Les auteurs s’adressent au DHoracio Arruda, directeur national de santé publique

Cher DArruda, il semble que M. Legault vous écoute pour s’attaquer à la crise sanitaire que la pandémie de la COVID-19 a entraînée, voilà une bonne nouvelle ! En revanche, le gouvernement décide de faire la sourde oreille lorsqu’on l’avertit des dangers de ne pas agir face à la crise climatique et environnementale que l’on vit présentement. En tant que directeur de la santé publique, on a beaucoup entendu vos recommandations face à la crise sanitaire, mais on a peu entendu vos recommandations pour faire face à la crise environnementale.

Aplanir la courbe… des gaz à effet de serre

Comme docteur, vous devez bien savoir à quel point la rigueur des données scientifiques est une garantie de leur véracité et nous permet de prendre les meilleures décisions possible avec les informations dont on dispose. Au Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec (MÉPACQ), nous ne sommes pas des scientifiques, cependant nous comprenons l’importance de communiquer de façon claire et accessible, pour que les personnes puissent comprendre et agir sur les enjeux qui les touchent.

Les données sur le réchauffement planétaire, ses dangers pour tous les êtres vivants et la nécessité de prendre des mesures d’urgence pour contrer cette tendance parlent d’elles-mêmes.

Le consensus scientifique à ce sujet est univoque : les activités humaines sont responsables du réchauffement planétaire et celui-ci risque de bouleverser drastiquement nos vies. Le rehaussement des niveaux d’eau, des conditions météorologiques de plus en plus défavorables à l’agriculture, la flambée du coût des aliments, l’augmentation des cataclysmes et avec eux les déplacements des réfugiés climatiques, ne sont pas des opinions, des points de vue ou des fausses nouvelles. Ce sont des phénomènes qui existent déjà et risquent de se multiplier si on ne met pas un frein aux émissions de gaz à effet de serre.

M. Arruda, alors que vous répétez sur toutes les tribunes, aux côtés de M. Legault, l’importance d’aplanir la courbe de contagion afin de protéger un maximum de personnes, la santé publique ne doit-elle pas aussi prendre position sur une autre courbe tout aussi importante, celle des émissions de gaz à effet de serre ? Si le gouvernement du Québec est capable d’écouter les experts scientifiques pour contrer la COVID-19, dont on a pris connaissance il y a moins d’un an, pourquoi peine-t-il autant à écouter la même communauté scientifique qui alerte depuis bien plus longtemps sur les effets dévastateurs du réchauffement planétaire ?

Appliquer les mesures de protection… environnementale

Pourtant, dans les deux crises que nous vivons actuellement, les moyens à mettre de l’avant pour réduire leurs conséquences néfastes sont clairs. Pour éviter de propager la COVID-19, on nous demande de porter un couvre-visage, de nous laver les mains fréquemment et de pratiquer la distanciation physique. Pour atténuer la crise climatique, nous devons arrêter l’exploitation des combustibles fossiles, reforester massivement, préserver les milieux naturels et changer le mode de consommation et de production à la base de notre système économique. Ce sont des gestes plus faciles à dire qu’à faire, nous sommes d’accord, mais comme M. Legault nous le répète tous les jours, nous devons toutes et tous mettre l’épaule à la roue. Alors qu’on lui demande chaque jour des sacrifices et des efforts, la population est en droit de s’attendre à ce que son gouvernement fasse lui aussi sa part et mette en place des mesures structurantes pour faire face aux défis environnementaux.

Ça va bien aller… si on suit les recommandations du GIEC

À de multiples égards, la crise sanitaire et la crise environnementale se ressemblent. Toutes deux menacent la santé publique et doivent être prises avec tout le sérieux nécessaire, en suivant la science, comme vous ne cessez de le marteler à titre de directeur de la santé publique. Ces crises touchent et toucheront également, de façon disproportionnée, les personnes en situation de vulnérabilité.

Ces crises se distinguent aussi, à savoir que la crise environnementale ne pourra être réglée par un vaccin ou un confinement, qu’elle provoquera de nombreuses conséquences dévastatrices et sera responsable de l’apparition d’autres pandémies mortelles.

M. Arruda, à l’instar du sérieux avec lequel vous traitez la crise sanitaire en vous appuyant sur les récentes données scientifiques, nous nous attendons à ce que la santé publique prenne la crise environnementale tout aussi sérieusement et réclame au ministère de l’Environnement d’appliquer les recommandations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sans plus tarder.

* Cosignataires : François Duguay, Association des groupes d’éducation populaire autonome du Centre-du-Québec (AGÉPA CDQ) ; Geneviève Tremblay-Racette, Table ronde des organismes volontaires en éducation populaire d’éducation de l’Outaouais (TROVEPO) ; Jennifer McKenna, Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du SLSJ ; Jessica Lambert M., Mouvement d’éducation populaire autonome de Lanaudière ; Josée Harnois, Table régionale des organismes volontaires d’éducation populaire (TROVEP) de la Montérégie ; Julie Corbeil, Table régionale des organismes volontaires d’éducation populaire (TROVEP) de Montréal ; Julie Côté, Regroupement d’éducation populaire de l’Abitibi-Témiscamingue ; Naélie Bouchard-Sylvain, Regroupement d’éducation populaire en action communautaire des régions de Québec et Chaudière-Appalaches ; Marc Benoît, Regroupement des organismes d’éducation populaire autonome de la Mauricie (ROÉPAM) ; Marilou Lépine-Gougeon, Table régionale des organismes volontaires d’éducation populaire de l’Estrie ; Michel Savard, Table des groupes populaires Côte-Nord

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