparaîtront pas quelques années plus tard.

Infrastructures

Mon troisième souhait est que le gouvernement définisse pour les 15 prochaines années une cible spécifique pour ses actifs en infrastructure (et leurs emprunts). Cette cible devrait être accompagnée d’une enveloppe budgétaire pour son programme d’investissements (PQI) qui sera utilisée pour financer à la fois de nouveaux investissements et le maintien en bon état de ses infrastructures existantes. Il faut éviter que se reproduise ce qui s’est passé durant la dernière décennie où on a vu la cible implicite pour ces actifs se faire tasser dans le coin dans le but d’obtenir une réduction plus rapide que prévu initialement pour le ratio de la dette brute au PIB. Le gouvernement doit considérer que la dette reliée à ces actifs n’est pas une mauvaise dette (celle qui n’a pas d’actifs en contrepartie) et qu’il devra transférer aux générations futures des infrastructures en bon état.

Finalement, mon quatrième souhait est que le gouvernement incorpore dans son plan à long terme une cible pour la réduction du ratio du cumul des déficits (la mauvaise dette) au PIB sans réduire significativement la capacité du Québec 1- de passer à travers le choc du vieillissement de sa population, 2- de colmater effacement les importantes failles dans son offre de services essentiels et 3- d’investir de façon significative dans la protection de l’environnement. Il faudra également éviter de réduire le cumul des déficits passés plus rapidement que le rythme moyen impliqué par cette cible, en réalisant successivement des surplus budgétaires additionnels (ou des excédents) qui causeraient, encore une fois, l’apparition de nouvelles failles importantes dans l’offre de services essentiels à la population.

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