Alors que le gouvernement fédéral s’apprêtait à annoncer l’interdiction de certains plastiques à usage unique, le coronavirus tombe à point pour le lobby de l’industrie plastique. D’ailleurs, les tasses à café réutilisables ont été parmi les premiers articles à être sacrifiés au nom de la santé publique.

Depuis l’apparition de la COVID-19, certains cafés et restaurants refusent catégoriquement le réutilisable, voire même adoptent le jetable dans leur salle à manger. Pourtant, la vaisselle réutilisable n’a jamais été scientifiquement liée à la propagation du virus. Le stress auquel les commerces sont exposés en ce moment est inimaginable. Face à cette crise, tout le monde fait de son mieux. Néanmoins, maintenant qu’une majorité de commerces a rouvert et que nous apprenons à vivre avec la présence de ce maudit virus, il est temps de prendre du recul et ne pas céder aux légendes urbaines.

Nous avons tous été conditionnés à associer usage unique et protection. Or, le caractère stérile de l’usage unique n’est garanti qu’en milieu médical. À l’image des gants qui, mal utilisés, créent un faux sentiment de sécurité, un virus n’a que faire du caractère jetable ou réutilisable d’un objet.

Vous sentez-vous vraiment plus en sécurité de mettre vos lèvres sur un objet fabriqué à des milliers de kilomètres et rempli sans avoir été nettoyé, ou sur un objet assaini selon les standards élevés de la restauration, voire votre contenant personnel ? De plus, les scientifiques et les autorités sanitaires s’accordent sur un point : le danger, c’est la propagation par les voies respiratoires. Bien qu’il soit possible de contracter la COVID-19 en touchant une surface ou un objet où se trouve le virus, puis en portant la main à sa bouche, son nez ou ses yeux, ce n’est pas le principal mode de transmission.* Et à ce jour, aucun cas d’infection par les surfaces n’a été documenté.

Pas besoin de réinventer la roue pour faire du réutilisable sécuritaire

De nombreux cafés et restaurants continuent à accepter le réutilisable de façon sécuritaire. Cela peut être aussi simple que demander à la clientèle de poser sa tasse, ouverte, sur un comptoir de service pour y verser la boisson. Une consommation distribuée et reçue sans contact donc, qui dit mieux ? D’autres ont choisi d’opter pour des contenants consignés, retournés dans un bac prévu à cet effet afin d’être de nouveau aseptisés.

Pour la plupart des commerces et individus qui étaient profondément engagés dans la transition écologique, le retour en arrière n’est tout simplement pas envisageable, surtout quand on comprend que cette crise sanitaire est symptomatique de la crise écologique.*

En plus de ralentir le remplissage de nos rues, nos cours d’eau et nos sites d’enfouissement d’objets ayant servis à peine quelques minutes (près de 2 milliards de gobelets sont jetés chaque année au Canada), distribuer en mode réutilisable peut aussi sauver beaucoup d’argent pour les commerces. Et puis, réduire collectivement notre dépendance quotidienne à des objets en provenance de l’autre bout de la terre ne serait pas une mauvaise idée, non ? Ce n’est pas une utopie, ça se passe déjà ! Au Québec, l’OBNL La vague a mis en place le réseau de gobelets consignés La tasse. Partout dans le monde, les initiatives de ce genre se multiplient (Nulla, Vessel, MugShare, etc.) et s’imposent d’autant plus comme une voie à explorer en ces temps de pandémie.

Oui, il y avait des choses à améliorer dans la façon dont étaient gérés les sacs, tasses et autres gourdes réutilisables. Mais élargir encore le dos de la crise pour engraisser la culture du tout jetable n’est pas acceptable !

Face à la peur, face aux puissants lobbys de l’industrie pétrochimique (dont l’usage unique représente une part grandissante du chiffre d’affaires et qui alimentent les craintes sans aucune gêne), nous avons la raison, la conscience environnementale, et le savon… Servons-nous-en !

* Lisez « Dominic Champagne : si la crise se prolonge, les comportements changeront »

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