Nous avons de bonnes raisons de nous réjouir à l’occasion de la Journée internationale des femmes ; les changements obtenus de haute lutte dans le passé pour faire progresser l’égalité des sexes en font partie.

Pour bâtir le monde auquel nous aspirons, où l’égalité n’est pas seulement une vue de l’esprit, mais une réalité, il nous faut néanmoins porter un regard franc sur ce qu’il reste à accomplir.

Les femmes, les filles et les personnes non binaires demeurent sous-représentées dans les lieux de pouvoir, voire muselées dans le pire des cas.

Dans de nombreux secteurs d’activité partout dans le monde, elles sont absentes des sphères où se prennent des décisions, se résolvent des problèmes et s’exerce l’influence.

Modifier les structures et les dynamiques

Oui, il faut nommer un plus grand nombre de femmes dans des postes de direction. Mais cela ne suffit pas. Il faut aussi modifier les structures et les dynamiques qui contribuent à exclure les femmes du pouvoir. Pour ce faire, il faut s’attaquer aux racines de l’inégalité. Ce qui signifie prôner des changements systémiques.

Ces dernières années, la promotion des droits des femmes a connu de véritables montagnes russes un peu partout. Des lois régressives ont fait reculer les acquis ; les conflits armés, l’insécurité économique et les répercussions climatiques entraînent des niveaux de violence envers les femmes démesurément élevés.

Malgré tout, la résistance des femmes et des filles s’organise.

En témoigne la force des mouvements comme #moiaussi et #timesup. Ou l’action de ces filles autochtones qui mènent la lutte contre les changements climatiques du Canada à l’Équateur.

Partout dans le monde, des femmes protestent et se mobilisent pour revendiquer un monde plus égalitaire.

Cela ne nous étonne pas.

Les principales concernées par des enjeux comme le climat, les droits en matière de procréation et la violence sont en effet les mieux placées pour imaginer des solutions constructives et durables. Les femmes ont ouvert la voie du changement en construisant la paix après la guerre, en faisant changer les lois sur l’avortement, en mettant fin au mariage des enfants et en élisant des représentantes au gouvernement, pour ne citer que ces exemples.

Oui, les organisations féminines et les mouvements féministes ont été le moteur des transformations les plus importantes de notre époque. Pourtant, ceux-ci ne reçoivent que 1 % du financement consacré à l’égalité des genres, alors qu’ils accomplissent souvent le travail le plus innovateur et pertinent, et encore, avec des budgets de misère. Il est grand temps de leur fournir les ressources nécessaires pour le faire.

Nous nous sommes réunies pour créer le Fonds Égalité en nous posant les questions suivantes : à quoi ressemble un monde véritablement égalitaire ? De quoi avons-nous besoin pour y parvenir ?

À n’en pas douter, le financement constitue un outil indispensable. Pour transformer le rapport de forces, il faut allouer des ressources aux défenseurs de l’égalité sur le terrain.

L’égalité ne s’achète pas, il est vrai, mais on ne peut pas non plus sous-estimer le pouvoir de l’argent lorsqu’il s’agit de créer un monde plus égalitaire. La question n’est pas seulement de savoir comment on donne et on dépense cet argent, mais aussi de savoir comment et dans quoi on l’investit.

Comment cela se traduit-il ?

En soutenant, par exemple, un programme destiné à former des femmes dans les régions déchirées par la guerre afin qu’elles se présentent en politique. En accordant des fonds de démarrage aux jeunes entreprises dirigées par des femmes. En finançant des stratégies de promotion des droits qui amèneront des changements d’orientation susceptibles d’améliorer la sécurité des filles et des femmes ou de favoriser leur accès à des débouchés.

En 2019, on a assisté à un vaste mouvement d’adhésion au changement, un moment historique dans notre pays. 

Donnant suite à l’appel lancé par le gouvernement canadien pour l’établissement d’un Partenariat pour l’égalité des genres, nous avons réuni une large coalition de militants, de philanthropes, de banquiers et d’investisseurs et concocté un plan ambitieux : mettre des ressources à la disposition des organisations pilotées par des femmes, et ce, tant et aussi longtemps que nécessaire.

C’est ainsi qu’est né le Fonds Égalité, une collaboration qui réunit sous une même enseigne le don de subventions, l’investissement axé sur l’égalité des genres et la philanthropie. Nous avons fait le pari de garantir la pérennité du financement consacré à la promotion des droits des femmes dans le monde entier, en priorisant l’apport de nouveaux bailleurs de fonds et l’injection d’argent neuf dans un mouvement qui souffre de sous-financement chronique.

En juin dernier, le gouvernement canadien a investi 300 millions dans le Fonds Égalité, dans l’objectif d’instaurer un modèle novateur qui contribuera à redéfinir les notions de pouvoir et d’argent et à faire en sorte que les fonds investis et dépensés auront des retombées pour les femmes.

Nous sommes impatientes de voir se produire les transformations dont ont besoin les femmes et les filles.

Nous fondons beaucoup d’espoir sur ces nouveaux modèles de financement qui visent à appuyer, partout dans le monde, des leaders courageuses qui s’emploieront à faire advenir des changements significatifs et durables.

Le féminisme a essentiellement pour but de créer un monde équitable pour toutes et tous. Nous sommes fin prêtes à miser sur le financement pour faire en sorte que les femmes y prennent leur juste place, au cours de la décennie à venir et au-delà.

* Jess Tomlin a occupé le poste de présidente-directrice générale du Fonds MATCH international pour la femme et dirigé une initiative destinée à outiller des organisations de femmes dans le monde entier. Jessica Houssian a été directrice générale de l’organisme Women Moving Millions et a consacré toute sa carrière en philanthropie à la promotion de l’égalité des sexes.

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