Difficile à imaginer, mais dans les quelques mois qui ont précédé l’élection de la Coalition avenir Québec (CAQ), son chef François Legault se défendait de ne pas être un parti de droite. Ainsi pouvait-on lire dans les médias : « La CAQ : associée à l’extrême droite », « La CAQ, pas un parti de droite, dit Legault ». « La CAQ est un parti de droite populiste, dit Sylvain Gaudreault du Parti québécois » ; « Ni à droite ni à gauche », répliquait le chef de la CAQ.

Après deux ans de gouvernance, on peut le reconnaître : les quelques éléments de centre droit économique, ceux hérités notamment de la fusion de l’Action démocratique du Québec (ADQ) avec la CAQ, se sont soumis. D’autres se sont ajoutés plus tard et provenaient du Réseau Liberté-Québec (2010-2013) clairement positionné au centre droit sur le plan économique, mais en harmonie avec le reste de la population québécoise sur les questions sociales.

À la base de ce regroupement, une philosophie politique qui reposait sur la liberté et la responsabilité individuelle (plutôt que sur un « gouvernemaman »), la concurrence (plutôt que les monopoles d’État), et l’équité intergénérationnelle. L’ADQ, comme le Réseau Liberté-Québec (RLQ), prônait la liberté entrepreneuriale, dénonçait l’intervention de l’État en toutes matières et avait une sensibilité toute particulière pour les PME.

Quant à cette obsession pour un amincissement de l’État, eh bien, elle se justifiait par cette notion que les individus, les familles et les entrepreneurs sont les mieux placés pour décider de leur avenir.

Qu’il n’appartient pas à des étatistes de choisir les gagnants dans une économie ouverte sur le monde. Ni de redistribuer une manne fiscale chèrement confisquée vers des fleurons mourants. Ni de subventionner des cimenteries, des Cirque du Soleil ou des Bombardier.

Cette obsession d’un État aminci n’est pas idéologique. Il y a bel et bien une relation mesurable entre la prospérité d’un État et la liberté économique qui y est exercée. Plus le fardeau fiscal est élevé, plus les lois du travail sont contraignantes, plus il y a de réglementation… plus la prospérité en souffrira. Le 17 décembre dernier, l’Institut Fraser a publié son rapport annuel mesurant la liberté économique des États de l’Amérique du Nord. Sans surprise, le Québec arrive encore bon dernier parmi les provinces canadiennes.

A-t-on vraiment besoin d’un parti conservateur, d’une voix à l’Assemblée nationale qui représenterait une solution de rechange réelle ? À mon avis, la réponse est oui. Parce que l’État déçoit, étouffe et est lui-même à bout de souffle. Et parce que la solution ne réside pas dans le dirigisme économique de François Legault.

Tous les jours, nous constatons que le véritable contrat moral entre le citoyen et le gouvernement n’est pas respecté.

En plus d’épuiser ses professionnels, la liste des « enfants pauvres » s’allonge et les services sont négligés. Qu’il s’agisse des conditions déplorables des lieux d’hébergement et des écoles, des services de protection de la jeunesse ou du soutien à la santé mentale, il semble que l’État ne peut plus fournir à la tâche et le peuple en redemande.

En 2013, j’ai écrit sur mon blogue : « Y a-t-il un espoir pour que cette droite se dote un jour d’un relais politique ? Il le faut. Mais avant, cette droite devra se défaire de certaines de ces faiblesses : son impatience, son mépris des médias, ses divisions internes, son incapacité à comprendre les contraintes du monde politique et son manque de figures d’autorité rassembleuses. »

Sept ans plus tard, nous en sommes au même point. Les partisans d’une philosophie de centre droit, d’une approche plus conservatrice en matière de gestion des finances publiques et moins interventionniste en matière économique, sont toujours orphelins.

Courage ou folie ?

Cette semaine, Éric Duhaime, que je connais bien, a annoncé son intention de briguer la chefferie du Parti conservateur du Québec (PCQ). Je le trouve courageux… et un peu fou. Parce que le pire ennemi de la droite est la droite elle-même ; en ce sens, il n’y a pas plus critique des chefs conservateurs que les conservateurs eux-mêmes.

Mais dans quelques mois, la pandémie sera chose du passé et le génie humain aura vaincu l’ennemi. Seulement voilà, les conséquences de la pandémie seront, elles, bien présentes. Et il faudra tout revoir.

Dans le concert d’unanimisme étatiste, si Éric Duhaime devient chef du PCQ, ses questions surprendront et choqueront. Mais a-t-on besoin de voix discordantes au Québec ? Absolument ! Surtout face à un gouvernement de la CAQ qui, par les temps qui courent, est allergique à la critique, allant même jusqu’à accuser ses opposants d’encourager la désobéissance civile.

Enfin, la bonne nouvelle, c’est peut-être que le terme « conservateur » ne semble plus effrayer la population comme auparavant. Avec des porte-parole crédibles tels que les Gérard Deltell et Alain Rayes, du Parti conservateur du Canada, le mouvement conservateur a grandi en respectabilité au Québec. Le défi sera de faire de même pour celui du Québec.

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