Certains observateurs aguerris de la politique américaine prévoient que la soirée du 3 novembre sera longue. Plus de 95 millions d’électeurs (plus de 65 % du vote total de 2016) auront déjà exprimé leur choix par anticipation ou par la poste.

Dans quelques États, il est possible en effet que le résultat officiel ne soit pas connu le soir même du scrutin. Dans certains cas, le suspense pourrait durer quelques jours.

Compte tenu de la confusion lors de l’élection Bush/Gore de 2000, les médias voudront se garder une « p’tite gêne » avant de déclarer un gagnant des 270 grands électeurs et plus du Collège électoral, donc de la présidence américaine.

Si Trump mène à la fin de la soirée, va-t-il s’autoproclamer vainqueur ? Si le vote est serré dans quelques États déterminants au sein du Collège électoral, allons-nous vivre une saga devant les tribunaux qui aboutira devant la Cour suprême ?

Peu importe le dénouement (sans oublier qu’il est très possible que le gagnant soit connu mardi soir), je demeure optimiste que le 20 janvier 2021, à midi, le juge en chef de la Cour suprême John Roberts assermentera le président des États-Unis pour un mandat de quatre ans.

Assisterons-nous au début du deuxième mandat du président Donald Trump ou à l’intronisation du 46e président Joe Biden ?

Biden semble avoir fait le bon pari : cette campagne s’est transformée en référendum sur la performance de Trump, et particulièrement sur sa gestion de la pandémie. Avec près de 100 000 nouveaux cas d’infection quotidiens depuis quelques jours, tout porte à croire que la COVID-19 est en effet le principal enjeu.

Trump, de son côté, nous prédit qu’il va surprendre, comme en 2016, et va remporter une majorité de grands électeurs au sein du Collège électoral. Ses nombreux rassemblements publics récemment indiquent que sa base électorale reste énergisée.

Une présidence de transition

À cause des divergences profondes quant à la vision et à la direction des États-Unis, on dit de cette élection présidentielle qu’elle compte parmi les plus marquantes de l’ère moderne. Quoi qu’il en soit, en raison de l’âge respectif des deux candidats (Trump a 74 ans et Biden a 77 ans), cette présidence en sera une de transition.

Prenons l’hypothèse d’une victoire de Donald Trump. Tel que prévu par la Constitution américaine, il en sera à son dernier mandat. Comme le système politique américain prévoit aussi des élections à date fixe, les électeurs auront à choisir de nouveau dès novembre 2022 une Chambre des représentants renouvelée, le tiers du Sénat, et des dirigeants dans certains États.

Peu après ces scrutins de mi-mandat, les Américains en seront déjà à la veille du prochain cycle présidentiel avec la saison des primaires… qui débutera dès 2023 !

Les spéculations sur la succession de Donald Trump iront alors à plein régime. Les républicains seront à la recherche de leur candidat à la présidence pour 2024.

Le choix sera-t-il en continuité avec les politiques et la « période Trump » ? Les républicains préféreront-ils revenir à la pensée plus traditionnelle de leur parti ? Trump se concentrera-t-il à assurer la pérennité de son œuvre et de sa pensée politique ?

Chez plusieurs républicains (y compris ceux au Congrès et des gouverneurs d’État) ainsi que chez des dissidents associés au Projet Lincoln, on peut s’attendre à une approche plus respectueuse, en phase avec l’héritage Reagan et Bush.

Les stratèges républicains voudront aussi favoriser les débats au sein de leur formation afin d’attirer de nouvelles clientèles. Bref, le Parti républicain des prochaines années pourrait bien devenir une formation différente de celle que nous connaissons sous Trump.

Prenons l’hypothèse d’une victoire de Joe Biden maintenant. Le nouveau président aura 78 ans au moment de son assermentation. Ce qui le mènerait à l’âge de 82 ans s’il décidait de se lancer dans un deuxième mandat.

À noter que Biden ne s’est pas engagé à se présenter pour un second mandat. Le choix de la candidate à la vice-présidence Kamala Harris fut d’ailleurs scruté dans cette optique. Il est donc plus que probable que les démocrates présentent un tout nouveau tandem en 2024.

Avec la démographie américaine en pleine évolution, on peut également s’attendre à des débats politiques passionnés du côté des démocrates afin de conquérir de nouveaux bassins d’électeurs.

Forcément, le Parti démocrate va se rajeunir. Et le poids croissant des millénaires et de la génération Z risque de le transformer davantage.

La lutte entre des centristes, tels Biden et Nancy Pelosi, et les plus progressistes, comme la représentante dans l’État de New York et adepte de Bernie Sanders, Alexandria Ocasio-Cortez, va marquer les choix de ce parti. Cela pourrait même se manifester durant l’administration Biden.

Voilà pourquoi, peu importe le choix du président (le soir du 3 novembre… ou un peu plus tard), cette élection en est une de transition. On peut d’ores et déjà prévoir une nouvelle dynamique au sein des deux grands partis à partir des élections de mi-mandat de 2022.

Bref, ceux qui croyaient avoir un répit de la politique américaine pour au moins quatre ans devront y repenser…

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