L’atteinte de l’équilibre budgétaire est due à des circonstances favorables ; la prospérité des Québécois passe par un autre chemin.

Alors que les marchés financiers s’alarment des répercussions de la COVID-19 et que l’Arabie saoudite fait chuter le cours du pétrole, un budget équilibré s’imposait. 

On peut donc parler d’une mission accomplie pour le ministre des Finances en ce qui a trait à la gestion des finances publiques et du remboursement de la dette. Les générations futures bénéficieront grandement de l’attention portée par des gouvernements successifs à cet enjeu crucial. Malheureusement, on n’a pu résister à la tentation d’augmenter les dépenses tous azimuts, et de façon importante.

Alors que certains se réjouiront de l’encre verte qui marque de larges pans de l’énoncé budgétaire, le contribuable québécois risque d’y voir une occasion manquée.

Au cours des six dernières années, Québec a engrangé des surplus budgétaires totalisant près de 26 milliards, dont 4,5 milliards pour l’année financière qui se termine. Après les paiements effectués (à juste titre) au Fonds des générations, il restera tout même 12 milliards payés en trop par les Québécois en impôts, taxes et tarifs de toutes sortes. Cela n’inclut pas les surplus qui s’ajouteront au cours des deux prochains exercices financiers, soit près de 6 milliards en tout, peut-être plus.

Si le gouvernement souhaite un rattrapage économique avec le reste du pays et une amélioration du niveau de vie des Québécois, il doit savoir que cela ne se produira pas sans une baisse d’impôts. Le taux élevé d’imposition explique en grande partie pourquoi le revenu disponible par habitant des Québécois est le plus bas dans tout le pays. Cette taxe sur le travail nuit à la productivité de la province et nous appauvrit tous. Le gouvernement dispose depuis plusieurs années d’une marge de manœuvre pour l’abaisser.

L’augmentation importante des dépenses permet d’entretenir des incertitudes quant à l’utilisation qui est faite de l’argent des Québécois, comme s’il était farfelu de penser que des économies ou, simplement, une diminution du gaspillage sont possibles au sein de l’appareil gouvernemental. 

Considérant le défi démographique qui s’en vient, il est impératif de procéder à une révision systématique des dépenses gouvernementales, qu’il s’agisse de leur hauteur ou de la façon dont elles sont effectuées, et de faire de l’allocation optimale de l’argent des contribuables une priorité. Un tel signal n’a malheureusement pas été envoyé hier.

Par exemple, on consacrera encore plus de 1 milliard aux subventions à l’achat d’un véhicule électrique. En 2017, le coût pour chaque tonne de GES non émise en raison du remplacement d’une voiture à essence par un véhicule électrique était d’un peu moins de 300 $. La même année, le coût pour éviter l’émission d’une tonne de GES sur la bourse du carbone était de 20 $. Nul besoin de sortir la calculatrice pour comprendre la très faible efficience de ces subventions aux voitures électriques et le gaspillage entraîné par une telle politique publique. Diminuer nos émissions est tout à fait souhaitable, mais rien ne nous oblige à adopter une mesure coûteuse et inefficace pour tenter d’y parvenir.

Fondamentalement, il est plus que temps que l’on se pose des questions sur l’augmentation incessante des dépenses en santé, dont les besoins ne ralentiront pas avec le vieillissement de la population. Les durées de séjour aux urgences continuent d’augmenter et le gouvernement actuel, comme les autres avant lui, ne semble pas savoir comment régler ce problème grave qui, dans les conditions actuelles, ne pourra que s’aggraver encore.

Les pays européens nous offrent pourtant de nombreux exemples de systèmes de santé universels bien plus performants que le nôtre. En ce qui a trait aux soins de longue durée pour nos aînés, les propres évaluations du Ministère indiquent que les établissements gérés par des entrepreneurs, mais financés par le gouvernement, coûtent moins cher tout en offrant de meilleurs milieux de vie aux patients. Pourquoi s’acharner encore à utiliser la mauvaise recette ?

En somme, le gouvernement, comme souvent dans le passé, a déposé un budget qui vise à plaire à de nombreuses clientèles et qui fera gonfler une fois de plus la taille de l’État. Or, notre objectif de rattrapage économique devrait plutôt favoriser un allégement du fardeau fiscal des Québécois. Après tout, des études économiques ont montré que les économies qui croissent le plus lentement tendent à être celles où l’État intervient et réglemente abondamment. Le Québec en est malheureusement un exemple probant.

Notre niveau de vie n’est pas mauvais, bien sûr, mais la réalité est qu’il est à la traîne de provinces et pays comparables. Cela devrait au minimum entraîner quelques remises en question.

Considérant que le taux de pression fiscale du gouvernement dans l’économie du Québec excédait de 6,6 % la moyenne canadienne l’an dernier – ce qui équivaut à un prélèvement annuel d’environ six milliards de plus dans les poches des Québécois –, que l’état des finances publiques nous le permet et que l’augmentation de notre prospérité l’impose, nous devons maintenant espérer que la prochaine mesure importante du gouvernement soit un plan de réduction de notre fardeau fiscal.

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