On s’accorde à dire que la survie du français au Québec dépend dans une bonne mesure d’une francisation réussie des personnes immigrantes, comme fer de lance de l’intégration des nouveaux arrivants à notre société.

Les quelque 580 professeures et professeurs de francisation du ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration se retrouvent donc en première ligne pour transmettre notre langue et nos valeurs communes à des dizaines de milliers de personnes issues de cultures et d’horizons variés qui ont choisi le Québec comme terre d’accueil.

Or, le contexte actuel de pandémie entraînant la prééminence de l’enseignement à distance, le sort des élèves préoccupe sérieusement ces professeurs qui côtoient au quotidien des élèves se retrouvant isolés et ne disposant pas des outils informatiques appropriés. Cela, combiné à des situations familiales ou sociales complexes, tels des ordinateurs partagés ou des difficultés d’aménagement physique, risque de mettre en péril le succès de leur intégration. Alors que le ministère de l’Éducation investit 150 millions dans l’achat de 200 000 tablettes et ordinateurs portables pour ses propres élèves, on doit constater que rien de tel n’est prévu en francisation, malgré les besoins criants d’une clientèle immigrante qui ne doit surtout pas se retrouver laissée pour compte.

Les professeurs, quant à eux, se sentent-ils suffisamment épaulés et soutenus, surtout dans le contexte actuel de pandémie ?

Certes, depuis un an, le gouvernement a investi des millions en francisation, mais ceux-ci se sont peu matérialisés dans les salles de classe. À preuve, nos professeurs doivent maintenant se convertir à l’enseignement à distance, et ce, sans plateforme spécialisée pour l’enseignement, en utilisant la plupart du temps leur ordinateur personnel, avec tout au plus quelques heures de formation et peu de temps pour la préparation. Or, dans la plupart des autres secteurs d’enseignement spécialisé, cégeps ou autres, on a jugé que le temps de préparation et d’adaptation à ce type d’enseignement devait se conjuguer en semaines.

Par ailleurs, est-il normal que 80 % des professeurs de français langue d’intégration soient à statut occasionnel sans la moindre sécurité d’emploi, malgré leur expertise, leurs années d’expérience et le rôle vital qu’ils accomplissent pour notre société ? L’État devrait investir ce qu’il faut pour les attirer, les retenir, les valoriser et leur apporter soutien et formation.

La bonne volonté des gens du Ministère n’est pas à mettre en cause, mais la francisation dispose-t-elle vraiment des ressources financières suffisantes pour remplir d’une manière optimale son mandat ?

Nous souhaitons vivement que l’arrivée à la tête du Ministère de madame Nadine Girault puisse permettre, à travers les investissements attendus auprès des professeurs et des élèves, à la francisation des personnes immigrantes d’accomplir au mieux la mission d’intégration et de cohésion sociale indispensable à notre avenir collectif.

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