L’une des choses à suivre dans l’année électorale québécoise qui s’annonce sera le nouveau Parti conservateur d’Éric Duhaime, seule formation politique contestant frontalement la gestion de la pandémie de la COVID-19 par le gouvernement Legault.

Françoise David, elle, nous a appris dans La Presse de samedi dernier (« Une intervention troublante »)1 qu’elle ne suivrait pas la consigne du premier ministre québécois en faveur d’Erin O’Toole dans les élections fédérales, comme elle n’a pas suivi sa recommandation aux personnes âgées de rester chez elles au début de la pandémie.

C’est une autre indication qu’il faudra suivre également Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois n’ayant pas caché ses réserves à l’égard de certains aspects de la gestion de la pandémie.

Pouvoir québécois

Alors que les « vieux partis » libéral et péquiste sont en panne, c’est la CAQ, QS et le PC qui semblent vouloir mener le jeu, notre système politique n’empêchant clairement pas l’émergence de forces nouvelles.

Françoise David a rappelé dans son texte pourquoi des Québécois de gauche comme elle ne souhaitent pas l’élection d’un gouvernement conservateur, même minoritaire, à Ottawa : prises de position molles sur le contrôle des armes à feu et les changements climatiques, appui au troisième lien à Québec et, bien sûr, garderies.

On dit garderies, mais il faudrait plutôt dire les 6 milliards de dollars consentis au Québec par Justin Trudeau et qu’il n’est pas sûr que François Legault sera capable de récupérer par la bande de son nouvel allié conservateur Erin O’Toole.

L’argumentaire du premier ministre repose sur la défense, voire l’expansion du pouvoir québécois sous un éventuel gouvernement fédéral conservateur minoritaire. Il joue également sur une allergie pour les positions de plus en plus extrêmes de Justin Trudeau sur les questions identitaires, le premier ministre canadien n’ayant même pas été capable de condamner le fait que l’on brûle des livres dans le pays qu’il dirige.

Il est incontestable que les conservateurs, y compris le « méchant » Stephen Harper, ont beaucoup moins tendance que les libéraux à envahir les champs de compétence provinciaux, cette manie libérale semblant repartie de plus belle à la faveur de la réquisition de l’armée fédérale par un Québec pris en flagrant délit d’incompétence dans la tragédie des CHSLD.

Le deal Canada-Québec

« L’œuf ou l’argent ? » demande-t-on aux concurrents du quiz télévisé La poule aux œufs d’or. « L’argent ou les pouvoirs ? » s’enquiert-on maintenant auprès de l’électeur québécois.

Cette question n’est pas futile pour qui est conscient de ce que le deal Canada-Québec sur le plan historique depuis la Conquête a en partie consisté en l’exploitation du Québec sur le plan identitaire contre espèces sonnantes, trébuchantes et… péréquationnelles.

Les fieffés jouisseurs descendants des Anciens Canadiens que nous sommes sont sans doute les conquis les plus choyés de la planète.

Mais je m’égare, l’histoire n’intéresse plus personne. Ce qui reste d’actualité, c’est de savoir si l’on estime préférable l’élection d’un gouvernement libéral progressiste qui nous a avertis qu’il empiétera sur les compétences du Québec à celle d’un gouvernement conservateur qui nous dit qu’il ne le fera pas en nous promettant monts et merveilles pour le reste.

Dans une société québécoise de plus en plus allergique au risque, la décision audacieuse du premier ministre d’appuyer M. O’Toole n’a pas choqué que Françoise David. Elle n’est pas de fait sans risque, reposant sur l’hypothèse d’une victoire limitée des conservateurs, alors que les libéraux restent avantagés par la motivation plus grande d’un électorat mieux distribué à la grandeur du Canada.

Bloc québécois

Et il y a évidemment le Bloc québécois. On a pu penser un moment jeudi que, largué implicitement par François Legault, son déclin était assuré. C’était sans compter sur la résurgence, le soir même au débat en anglais, d’un autre élément peu glorieux du vieux contentieux Québec-Canada.

Si le pays siphonne systématiquement depuis 250 ans des éléments de notre identité, comme le nom même de ce Canada que le Québec a mis au monde, l’hymne national, la feuille d’érable et maintenant les garderies, les Québécois ne doivent s’attendre à aucune reconnaissance pour autant.

Au contraire, le reste du pays valorise toutes les différences de la galaxie sauf la québécoise, la méprisant par intermittence depuis le tout début.

Bien sûr, le Canada n’a pas été historiquement que cela à l’égard du Québec, mais il l’a été incontestablement et il l’est trop souvent encore.

C’est ce qu’a rappelé la référence au racisme – le mal absolu en 2021 ! – dans la question posée à Yves-François Blanchet par la modératrice (sic) du débat en anglais. Des bien-pensants canadian 10 fois plus intolérants que nous ne le serons jamais ont le front de nous accuser d’être racistes !

Même les peuples conquis ont leur honneur. Le Bloc québécois a peut-être encore de belles années devant lui, quitte à possiblement contrarier les beaux plans de François Legault.

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