Au sortir de la crise sanitaire qui a si lourdement touché le centre-ville et qui nous a ralliés à l’idée de tout mettre en œuvre pour accueillir encore plus de résidants au centre-ville, le développement du secteur Bridge-Bonaventure est en soi une formidable occasion pour réussir une nouvelle entrée de ville permettant d’ajouter à la vie communautaire du centre-ville de Montréal.

Avec la proximité du centre-ville et du Vieux-Montréal, les infrastructures intermodales ainsi qu’un environnement spectaculaire tant naturel qu’urbain, enrichi par les vues extraordinaires sur le fleuve, le corridor vert et bleu du canal de Lachine, les îles et le mont Royal, ce secteur a tout ce qu’il faut pour attirer de nombreux nouveaux résidants désirant y donner vie.

Le secteur Bridge-Bonaventure connaît aussi quelques contraintes. Il est caractérisé par l’absence d’écoles, d’installations sportives et communautaires, d’espaces verts et de parcs nécessaires à des milieux de vie complets. Plusieurs de ses sols sont contaminés en raison de son passé industriel, et les voies ferrées et gares de triage qu’on y trouve impliqueront des interventions publiques pour créer les conditions favorables à son réaménagement.

À l’heure de la crise climatique, nombreux sont ceux qui plaident pour la « ville des proximités », ce que Carlos Moreno appelle la « ville du quart d’heure ». Il propose une densification heureuse qui prend appui sur le transport durable et permet une diversité de services publics et privés à quelques pas de chez soi. Montréal s’est joint aux 40 autres membres du réseau des villes qui veulent adopter cette vision.

L’Institut de développement urbain du Québec (IDU) s’inscrit dans cette orientation et propose de s’inspirer des transformations du port d’HafenCity, à Hambourg, pour guider les choix à venir. La requalification du port allemand a été réalisée avec l’objectif d’y intégrer des bureaux, du résidentiel, des équipements communautaires et des espaces publics. En misant sur la densité et la mixité des usages et des fonctions, cette ville d’Allemagne a réussi à créer des quartiers attrayants, inclusifs et complets.

Aujourd’hui, nous rendons publique notre vision dans le cadre de nos collaborations avec la Ville en vue de l’adoption du plan directeur pour le secteur proposant des espaces de vie inclusifs et de qualité.

Consultez le mémoire de l’IDU sur le secteur Bridge-Bonaventure

La concrétisation de cette vision implique des investissements privés et publics importants de même que l’adoption de réglementations adaptées au site. En tant qu’entrée du centre-ville, le secteur n’aura pas les mêmes coefficients d’occupation au sol (COS) qu’au centre-ville (12) ou dans Griffintown (10,5). Avec un COS de 6, ce qui est déjà prévu au secteur des Faubourgs, et la flexibilité nécessaire en ce qui a trait aux hauteurs et aux superficies de plancher pour atteindre ce coefficient, puis avec une planification qui prévoit une échelle humaine au niveau de la rue et un dégagement des vues, le secteur devient une formidable occasion d’inverser les tendances à l’étalement urbain et de permettre à de nombreux citoyens de « revenir en ville ».

Aller de l’avant maintenant

Forts de nombreuses consultations qui ont déjà eu lieu, les sous-secteurs de la Pointe-du-Moulin, le bassin Wellington et le triangle de la Pointe-Saint-Charles permettent d’aller de l’avant dès maintenant en adoptant cette approche. Déjà, il y a près d’un an, en réfléchissant à la relance post-pandémique, nous suggérions d’y accélérer les travaux.

Avec une mixité d’usage, et tout en valorisant les immeubles patrimoniaux, ces sous-secteurs prioritaires qui ont déjà fait l’objet de consultations pourraient accueillir plus de 10 000 nouveaux logements, des commerces, des bureaux et une zone d’innovation.

S’il peut être plus complexe de transformer des quartiers déjà totalement occupés pour implanter la « ville du quart d’heure », Bridge-Bonaventure se présente comme un site unique pour réussir dès maintenant des quartiers diversifiés où l’on peut résider et travailler puis se divertir à 15 minutes en transport actif.

Au-delà de ces trois sous-secteurs, nous croyons que la Cité-du-Havre et le quai Bickerdike méritent aussi une attention particulière. Nous invitons les autorités à réfléchir à leur intégration au secteur Bridge-Bonaventure. Évidemment, ces deux sous-secteurs ne sont pas au même stade de préparation pour y passer à l’action dès maintenant. En même temps que la Ville voudra lancer le développement de l’entrée sud-ouest du centre-ville, elle devrait amorcer les consultations pour mesurer la faisabilité d’une intégration réussie de ces deux sous-secteurs.

Les autorités municipales s’inquiètent à juste titre de la pénurie et du coût du logement à Montréal. Elles ont souvent exprimé le souhait de pouvoir compter sur plus d’appartements et l’importance d’en améliorer l’abordabilité. Avec l’effet de la crise sanitaire sur les taux d’occupation des bureaux au centre-ville, elles ont manifesté l’intention d’y privilégier rapidement le développement résidentiel. Nous partageons cet objectif. La feuille de route que nous proposons vise l’adoption d’un premier programme particulier d’urbanisme (PPU) au début de 2022, puis une consultation de l’Office de consultation publique de Montréal et enfin l’adoption finale du PPU en 2022.

Bridge-Bonaventure offre la possibilité de planifier et de développer autrement ; nous souhaitons que les décideurs publics passent de la parole aux actes et saisissent l’occasion d’agir sans attendre.

La proximité d’une élection municipale ne devrait pas être un prétexte pour retarder l’action, mais une opportunité pour partager ses visions et s’engager.

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