Je suis une éternelle lectrice des romans Aurélie Laflamme. C’est dans ce livre que j’ai appris ce qu’était le deuil, peut-être à un âge trop jeune pour le comprendre complètement, ainsi que les étapes par lesquelles passaient les personnes endeuillées.

Aujourd’hui, en prenant du recul face aux deux derniers mois, je réalise que j’en ai vécu un. Un gros. Pas d’une personne défunte, heureusement, mais de ma vie d’adolescente.

Le choc et le déni. La première étape. Le 13 mars, quand François Legault a dit que les écoles seraient fermées pendant deux semaines, le choc a été grand pour moi. Je revenais d’un voyage à Londres et je n’avais eu depuis qu’une semaine d’école avec mes enseignants et mes amis qui n’étaient pas présents au voyage. Est-ce que je les reverrai un jour ? Je ne le savais pas. J’ai donc vécu dans le déni de la crise, m’imaginant que j’avais un autre congé de Noël, ne réalisant pas l’impact que le coronavirus aurait sur ma vie. J’ai aussi refusé d’admettre que les écoles n’ouvriraient pas le 1er mai et, quand la nouvelle indiquant que l’école secondaire était définitivement terminée pour moi, j’ai été détruite en mille miettes.

La colère. Oui, j’ai été en beau joual vert contre tout le monde : le gouvernement, les profs, mes amis, mes parents, ma sœur, le système d’éducation, le virus, TOUT ! J’ai été fâchée après moi-même, parce que mes émotions étaient des montagnes russes que je ne pouvais contrôler et que je déversais sur les autres. Ça a duré plusieurs jours et la colère a fini par se transformer en tristesse. J’ai pleuré, je pleure toujours, d’ailleurs. J’ai pleuré mes amis, mes enseignants, mon bal, ma remise de diplôme, mon été en tant que monitrice de camp de jour. J’ai agi comme si tous ces gens et une partie de moi-même étaient décédés. Mais pleurer l’abstrait, sans avoir de tombe sur laquelle mettre des fleurs, c’est la pire chose qui soit.

Il me reste l’acceptation. Je pense que je commence à m’y faire, doucement. J’ai trouvé un emploi, les feuilles des arbres sont sorties, le temps chaud revient.

Je ne me fais plus d’illusions et je n’essaie plus de vivre dans un espoir continuel, mais je prends chaque bonne nouvelle avec un sourire. Je suis mes cours en ligne, je me tiens sur le pied d’alerte pour le camp de jour et je fais des marches avec ma meilleure amie. Oui, voir mes profs par Zoom, ce n’est pas comme dans une classe. Texter mes amis, ce n’est pas comme un dîner dans le Quartier chinois autour d’un bol de ramen. Mais au moins, je réalise peu à peu que personne ni rien dans ma vie n’est mort.

Et que la Terre recommencera bientôt à tourner.

Appel aux adolescents

On entend de plus en plus que les adolescents sont les grands oubliés de la pandémie. Êtes-vous d’accord ? Comment vivez-vous cette situation ? Et que souhaitez-vous pour la suite ? Faites parvenir votre réponse, avec votre photo, à debats@lapresse.ca.

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