L’avenir des villes responsables passe par la mobilité douce et active. À ce titre, il est dans l’intérêt commun que l’usage du vélo s’intensifie. Il s’agit d’un mode de locomotion idéal à plusieurs égards. Il est économique, polyvalent et peu encombrant, pour son propriétaire et pour l’ensemble de la société.

En effet, son poids inflige un coût infime aux contribuables en raison de l’absence d’usure de la chaussée. De plus, le transfert de l’auto vers une fonction cyclable d’une fraction de l’emprise d’une rue permet de réduire la surface susceptible d’avoir de fréquents besoins de réfection, tout en multipliant les occasions de verdissement. La transition d’une part modale auto-vélo amoindrit aussi l’impact automobile sur la rue, contribuant encore davantage à la réduction des coûts environnementaux et de voirie que l’on paie tous et toutes, qu’on utilise le réseau ou pas.

Le coût des infrastructures cyclistes est très faible, relativement à la superficie nécessaire, à la durée d’usage et au nombre d’usagers, et leur construction permet de réduire, à long terme, le poids financier lié jadis à l’impact automobile. Finalement, tant dans sa fabrication que dans sa propulsion, l’empreinte écologique du vélo reste minimale. Capable de transporter des charges non négligeables, et parfaitement compatible avec les principes de densification et de « ville 15 minutes », il a une balance positive nette en matière de bienfaits socio-économiques, y compris pour ceux qui n’en font pas.

Fausses perceptions, fausses oppositions

Il plane une perception selon laquelle il existait un équilibre et que l’administration travaille à en faire pencher la balance en faveur du cyclisme. Cette théorie est absolument fausse : depuis près de 70 ans, l’auto domine toujours largement l’urbanité, et continuera d’être privilégiée dans le partage de l’espace public pendant encore longtemps.

Les projets cyclables actuels ne font que réduire progressivement l’écart accumulé par des décennies de culture du tout-à-l’auto, loin de l’effacer, encore moins de le renverser.

À ce titre, il ne faut guère s’étonner de l’intensité de la cadence actuelle : nous avons un retard collectif à rattraper. L’impression qu’a une minorité de gens voulant que l’usage de l’automobile soit mis en danger n’est que le résultat d’un regard déformé sur la réalité, reflet d’un privilège « collé au visage ». Il faut prendre du recul et cesser de considérer certaines choses pour acquises.

Il s’opère aussi une polarisation de groupes faussement distincts. L’hyper-catégorisation sous des étiquettes fixes, à des fins de mise en opposition, crée des mythes nocifs. Il n’y a pas de cyclistes contre les automobilistes. En fait, une très large part des cyclistes sont des automobilistes et des piétons à d’autres moments. Ces milliers de Montréalais revêtent chaque semaine différentes identités, et ont des besoins fondamentaux de sécurité et d’infrastructures de qualité vouées à chacun des types de mobilité qu’ils ou elles choisissent.

Cohabitation harmonieuse

Les infrastructures cyclables structurantes sont un vecteur d’intégration du cyclisme à la structure urbaine, et comme pour bien des réalités sociales, transforment avec le temps cette intégration en une cohabitation harmonieuse. Cela signifie que l’inscription et l’encadrement du cyclisme dans l’ADN physique de la ville, en assurant aux usagers qu’ils s’y sentent en sécurité et à leur place, mèneront nécessairement à une baisse de la délinquance quelquefois observée dans la pratique du vélo, qui subsiste en raison des déficiences nombreuses de la configuration du réseau actuel et du Code de la sécurité routière.

De la démocratisation inévitable du cyclisme naît une cohabitation, et celle-ci peut être conflictuelle ou harmonieuse. Évidemment, il faut tout faire pour garantir l’harmonie, conditionnelle à une intégration réussie dans le tissu existant. C’est pour cela que la construction d’infrastructures structurantes et permanentes est primordiale.

Le vélo ne convient pas à tous les modes de vie, mais il peut résolument être adopté par une majorité des gens dans plusieurs de leurs déplacements.

Sans abandonner l’auto, qui conserve malgré tout des qualités bien à elle, il s’agit surtout de prendre conscience qu’il y a absence d’équilibre dans l’espace de mobilité qui nous entoure, et qu’il est normal et responsable de travailler à revoir ce partage dans l’intérêt commun.

Il en va de la qualité de vie, de la sécurité et de la transformation de la ville vers un écosystème plus résilient, sain et durable.

Ensuite, il faut s’inspirer de ce que des milliers de Montréalais font déjà : mélanger les mobilités au quotidien, et au-delà d’aller du point A au point B, embrasser le potentiel qu’a l’espace public pour favoriser la sociabilisation, le jeu et la créativité. Pour l’heure, la construction d’axes cyclables protégés et structurants est un coup de pédale dans la bonne direction.

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