Le 21 février dernier, j’étais invité à prononcer un discours devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM).

Mon allocution portait sur trois des principales priorités de notre politique étrangère : la tragédie du vol PS752 et nos efforts diplomatiques plaidant pour la transparence, la responsabilité et la justice pour les familles des victimes ; l’engagement historique et soutenu du Canada en faveur d’un multilatéralisme fort dans un monde de plus en plus imprévisible ; et la complexité de notre relation avec la Chine.

Cette allocution peut sembler aujourd’hui une mémoire lointaine. J’y reviendrai.

Nous venions tout juste, à l’époque, de conclure une opération de rapatriement d’urgence ramenant au pays 399 Canadiens de la ville de Wuhan, en Chine, à ce moment l’épicentre de l’épidémie de COVID-19. Cette opération nous a permis de pleinement saisir la complexité de rapatrier des Canadiens dans des circonstances exceptionnelles.

Avec le recul, les leçons tirées de cette expérience allaient s’avérer inestimables pour la suite des choses. En effet, difficile de s’imaginer à l’époque que nous étions sur le point d’entamer la plus importante opération de rapatriement de l’histoire du pays en temps de paix.

Début mars, l’un après l’autre, les pays ferment leurs frontières et leurs espaces aériens alors que les transporteurs commerciaux annoncent une importante réduction de leurs services. Affaires mondiales Canada se transforme soudainement en un immense centre de gestion de crise et d’intervention d’urgence.

Pendant les deux semaines du 13 au 27 mars, notre centre d’intervention d’urgence a reçu pas moins de 58 000 appels de voyageurs canadiens coincés à l’étranger. C’est plus d’appels que nous avions reçus durant toute l’année précédente.

Du jour au lendemain, nos diplomates qui se consacrent habituellement à développer, peaufiner et mettre en œuvre la politique étrangère du Canada se sont joints à nos équipes d’experts consulaires pour prêter main-forte dans notre centre d’appels, ou encore pour persuader des pays de lever temporairement des interdictions de mouvement, rouvrir leurs espaces aériens et organiser des vols spéciaux avec des transporteurs commerciaux.

Nous avons parfois même eu à négocier des droits d’atterrissage pour certains vols par textos entre homologues.

Du Maroc à l’Équateur en passant par le Guatemala, l’Espagne, le Pérou, l’Inde et les Philippines, chaque pays présentait une série de défis uniques, aussi complexes les uns les autres, alors que nous travaillions jour et nuit pour rapatrier le plus grand nombre de voyageurs possible, le plus rapidement possible.

Au cours des dernières semaines, nous avons facilité le retour au pays de milliers de voyageurs canadiens à bord de centaines de vols en provenance de plus de 60 pays.

Nous sommes passés d’une veille active de quelque 5000 de nos concitoyens sur 115 bateaux de croisière il y a un mois, à moins d’une vingtaine sur quelques navires aujourd’hui.

Ces chiffres sont le fruit d’un travail herculéen sans précédent qui illustre le meilleur de ce que nous sommes en tant que Canadiens, la force de nos valeurs, notre sens de la solidarité et notre résilience dans des circonstances exceptionnelles.

Notre opération de rapatriement n’aura peut-être pas été parfaite, certes. L’histoire en jugera. Mais dans les circonstances, cette opération aura été, somme toute, un exercice réussi. Et nous continuons à travailler sans relâche pour assurer le retour en toute sécurité de voyageurs toujours coincés à l’étranger.

Nous comprenons pleinement l’anxiété de tous ceux qui sont encore à l’étranger et qui souhaitent rentrer au pays. Nous tenons à les rassurer que leur santé et leur sécurité demeurent notre priorité.

L’influence bien réelle du Canada

Lorsque je repense à cette allocution au CORIM début février, difficile de ne pas constater à quel point cette crise de santé publique globale a mis en exergue l’importance et la pertinence des principes et des valeurs qui animent la politique étrangère de notre pays.

À titre de ministre des Affaires étrangères, je suis témoin chaque jour de l’influence et du pouvoir de mobilisation du Canada à l’international, alors qu’un multilatéralisme fort et un ordre international fondé sur les règles sont plus nécessaires que jamais.

Que ce soit au sein du G7 et du G20, où le premier ministre exerce un fort leadership, ou encore au sein du Groupe ministériel de coordination international d’une douzaine de pays que le Canada a créé et convoque régulièrement depuis le début de la crise, le Canada se démarque.

Le Canada s’est aussi fait remarquer, par exemple, lors de la récente rencontre de l’ONU que nous avons coprésidée avec la Jamaïque sur les répercussions financières et socioéconomiques de la COVID-19.

Notre plaidoyer sur l’importance de maintenir et de sécuriser les chaînes d’approvisionnement, préserver des ponts aériens pour les passagers et les marchandises essentielles, assurer un appui aux pays les plus vulnérables, mettre en commun notre savoir et nos ressources scientifiques, ou encore veiller à ce que les actions des gouvernements soient bien coordonnées avec celles des organisations internationales, ce ne sont là que quelques exemples où le Canada joue un rôle crucial afin d’assurer que la communauté internationale puisse se relever encore plus forte de cette crise.

Alors que nous entamons la réflexion et le travail en perspective de la reprise après cette crise, les Canadiens peuvent donc être confiants que notre capacité à faire avancer nos priorités en matière d’affaires étrangères ne sera que renforcée.

Renforcée par les actions que nous avons faites, les relations que nous avons nouées, l’engagement que nous avons démontré envers le multilatéralisme, et surtout le leadership dont nous avons fait preuve pendant cette crise et que nous continuerons d’exercer une fois la crise terminée.

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