Je fais des migraines depuis mon enfance, d’aussi loin que je puisse me souvenir, mais je n’ai été diagnostiquée qu’à l’aube de mes 16 ans. La raison de mon diagnostic tardif : la pression que je me suis toujours imposée et l’incompréhension face à ma maladie.

Enfant, j’ai vite compris que si j’avouais avoir mal, je serais obligée de me reposer et que je ne pourrais pas sortir jouer comme les autres. Mon mal, je l’ai donc longtemps enduré en silence, ne m’en plaignant que très rarement. Mon entourage, quant à lui, instinctivement considérait le mal de tête que je proclamais avoir pour un évènement bénin venant d’un déclencheur physique « normal » comme la faim, la soif, la fatigue, etc.

Toutefois, la migraine est insidieuse et elle s’endure de moins en moins bien avec les années, car plus tu t’habitues à la douleur, plus elle s’amplifie et s’aggrave.

Vient l’inéluctable, mes parents commencent à remarquer que je mentionne souvent avoir mal à la tête, probablement trop souvent, on commence à trouver cela anormal. De mon côté, il n’était pas question que j’accorde de l’importance à ma condition. De toute manière, avoir mal à la tête, ce n’est pas un vrai problème, c’est pour ça que ça existe les Tylenol et les Advil, non ? Du moins, c’est ce que je pensais, ne sachant pas que je souffrais d’une réelle maladie handicapante.

S’en suivent plusieurs années à vaquer à mes activités d’aspirante adulte, à refuser de manquer quelque activité que ce soit à cause de la douleur par crainte qu’on me trouve « plate », à tout faire pour que le mal ne transparaisse pas à travers mes yeux, à me forcer à travailler comme si de rien n’était. Il n’était tout simplement pas question qu’on ait pitié de moi, et je suis devenue incroyablement bonne à minimiser et à ignorer le mal qui me gruge.

Bien entendu, l’inévitable arriva, j’ai poussé trop loin. J’ai vécu une période très dépressive qui, à l’époque, m’apparaissait incompréhensible. C’est après de nombreux rendez-vous médicaux, à la suite d’une batterie de tests et un journal de céphalées dûment rempli que je comprends finalement ma condition : je souffre de la migraine chronique.

Si j’avais connu l’existence de cette maladie neurologique plus tôt, mon attitude envers mes maux aurait-elle été différente ? J’aime penser que oui, mais je n’en suis pas certaine. La stigmatisation envers cette condition existe toujours malheureusement.

J’ai la chance de pouvoir travailler à temps plein, d’avoir un employeur et un entourage qui comprennent et acceptent ma condition. Parce que oui, le regard de jugement d’un employeur, d’un collègue, d’un ami ou même d’un parent envers un empêchement justifié par un « mal de tête » est bien présent, et il fait d’autant plus mal puisqu’il crée de la culpabilité. Non, ce n’est pas qu’un simple mal de tête, et celui-ci s’accompagne d’une panoplie d’autres symptômes invalidants.

À toi qui te trouves dans mon entourage ou qui croiseras un jour mon chemin, sache que ma condition est plus complexe que tu ne le penses.

Ne m’en veux pas si je suis trop fatiguée.

Ne me juge pas si une fois j’ai été capable, et que l’autre non.

Ne m’en veux pas si je te dis non.

Ne pense pas que tu ferais autrement dans ma situation. Tu ne le sais pas.

Sache que tout ce que j’attends de ta part est que tu me croies. Je ne suis pas faible. Je n’ai juste pas l’énergie de devoir te prouver la crédibilité de ma douleur.

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