Même si beaucoup s’entendent sur la nécessité d’intervenir pour préserver la langue française au Québec, le projet de loi 96 a toutefois soulevé un débat légitime autour du plafonnement de l’accès aux cégeps anglophones.

La désertion des établissements d’enseignement francophones s’atténuerait si le réseau de l’éducation parvenait à former adéquatement les élèves à l’anglais langue seconde.

Le ministre responsable de la Langue française, Simon Jolin-Barrette, a affirmé : « Au Québec, on doit pouvoir gagner sa vie en français. » Certes, sauf que les possibilités ne font que diminuer, encore plus pour des postes stratégiques. Le bilinguisme figure largement comme critère d’embauche.

De la même façon, comme l’anglais est la langue de la recherche, sa maîtrise constitue un facteur de réussite déterminant aux études supérieures.

À partir du deuxième cycle, le corpus académique prévoit la lecture d’écrits scientifiques. Des chercheurs de partout traduisent leurs recherches en anglais afin d’être publiés dans les revues scientifiques, faisant voyager leurs innovations.

Les programmes de cycles supérieurs, par exemple en gestion, visent à former, en plus de chercheurs, des cadres de haut niveau. Suivant les tendances à l’automatisation et à la délocalisation de la production, les activités des entreprises dans les pays développés comme le Canada se déplacent toujours plus vers la dispense de services, laquelle suppose de constantes interactions. Les acteurs avec qui collaborer sont nombreux et éparpillés partout sur le globe. La maîtrise de l’anglais est une compétence professionnelle incontournable. La compréhension à travers une langue commune, sans égards aux frontières, agit d’ailleurs comme un liant social.

Protéger la langue française, notamment par les normes d’affichage et la capacité à être servi en français, tout en favorisant une meilleure appropriation de l’anglais langue seconde permettrait de préserver notre identité culturelle sans limiter pour les Québécois et Québécoises, francophones ou allophones, l’accès aux emplois bilingues, notamment ceux mieux rémunérés.

Devenir vraiment bilingue

Le débat doit donc être appréhendé autrement que par le plafonnement de l’accès au réseau anglophone. Comment se fait-il que les cours d’anglais, depuis l’école primaire, échouent à faire des élèves des travailleurs bilingues ?

C’est parce que les élèves terminent leurs études avec un anglais à peine fonctionnel qu’ils convoitent l’enseignement en anglais.

Bien conscients de l’importance de l’anglais pour leur avenir professionnel, ils s’évertuent alors à surmonter l’incapacité du programme scolaire à les former. Pour ce faire, ils s’inscrivent dans un établissement d’enseignement anglophone, ou encore priorisent une consommation culturelle en anglais (séries télévisées, livres, congés sabbatiques sous forme de voyage), ce qui ne nous éloigne que davantage de la promotion de la culture francophone.

Nous bénéficierions tous que les programmes d’enseignement, depuis le primaire jusqu’aux niveaux postsecondaires, soient revus pour plus d’efficacité. Veillons à intégrer des cours de conversation spécifiques à chaque programme, aux niveaux collégial et universitaire, afin que chaque diplômé soit habilité à s’exprimer adéquatement en anglais dans l’exercice de son travail. La confiance d’accéder à la maîtrise de l’anglais inciterait les étudiants à rester dans le réseau francophone.

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