Nous savons tous à quel point la dernière année et demie a été difficile socialement et économiquement. Nous avons parlé à maintes reprises de la relance économique tant attendue, mais cette fois-ci semble la bonne grâce au succès de la campagne de vaccination. Si nous souhaitons nous assurer que nos entreprises se rétablissent et reviennent au même niveau de production, et même au-delà, que celui qu’on connaissait avant la crise, la relance devra reposer sur trois piliers : la formation, l’automatisation et l’immigration.

La pandémie aura certes transformé notre marché de l’emploi et fait augmenter le salaire moyen des Québécois. Il faut cependant mettre en perspective cette augmentation presque historique des salaires en raison du contexte de la pandémie. En éliminant des dizaines de milliers d’emplois dans la culture, le tourisme et la restauration, on a enlevé de l’équation de nombreux postes ayant un salaire inférieur à 56 000 $ annuellement.

Les organisations affichant ces postes ne sont pas de mauvais employeurs offrant de bas salaires pour maximiser leurs profits à tout prix. Ce sont notamment des commerces de quartier, des organismes communautaires, des théâtres, des musées, des agriculteurs et des transformateurs alimentaires. Ils sont importants pour notre identité culturelle et l’attractivité de nos régions.

Notre pénurie de travailleurs ne se résorbera pas naturellement. Nous n’avons plus à expliquer le vieillissement de la population et les départs massifs à la retraite qui surviennent actuellement et surviendront de façon encore plus importante d’ici 2030.

Le Québec peut certainement faire mieux afin d’attirer plus de travailleurs sur le marché du travail et retarder le départ à la retraite de nos travailleurs expérimentés.

Notre taux d’activité des 15 à 64 ans en 2019 était de 80,1 %. Il nous positionne à un niveau légèrement inférieur à la moyenne du G7 qui était à 80,3 %, mais surtout inférieur à la moyenne canadienne à 82,1 %.

Personnes handicapées et travailleurs autochtones

Nous pouvons raisonnablement espérer rattraper le reste du Canada et ajouter plus de 90 000 travailleurs potentiels au marché du travail québécois, ce qui représente seulement la moitié des besoins actuels. Il faudrait cependant inciter davantage les personnes éloignées du marché du travail à accéder à un emploi, mieux intégrer les personnes handicapées et faire une place aux travailleurs autochtones. Pour y parvenir, la formation sera l’une des clés du succès. Reconnaissons-le, l’augmentation des salaires, lorsqu’elle est possible, contribuera aussi à accroître l’attractivité.

L’automatisation et la numérisation des entreprises sont également primordiales afin de pallier les besoins de main-d’œuvre. Cette modernisation augmentera notre productivité et notre résilience de façon exceptionnelle, tout en contribuant à l’augmentation réelle de notre richesse collective. Cependant, il a été démontré par une étude de Statistique Canada auprès d’entreprises ayant effectué le virage numérique que ces transformations ne mèneront pas à une diminution des besoins de main-d’œuvre, mais au contraire à un accroissement de 15 % de la demande en main-d’œuvre qualifiée.

Enfin, il y a la question de l’immigration. Plusieurs soutiennent qu’on aurait atteint notre « capacité à intégrer », une notion floue, basée sur aucune analyse factuelle. Nous croyons qu’au-delà des perceptions, cette capacité d’intégration devrait être déterminée de façon objective par des indicateurs socio-économiques.

Cela nous donnerait une idée claire et dépolitisée de ce que nous devons améliorer afin d’être une société plus accueillante prête à faire mieux en intégration des personnes immigrantes. Nous déplorons d’ailleurs la décision récente de ne tenir aucune consultation publique pour la révision des seuils d’immigration, contrairement à ce qui avait pourtant été annoncé.

Tout comme la formation et l’automatisation, l’immigration seule ne règlera pas tous les problèmes du marché du travail québécois. Reste qu’il y a actuellement plus de 180 000 postes vacants au Québec. Nier l’apport essentiel de l’immigration pour nos entreprises comme le fait actuellement le gouvernement québécois est un jeu dangereux pour notre prospérité collective. Sans augmenter le nombre de travailleurs, ce sont nos entreprises qui vont en souffrir et éventuellement les consommateurs. On souhaite tous une relance économique forte et durable, mais force est de constater qu’elle commence avec une prise sur l’enjeu de l’immigration et de la pénurie de main-d’œuvre. La balle est maintenant dans le camp du gouvernement.

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