Du fait de sa Constitution, de ses lois et de son système fiscal, le Canada semble favoriser une discrimination systémique envers les non-croyants.

Tout d’abord, la loi constitutionnelle de 1982 débute par « attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit ». Cette prémisse de base écarte tous ceux et celles qui ne croient pas à la « suprématie de Dieu ». Or, selon le recensement de 2011, 23,9 % de la population canadienne déclarait n’appartenir à aucune religion, une proportion qui ne cesse d’augmenter (comparativement à 4,4 % lors du recensement de 1971 et 13 % en 1991)*. Peut-on, dans ces circonstances, parler d’une Constitution respectueuse de sa diversité ?

Le code criminel canadien accorde également un traitement de faveur aux « croyants ». En effet, le paragraphe 319 du code criminel sur la propagande haineuse interdit les incitations à la haine mais offre une défense en or aux croyants dans l’alinéa (3) b). « Nul ne peut être déclaré coupable d’une infraction prévue au paragraphe (2) dans les cas suivants : […] il a, de bonne foi, exprimé une opinion sur un sujet religieux ou une opinion fondée sur un texte religieux auquel il croit, ou a tenté d’en établir le bien-fondé par argument. »

Une pétition a été déposée à la Chambre des communes en 2018 demandant l’abrogation de cet article.

Cette pétition faisait entre autres valoir que les textes de plusieurs des principales religions comportent des propos qui dénigrent et prônent la haine contre les incroyants, les femmes, les homosexuels ou certains groupes ethniques ou raciaux.

Jody Wilson-Raybould, ministre de la Justice et procureure générale du Canada, sous le gouvernement Trudeau, a répondu que « le gouvernement ne souscrit pas à la proposition visant à abroger l’alinéa 319(3)b) du Code criminel ». Cette exception religieuse de la loi sur la propagande haineuse est donc maintenue.

Fiscalité

La fiscalité canadienne encourage également le fait religieux. En effet, au Canada, les organisations qui « promeuvent la religion » peuvent obtenir le statut d’organisme de bienfaisance enregistré (OBE). Selon les critères du gouvernement, promouvoir la religion signifie « manifester, faire avancer, préserver ou renforcer la croyance dans trois principaux attributs d’une religion, soit la foi en une puissance supérieure et invisible, comme Dieu, un être ou une entité suprême ; une pratique religieuse ou un profond respect ; un système particulier et complet de dogmes et de pratiques ».

Rien pour les organisations promouvant la non-croyance, la laïcité de l’État, l’humanisme, l’universalisme ou une autre philosophie de vie.

Rappelons que le statut d’OBE permet d’être exempté d’impôt sur le revenu, de bénéficier de congé foncier, de taxes municipales et scolaire, de récupération d’une partie des taxes de vente, en plus d’attirer des dons par l'attribution d’un crédit d’impôt aux donateurs. En d’autres mots, les groupes religieux ne paient ni taxes ni impôt, avantages pécuniers refusés aux groupes non croyants.

Est-il utile de rappeler que les institutions religieuses ne sont pas des organismes démocratiques ? Qui plus est, les religions ne sont pas redevables aux contribuables qui financent ces activités.

Dans un État libre et démocratique, tous les citoyens devraient être traités de façon égalitaire ; autant les croyants, les pratiquants que les non-croyants ou les non-pratiquants. Le traitement préférentiel des religions par l’État canadien n’a pas sa raison d’être et crée une discrimination systémique envers les non-croyants. Ce traitement préférentiel est en porte-à-faux avec la neutralité prétendue de l’État.

Espérons que ce sujet sera discuté lors des élections fédérales à venir.

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