Le XXIe siècle n’a pas débuté en l’an 2001, mais bel et bien en 2020 avec la pandémie que nous traversons. En sus d’avoir modifié les flux de voyageurs, transformé l’économie planétaire et changé nos habitudes, la COVID-19 est l’élément qui va redéfinir notre siècle. La redistribution du pouvoir d’un monde post-COVID-19 sera fonction des succès à l’avoir maîtrisé.

En dépit des critiques, bouffonneries, facéties et sautes d’humeur de l’ancien président américain Donald Trump, et des perceptions erronées parfois véhiculées, les États-Unis sortent sans conteste comme les grands gagnants de cette épreuve. Ils ont gagné la bataille des vaccins ; les entreprises américaines, épaulées par un gouvernement qui a injecté des sommes faramineuses dans la recherche, ont su faire preuve d’une innovation et d’une vitesse d’adaptation hors du commun pour les nouveaux médicaments, les tests de laboratoire et les équipements médicaux.

Le télémonde de demain, avec sa révolution sociologique dont on verra les implications accélérées dans quelques années, a été réinventé par les Zoom et Teams de ce monde.

Le modèle d’Amazon, avec toutes ses imperfections, a agi comme la ligne nourricière de tous lorsque s’approvisionner relevait d’un exploit. La connectivité du monde, la mesure des impacts des confinements, les flammes des médias sociaux se résument aux entreprises de la Silicon Valley qui ont juste amplifié leur impact sur notre monde de demain.

Russie, Chine et les autres

La Russie, héritière d’une Union soviétique que l’on croyait enterrée, a refait surface avec des succès inattendus et est même allée jusqu’à baptiser son vaccin Sputnik V, souvenir des gloires de la guerre froide. La vieille Russie éternelle a répondu présente bien plus que de nombreux pays européens dépassés par l’aventure. La Chine a voulu prendre son rang de nouvelle superpuissance, mais ne peut encore rivaliser avec les États-Unis et devra désormais composer avec de nombreux pays qui veulent rapatrier avec raison leur tissu industriel sur leur territoire. Elle a certes démontré une puissance accrue dans plusieurs secteurs, mais génère de nombreuses questions sur sa gestion initiale de la COVID-19 comme berceau de cette pandémie, avec une méfiance grandissante de la part de ses voisins asiatiques.

Quant au reste du monde, seul le vieux lion britannique sorti d’une Europe cacophonique et en décomposition a connu des succès étonnants en regard de ses innovations et succès avec les vaccins ou sa vitesse à identifier des variants. D’autres petits pays ont pu signaler leur importance future comme un petit ailier agile, rapide et utile à une grande équipe de hockey, mais qui de par sa taille n’en sera jamais l’étoile : Israël, la Corée du Sud, Singapour ou la Nouvelle-Zélande.

Le Canada, dépourvu de politique stratégique globale, hésitant dans ses choix et pris dans ses sempiternels conflits avec les provinces, a eu beaucoup de mal à trouver ses repères.

La situation actuelle de la campagne de vaccination résume les difficultés que nous avons connues depuis maintenant quasiment un an. Les différentes provinces ont aussi eu leur lot d’échecs, notamment le Québec qui a dépassé la barre des 10 000 morts.

Les leçons de cette pandémie devront être tirées rapidement si nous souhaitons demeurer un acteur significatif sur l’échiquier mondial, sans quoi nous serons relégués à un rôle de second rang dans ce que l’histoire appellera un jour le monde post-COVID-19.

Rebâtir notre cadre industriel dans les secteurs du monde médical, investir dans les technologies des vaccins, aussi utiles pour le traitement des cancers dans le futur, augmenter substantiellement nos capacités dans les spécialités médicales comme les maladies infectieuses et la santé publique, et coordonner à l’échelle du Canada des politiques d’intervention rapide seront les clés incontournables de la maîtrise des prochaines pandémies ou des défis infectieux…. et il y en aura.

*Professeur de médecine à l’Université McGill et à l’Université de Montréal.

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