J’ai été sidérée de prendre connaissance des propos qu’a tenus la députée de Saint-Laurent, Emmanuella Lambropoulos, dans le cadre d’une séance du comité parlementaire sur les langues officielles. Sidérée parce qu’au-delà de l’ignorance dont témoignait son intervention où elle remettait en question le déclin du français au Québec* (en anglais, il faut le faire), la facilité avec laquelle elle abordait la question était empreinte d’une telle mauvaise foi.

La députée québécoise, rappelons-le, a évoqué vouloir des preuves du recul du français dans sa province en faisant des guillemets en l’air (air quotes) et en roulant des yeux. Le problème avec l’arrogance dont a fait preuve la députée, c’est qu’elle risque de miner la crédibilité du gouvernement fédéral au chapitre des langues officielles à moins que cela ne soit farouchement dénoncé par ses collègues.

J’ai le souvenir d’une occasion il y a quelques années lors de laquelle le prédécesseur de Mme Lambropoulos, Stéphane Dion, avait pris la parole sur une question liée aux langues officielles et avait déclaré « lorsqu’il est question des langues officielles, il faut toujours dénoncer les injustices ». Ça semblait être l’évidence même pour l’ancien ministre qui avait été lui-même responsable des langues officielles, mais visiblement, il reste encore beaucoup de travail à faire.

Admettre que nous assistons à un recul du français au Québec, et surtout à Montréal, ne doit pas faire l’objet d’une polémique.

J’ai la ferme conviction que ce n’est pas non plus une question où un seul parti peut se réclamer du monopole de la bonne foi. Au contraire, c’est un enjeu qui devrait aller au-delà des lignes de parti et que les élus de tous les ordres de gouvernement devraient tenter de solutionner en mettant de l’avant des propositions robustes.

Bilinguisme des sous-ministres

En ce qui concerne le fédéral, un bon début serait d’exiger le bilinguisme de ses propres sous-ministres. Récemment, dans une enfilade Twitter, Matthew Mendelsohn, l’ancien conseiller principal auprès du Bureau du Conseil privé, a exprimé tout haut ce que plusieurs francophones qui ont travaillé au sein de l’appareil fédéral ne savent que trop bien : « [Lorsque j’étais au Bureau du Conseil privé] presque toutes les notes de breffage, mémorandums au cabinet ou les présentations aux sous-ministres étaient en anglais. Si vous ne pouvez pas écrire et vous exprimer correctement en anglais, votre carrière est limitée. Si vous ne pouvez pas écrire ou vous exprimer en français, cela n’a pas d’impact sur votre carrière. »

Que la députée de Saint-Laurent tente maintenant de corriger le tir avec une déclaration laconique sur sa page Facebook, c’est la moindre des choses, mais le test de crédibilité sera de voir quelles seront ses prochaines interventions en matière de langues officielles. Ira-t-elle véritablement à la recherche de moyens pour protéger la langue française comme elle prétend vouloir le faire ? Il faut espérer que oui, mais si le passé est garant de l’avenir, une bonne dose de scepticisme est sans doute de mise.

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