En réponse au texte de la ministre Andrée Laforest, « Pour une action renouvelée de l’aménagement du territoire », publié le 30 octobre.

Dans son texte du 30 octobre, Andrée Laforest, ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, nous invite à reprendre le débat sur l’urbanisation au Québec.

« Il est grand temps », nous dit-elle, « de se doter d’une vision renouvelée, globale et cohérente en matière d’aménagement du territoire. Rappelons que la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme a 40 ans et que les orientations gouvernementales en ont 25 pour la plupart ». En d’autres mots, il est grand temps de remettre en cause les quelques acquis des lois et des orientations qui visent à gérer le développement urbain de manière plus responsable. Il est grand temps, surtout, de lever le joug du développement durable et de redonner aux municipalités la liberté nécessaire pour croître comme elles l’entendent.

La ministre Laforest justifie la modification du schéma d’aménagement et de développement de la MRC de Montcalm, qui permettra la construction de maisons individuelles sur de vastes superficies de terres agricoles et des terres non agricoles hors des périmètres d’urbanisation actuels, non comme de l’étalement urbain, mais comme du « développement régional légitime ».

Il est tout à fait légitime pour les municipalités concernées de vouloir se développer. Mais construire des centaines de maisons en périphérie de villes et de villages n’est pas du « développement régional » ; c’est de la croissance locale. Le développement régional exige une réflexion plus profonde et une planification plus complexe que celle qui a été menée.

Le message de la ministre est clair : il faut que les bien-pensants montréalais arrêtent de dire aux habitants des régions ce qu’ils doivent faire en matière de développement du territoire. La vision qui anime les zélés et les professionnels de l’urbanisme n’est pas celle qui anime la majorité des gens dans les villes et les villages où la CAQ a son assise électorale principale. Une nouvelle vision doit être « adaptée aux réalités » et doit permettre aux régions et au monde rural d’agir en fonction de leurs « ambitions légitimes ».

La ministre ne semble pas comprendre que la réalisation d’ambitions économiques, sociales, culturelles et politiques locales peut prendre des formes spatiales très diverses et que chaque forme a ses avantages et ses désavantages.

Quelles ambitions la transformation d’un boisé ou d’une terre agricole en un lotissement de maisons individuelles reflète-t-elle ?

Andrée Laforest conclut : « Il faut rassembler plutôt que diviser pour faire face aux défis de demain. Notre territoire et son potentiel de développement durable sont trop précieux pour que nous repoussions encore une fois cette concertation nécessaire. » Mais on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Soit on accepte, comme la ministre le suggère, que le Québec des grandes villes et le Québec des villes plus petites aient des visions et des destinées différentes en matière d’aménagement du territoire, que ce qui vaut dans l’île de Montréal ne vaut pas dans la MRC de Montcalm. Soit on s’entend sur la valeur du principe de développement durable, comme la ministre le prétend, et on évalue les décisions municipales et provinciales à l’aune de ce critère, quel que soit le territoire visé.

Les solutions aux problèmes des changements climatiques, des énergies fossiles polluantes, des milieux de vie qui défavorisent les jeunes et les aînés, de la perte de notre territoire agricole, etc., ne sont pas simples. Elles doivent être adaptées aux réalités locales. Tout le monde est d’accord là-dessus. Mais faire passer des décisions controversées qui ne font qu’aggraver les problèmes pour des choix réfléchis qui reflètent des ambitions de développement régional, c’est mettre la barre bien bas. Il faudra d’autres arguments pour nous convaincre que le gouvernement veut vraiment doter le Québec d’une vision de l’aménagement pour le XXIe siècle.

Lisez « Pour une action renouvelée de l’aménagement du territoire »

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