Au mois de mars 2020, la planète entière a compris l’ampleur de la crise sanitaire en développement en voyant les images dramatiques qui nous provenaient d’Italie. Des photos et des vidéos montraient des patients entassés dans les hôpitaux, couchés sur le ventre ou intubés, ainsi que des médecins désemparés, qui témoignaient de leur détresse devant la caméra.

Ces images ont davantage sensibilisé les citoyens à la gravité de la situation que tous les communiqués de presse de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur la COVID-19. Elles les ont aussi incités à accepter le confinement imposé par les gouvernements.

Or au Québec, de telles images sont rarissimes, car le gouvernement et les autorités de santé publique ferment les portes des établissements de santé aux médias. Une restriction comme on en voit très peu ailleurs dans le monde.

PHOTO DOMENICO STINELLIS, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Patient atteint de la COVID-19 dans un hôpital de Parme, en Italie, en avril 2020

Hormis quelques exceptions, les journalistes et photographes se voient en effet refuser leurs requêtes lorsqu’ils demandent l’autorisation pour entrer dans les hôpitaux et CHSLD, afin de témoigner de la réalité des patients et du personnel soignant.

Ce refus des CIUSSS et du ministère de la Santé est d’autant plus étonnant que les directions d’hôpitaux sont souvent d’accord pour accueillir les médias. Le personnel soignant est lui aussi favorable à l’ouverture des portes de son lieu de travail.

Ces derniers comprennent que l’absence d’images permet à certains de minimiser la gravité du virus, d’apparenter ses symptômes à ceux d’une « simple grippe », ou encore, de justifier les relâchements aux consignes sanitaires.

Des témoignages essentiels

D’où l’importance de recueillir les témoignages des médecins, des infirmières et des préposées. D’où l’importance également d’entendre et de voir les patients qui l’acceptent, afin de montrer la dure réalité qui se vit derrière des portes qui sont actuellement closes.

Les membres du personnel de la santé demeurent, après tout, les principaux témoins de ce qui se vit à l’intérieur des établissements. Il est donc essentiel qu’ils puissent raconter ce qui s’y passe.

Sans compter que des centaines de Québécois ont des proches actuellement hospitalisés ou en attente d’une intervention chirurgicale.

Bien sûr, les médias sont conscients des risques liés à la COVID-19. C’est pourquoi ils respectent les règles sanitaires lorsqu’ils sont sur le terrain depuis le début de cette pandémie, et le feraient tout aussi consciencieusement dans un contexte hospitalier.

Nous, qui représentons les grands médias du Québec, demandons donc au gouvernement du Québec et aux autorités de santé publique, au nom du droit du public à l’information, d’ouvrir aux journalistes les portes des établissements où se livre une véritable guerre qui nous concerne tous.

* Cosignataires : Benoit Dussault, directeur principal, 24 heures ; George Kalogerakis, rédacteur en chef, Agence QMI ; Helen Evans, rédactrice en chef, CBC Québec ; Melanie Porco, superviseure – production nouvelles, CityNews Montreal (Citytv) ; Chris Bury, directeur de la programmation et de l’information, CJAD 800 ; Julie-Christine Gagnon, directrice de l’information 98,5, stations parlées, Cogeco nouvelles et Radio circulation ; Jed Kahane, directeur de l’information, CTV News ; Karen Macdonald, directrice de l’information, Global News ; Martin Picard, vice-président et chef de l’exploitation du contenu, Groupe TVA Inc. ; Dany Doucet, rédacteur en chef, Journal de Montréal ; Sébastien Ménard, rédacteur en chef, Journal de Québec ; Geneviève Rossier, éditrice et directrice générale, La Presse Canadienne, service français ; Brian Myles, directeur, Le Devoir ; Stéphane Lavallée, directeur général, Les coops de l’information ; Lucinda Chodan, rédactrice en chef, Montreal Gazette ; Jean-Nicolas Gagné, directeur général, QUB radio ; Xavier Brassard-Bédard, rédacteur en chef, TVA Nouvelles\LCN

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