Le lendemain du discours du Trône, Michel C. Auger, sur les ondes de Radio-Canada, a posé la question suivante à ses invités politiques : « Est-ce qu’on est capable de faire une réforme de l’assurance-emploi en quelques mois seulement ? »

La question est excellente au regard de la lourdeur notoire de ce programme. La réponse, pourtant, et sans aucune hésitation, est oui. Le gouvernement fédéral vient d’en faire la brillante démonstration. Le réel enjeu sera d’en assurer la pérennité.

On ne parle pas ici, en effet, de petites mesures. Avec les changements entrés en vigueur le 27 septembre, la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées, Carla Qualtrough, et son équipe ont pris à bras-le-corps les fondamentaux de cette loi là où le bât blessait : l’admissibilité, la période et le taux de prestations accordés, le délai de carence, les rémunérations de fin d’emploi ainsi que les sanctions rattachées aux raisons de fin d’emploi jugées invalides. Pour ne donner qu’un seul exemple, on a établi un critère unique d’admissibilité fixé à 420 heures.

Les années 90 avaient laissé ce programme dans un véritable état de ruine, réduisant son accessibilité de façon draconienne tout en dégageant des dizaines de milliards de dollars de surplus détournés de leur destination. Nous avons dû vivre avec ces paramètres pendant trois décennies. Nous sommes aujourd’hui placés devant une évidence : le gouvernement vient de procéder, par simple voie réglementaire, à des changements majeurs de ce programme.

Prenant acte de ce que la crise sanitaire, doublée d’une grave crise économique, a mis à découvert, c’est-à-dire les failles importantes et la lourdeur de notre filet social, le gouvernement a ainsi introduit un nouveau cadre de protection mieux pensé, mieux adapté et plus agile.

Une réforme temporaire

Ces mesures, qui prennent les traits d’une véritable réforme, demeurent tout de même des mesures temporaires avec une date de péremption fixée au 11 septembre prochain. Peut-on imaginer, après, revenir à la case départ, c’est-à-dire avec un régime inique, déconnecté des réalités du terrain et des nécessités ?

Le discours du Trône a fixé un objectif : « Cette pandémie a montré que le Canada a besoin d’un régime d’assurance-emploi adapté au XXIe siècle, y compris pour les travailleurs autonomes et les personnes qui travaillent dans l’économie à la demande. » La barre est là.

Et c’est ce à quoi nous invitons non seulement le gouvernement, mais l’ensemble des composantes de la société civile : favoriser la mise en place d’une réforme permanente du programme d’assurance-emploi permettant d’établir une meilleure couverture, mais aussi, en quelque sorte, un nouvel équilibre.

Alarmisme à prévoir

Certains argumenteront que le gouvernement est allé trop loin, ignorant du coup que ces mesures aident des millions de nos concitoyens et soutiennent directement l’économie. Dans tous les cas, cela se discute. D’autres martèleront qu’après la PCU, c’est l’assurance-emploi qui représentera un frein à la reprise économique. On entend déjà les sirènes.

Des alarmistes nous montreront le déficit, qu’il nous faut bien sûr appréhender. Selon le rapport actuariel 2021 publié en août, celui-ci sera à la fin de 2021 de quelque 8 milliards. Ce ne sera pourtant pas la première fois que la « caisse » fera face à un déficit, puisqu’elle suit les courbes de l’économie. Ce déficit sera facilement épongé, comme par le passé, en fonction d’un taux de cotisation équilibré, voire raisonnable, et par l’apport de nouveaux revenus générés entre autres par les hausses des salaires et par l’augmentation du nombre de salariés dans la population, ainsi que la baisse prévisible des taux de chômage.

L’enjeu, pour nous, n’est pas sorcier : d’une réforme temporaire, nous devons passer à une réforme permanente assurant l’objectif de nous donner un programme d’assurance-emploi digne du XXIe siècle. Nous sommes là. Et nous travaillerons de façon imperturbable à l’atteinte de cet objectif.

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