La dernière année nous a fait prendre conscience du rôle crucial de l’espace public dans nos vies. Les parcs, places, marchés publics, rues et ruelles sont en effet devenus des infrastructures fondamentales pour le bien-être des communautés, figurant parmi les rares lieux d’interactions sociales sûres depuis le début de la pandémie. Étant donné leur importance, n’est-ce pas le temps d’en faire une priorité pour 2021 et les années à venir ?

Alors que nos nombreuses mesures d’aide gouvernementale ont été mises en place pour soutenir les secteurs touchés par la crise sanitaire, l’espace public demeure un grand oublié. Il suffit pourtant d’observer l’achalandage des parcs, pris d’assaut par les citoyens depuis le printemps dernier, pour constater leur importance pour notre santé physique et mentale. Or, bien des espaces publics ont été victimes de coupes budgétaires qui, au fil des ans, ont entraîné une détérioration graduelle de leurs infrastructures et une réduction des services.

Le moment est venu de défaire ce que l’urbaniste et militante Jane Jacobs a jadis appelé « The Great Unbalance », ou le « grand déséquilibre », qui consiste à prioriser la construction de nouveaux équipements coûteux, au détriment de l’aménagement d’espaces publics vivants. Ces lieux sont pourtant des éléments fondamentaux de notre tissu social et de la vitalité des quartiers – particulièrement dans le contexte de relance que nous connaissons.

Considérant les budgets limités dont disposent les municipalités, une des solutions pourrait résider dans une contribution accrue des entreprises pour le financement des espaces publics, que ce soit par la philanthropie ou les commandites.

Cette collaboration entre les villes et le privé est la clé d’une relance organique et résiliente, offrant des legs structurants pour les communautés.

Un changement profond est d’ailleurs en train de s’opérer dans le secteur corporatif. De plus en plus d’entreprises placent la notion de RSE (responsabilité sociale de l’entreprise) au cœur de leur culture organisationnelle, et souhaitent avoir un impact favorable sur leur communauté et sur l’environnement. En choisissant de financer des espaces publics, les entreprises participent ainsi à l’amélioration de la vie des collectivités sur le long terme, et non de manière ponctuelle le temps d’un évènement. Les partenariats public-privé permettent donc aux entreprises d’atteindre leurs objectifs de responsabilité sociale, tout en offrant à plus de communautés la possibilité de créer, de transformer et de maintenir leurs espaces publics. C’est une formule qui bénéficie à tous.

D’un point de vue purement stratégique, les entreprises qui investissent dans les communautés locales détiennent un avantage concurrentiel de taille, notamment en ce qui concerne leur « marque employeur » et le recrutement de personnel.

Aussi, les consommateurs s’informent de plus en plus de l’engagement social des entreprises et font des choix de consommation qui correspondent à leurs valeurs. Sur le plan du marketing, le financement d’espaces publics de proximité est donc une tactique qui rapporte, étant donné le lien d’attachement créé avec la population. Ces lieux publics sont ancrés dans le quotidien des gens et offrent aux entreprises une visibilité qui s’inscrit dans la durée, contrairement à une approche de commandite évènementielle qui mesure surtout l’achalandage à un évènement circonscrit dans le temps. En contribuant financièrement à des places de quartier, les entreprises ont donc l’occasion de générer des retombées sociales significatives.

La voie à suivre

De nombreuses entreprises développent des objectifs de responsabilité sociale, mais encore faut-il le faire de manière authentique. Il y a plusieurs exemples d’entreprises qui se démarquent et qui ont développé des initiatives innovantes en lien avec l’espace public, au sein de localités où elles ont des sièges sociaux, des bureaux ou des installations de production et de distribution.

On peut penser à Southwest Airlines avec ses programmes de subventions Heart of the Community et Resilient Communities Impact Program, au programme Jump Start de Canadian Tire ou au Fond des régions de Desjardins, qui ont tous collaboré au bien-être de plusieurs communautés locales.

Prenons aussi l’exemple des patinoires Bleu Blanc Bouge. Projet phare de la Fondation des Canadiens pour l’enfance, ce programme vise à construire des patinoires extérieures communautaires réfrigérées.

La Fondation répond au besoin criant d’infrastructures sportives de qualité pour des quartiers moins bien nantis, permettant ainsi à des milliers de familles d’adopter un mode de vie actif. À ce jour, 11 patinoires Bleu Blanc Bouge sont devenues des lieux de fierté pour les communautés locales où elles se trouvent.

Alors que les municipalités enclenchent leur planification de projets estivaux, l’aménagement d’espaces publics fera probablement partie de leurs priorités. Cet été s’annonce très similaire à celui de l’an dernier et il y aura vraisemblablement peu de grands évènements rassembleurs. La population aura besoin de lieux extérieurs sécuritaires, conviviaux et durables, même après la pandémie, d’ailleurs. Pour les entreprises qui souhaitent contribuer à la santé des communautés locales, il s’agit du contexte idéal pour inclure les espaces publics à leurs objectifs de responsabilité sociale.

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