À compter d’aujourd’hui, notre collaborateur Marc Séguin vous propose tous les deux jours une réflexion sur d’autres aspects du quotidien.

Les crocus sont sortis. Bien nommés « perce-neige », ils se sont pointés comme chaque printemps. Un peu en avance, mais rien pour écrire à sa mère, autrement préoccupée ailleurs, comme le reste de la planète.

Justement, cet espace ne traitera pas du virus et évitera d’y trouver du sens ou d’en inventer. Pour ventiler un peu la pièce. Parce que parfois trop, c’est comme avec l’alcool, disait l’autre.

Les crocus, donc. Ils sont les premiers à resurgir de l’hiver. Viennent ensuite les pousses de marguerites, l’ail des bois et, curieusement, les érables, qui sont les premiers arbres de nos forêts à s’enfeuiller.

Même si la surface est boueuse, la terre dort. En apparence, parce que c’est aussi le temps des sucres.

Parfois, au milieu de l’érablière, les jours ensoleillés et sans vent, on entend les gouttes de sève tomber dans les chaudières. Comme des secondes qui passent. Par centaines. Ça fait sourire.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

« Ça va fondre rapidement », prévoit Marc Séguin.

Au sud de la province, les champs sont découverts. Il reste quelques éclats d’hiver ici et là sur les coteaux nord, dans les bois et dans les fossés ; juste assez pour faire de la tire sur la neige. Faudra bientôt dire aux enfants que ce ne sera plus possible et gérer leur déception. Ça va fondre rapidement.

Les chats de ferme ont survécu jusqu’ici. Un petit mâle blond qui n’a pas encore un an, qui s’appelle Caramel (c’est lui qui me l’a dit), vient frapper à la porte à 7 h tous les matins pour se faire nourrir. C’est le moins farouche. Les autres restent méfiants. Bientôt aussi les matous seront des matous et les chattes des chattes. C’est beau quand elles font le dos rond et acceptent la suite.

Les outardes, elles aussi, sont revenues. Et un voilier d’oies blanches déjà dans le ciel cette semaine.

J’ai parlé à un biologiste hier qui m’a dit qu’elles étaient rendues au nord de l’État de New York. Ça, c’est anormal, signe que le printemps est hâtif. Tout semble s’accorder, parce que l’eau d’érable, qui sort normalement à 1 degré de sucre (saccharose) au début de la saison, était à 3 degrés cette année. Les vieux – les vieux de l’ancien temps, on s’entend – disaient que la saison serait courte si l’eau était sucrée au départ. Ils sont beaux, les rythmes qu’on ne contrôle pas. Comme si les arbres savaient des choses qu’on ignore. Ou comme ouvrir une fenêtre après avoir été enfermé pendant des mois.

Plusieurs centaines d’autres petits oiseaux qui viennent à la mangeoire, disputer les graines aux écureuils. C’est rassurant de les voir revenir. J’ai aussi retrouvé un râteau et une pelle ronde sous la neige. Je ne vous dis pas le bonheur. Je les avais oubliés à l’automne.

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