Le célèbre chroniqueur du New York Times David Brooks a écrit en mars un texte sur l’importance pour une nation de montrer de la résilience en temps de crise. Pour illustrer son propos, il a comparé la pandémie de COVID-19 à un grand moment de la Seconde Guerre mondiale : le Blitz de 1940.

Pour Brooks, en temps de crise, il y a une course contre la montre pour maintenir un équilibre psychologique et une cohésion sociale. Une menace comme une guerre ou une pandémie apporte son lot de peur, de division et de fatalisme. Les nations survivent lorsqu’elles peuvent contrecarrer ces émotions, ces sentiments.

Le Blitz

Le Blitz est un évènement charnière de la Seconde Guerre mondiale. Les nazis, après la capitulation de la France, ont tourné leur puissante machine de guerre vers la Grande-Bretagne. Pendant des mois, les avions de combat de la Luftwaffe ont bombardé sans relâche les villes anglaises, semant la terreur et l’horreur sur leur passage.

Les militaires estimaient que plus de 200 000 Britanniques allaient périr, que les hôpitaux allaient être submergés et Londres dévastée. Le Blitz a certes été dévastateur : des milliers de personnes sont mortes, mais les pires scénarios ne se sont pas concrétisés. Les gens n’ont pas perdu la raison, la solidarité sociale n’a pas fléchi et la Grande-Bretagne n’a pas plié.

Le Blitz demeure pour David Brooks un exemple de résilience en des temps difficiles. Les nations doivent créer des conditions qui vont favoriser la solidarité sociale, l’interconnexion. Les gens doivent aussi être impliqués et sentir que leurs efforts ne sont pas faits en vain.

Le premier assaut

Dans un texte de la revue The Atlantic Monthly, le journaliste Tom McTague rapporte que la pandémie de COVID-19 a été particulièrement brutale en Grande-Bretagne.

Début mars, après avoir vu les hôpitaux du nord de l’Italie complètement submergés par des cas de COVID-19, les autorités sanitaires britanniques ont décidé de transférer rapidement les personnes âgées en attente de placement dans les centres de soins de longue durée. Ainsi, en déplaçant cette clientèle, on voulait augmenter la capacité des hôpitaux à recevoir des patients atteints de la COVID-19.

Les conséquences ont été tragiques. Les centres de soins de longue durée, longtemps délaissés au profit des missions hospitalières, n’ont pu résister aux puissants assauts de la COVID-19. La transmission dans les centres de soins de longue durée a explosé et on comptait fin juin 19 000 morts dans les centres de Grande-Bretagne.

Au Québec, les autorités sanitaires ont appliqué la même stratégie que la Grande-Bretagne en transférant de nombreux patients vers les centres de soins de longue durée.

Le mouvement de personnel, le retrait préventif de bon nombre d’employés, l’absence de direction dans de nombreux centres et le manque d’équipement de protection individuelle ont laissé plusieurs établissements complètement ouverts à une propagation rapide du virus. Les conséquences ont été désastreuses avec de nombreuses éclosions, des étages complets de personnes infectées et beaucoup trop de morts des suites de la COVID-19.

Parer la deuxième vague

La centralisation du réseau autour des CISSS et des CIUSSS a aussi été un frein pour les établissements de santé à réagir localement avec efficacité et rapidité. Les équipements de protection individuelle déjà en quantité limitée ont été mal distribués. Certaines agences ont interdit que les gens sur place se dénichent eux-mêmes de l’équipement de protection individuelle. Des directives du gouvernement ne se sont pas rendues sur le terrain ou n’ont pas été suivies. Et lorsque des bénévoles ont donné leur nom pour aller aider dans le réseau, les CISSS et CIUSSS ont tardé à répondre.

Pour s’assurer d’une plus grande responsabilité et d’une meilleure cohésion face à la menace d’une deuxième vague, le gouvernement a tout intérêt à rebâtir les directions des hôpitaux et des centres de soins de longue durée.

La décapitation des directions par l’ancien gouvernement libéral a brisé la culture organisationnelle propre à chaque établissement.

Dans son plan d’action pour affronter une deuxième vague, le gouvernement du Québec va nommer un gestionnaire responsable dans tous les établissements de soins de longue durée. Il importe de recréer une gestion locale forte et efficace, de moderniser les pratiques cliniques et de gestion et de redonner un sentiment d’appartenance essentiel au bon fonctionnement.

La résilience, que ce soit face au Blitz ou à la COVID-19, se forge lorsque les gens affrontent un danger avec réalisme et découvrent qu’ils ont les ressources pour en venir à bout ensemble. Pour David Brooks, l’histoire à raconter doit s’appuyer sur les actions que l’on prend chaque jour et la solidarité que l’on construit ensemble.

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