Le conflit de travail à l’usine de transformation d’Exceldor, à Saint-Anselme, qui s'est conclu le week-end dernier aura fait couler beaucoup d’encre. Ce conflit ayant mené au gaspillage alimentaire associé à l’euthanasie de plus de 1 million de poulets a interpellé la population et préoccupé tous les acteurs de la filière avicole.

En cherchant à identifier un coupable pour cette situation, certains prétendent qu’un manque de capacité de transformation et une concentration des acteurs de l’industrie de la transformation seraient responsables des dommages collatéraux causés par cette grève.

Or, lorsque l’on connaît le contexte dans lequel opèrent les transformateurs de volailles, on constate que ces affirmations sont loin de la vérité.

Grâce au système de gestion de l’offre, la production de volaille dans chacune des 10 provinces. Les 57 usines de transformation canadiennes de compétence fédérale sont elles aussi réparties d’un océan à l’autre.

Il existe aussi des usines de compétence provinciale qui approvisionnent elles aussi les marchés locaux. Les consommateurs ont ainsi accès à une panoplie de produits qui répondent à leurs besoins en termes de prix et de mode de production (par exemple : biologique ou sans antibiotiques).

Ailleurs dans le monde, l’industrie avicole s’articule généralement autour de quelques acteurs, souvent intégrés verticalement et concentrés géographiquement, qui opèrent des installations ayant une grande capacité de transformation et qui alimentent plusieurs marchés. La même logique s’opère au Canada lorsque l’on regarde le fonctionnement d’autres industries.

Un marché concurrentiel

De plus, les transformateurs de volaille canadiens évoluent dans un marché fortement concurrentiel.

En effet, la gestion de l’offre prévoit que les transformateurs achètent les élevages des producteurs à un prix règlementé basé sur le coût de production et un profit raisonnable. Ces prix minimums ne laissent aucune marge de manœuvre aux transformateurs. Par exemple, l’augmentation récente des prix de la moulée se reflète dans le coût de production et est absorbée par ceux-ci.

De plus, les coûts d’opération des transformateurs ne cessent de croître, que ce soit en raison des mesures mises en place durant la pandémie, de l’augmentation des coûts de main-d’œuvre – lorsque celle-ci est disponible – et des investissements requis afin de répondre aux attentes du public.

Les principaux clients des transformateurs que sont les épiciers exercent quant à eux une forte pression sur leurs fournisseurs. C’est d’ailleurs pourquoi les gouvernements ont récemment chargé un groupe de travail de réfléchir à l’instauration d’un code de conduite pour les détaillants en alimentation.

La pression concurrentielle exercée par les autres sources de protéines présentes sur les étalages représente un autre défi pour les transformateurs de volailles.

Bref, les pressions concurrentielles sont fortes et les usines de transformation de la volaille au Québec comme au Canada sont organisées en fonction de leur environnement économique.

Le réel enjeu ayant mené au gaspillage alimentaire n’est pas la structure de l’industrie, mais plutôt le manque criant de main-d’œuvre. Depuis plusieurs années, les transformateurs alimentaires demandent aux gouvernements d’agir, notamment en améliorant l’accès aux travailleurs étrangers. Dans le cas du conflit chez Exceldor, la capacité de transformation des provinces voisines aurait suffi à absorber les volumes concernés, si ce n’était du manque de main-d’œuvre.

Bref, les leçons à tirer de ce récent conflit sont que c’est à la table de négociation que se trouve la réelle solution et que c’est en améliorant l’accès à la main-d’œuvre pour l’ensemble de l’industrie que l’on réussira à minimiser le gaspillage alimentaire si une telle situation devait se reproduire.

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