Il y a maintenant 10 semaines déjà que la pandémie de COVID-19 nous cloisonne à la maison. Chaque nouvelle journée se confond avec la précédente, comme si le temps était suspendu.

Mais plutôt que de céder au découragement, voyons le côté positif de la situation : cette pause mondiale nous permet notamment de faire le point sur nos vies, de réévaluer certaines choses que l’on tenait pour acquises et de relaxer en consommant, comme jamais auparavant, des contenus culturels d’ici.

Pour chasser l’ennui, nous regardons tous une myriade de séries, d’émissions de télévision, de films et de bulletins d’information dans le confort de notre foyer. Certains d’entre nous écoutent également des balados en joggant le matin, jouent à des jeux vidéo avec leur marmaille et visitent de nombreux sites web.

Ces œuvres des créateurs de chez nous mettent du baume au cœur, car elles ravivent notre imaginaire, élargissent nos connaissances et nous permettent d’échapper à la réalité, ne serait-ce que quelques heures.

Nos médias ont aussi cette grande force de nous unir dans les moments difficiles grâce à leurs mélodies et images réconfortantes. La preuve : le samedi de la fin de semaine de la fête des Mères, plus d’un million et demi de téléspectateurs ont regardé l’émission spéciale d’En direct de l’univers à Radio-Canada. En chœur et avec cœur, plusieurs artistes ont interprété les demandes des francophones de partout au pays afin de célébrer les « femmes de nos vies ».

Le jour suivant, à TVA et Télé-Québec, plus de deux millions de téléspectateurs se sont rassemblés devant Une chance qu’on s’a, une émission riche en témoignages, chansons et émotions où quelque 80 personnalités ont souligné la solidarité et la générosité des Québécois. D’est en ouest, nos diffuseurs ont fracassé des records d’écoute avec Stronger Together, Tous ensemble, un spectacle regardé par environ 12 millions de Canadiens.

Ces événements télévisuels ont permis d’amasser plusieurs millions de dollars pour des organismes de bienfaisance, en plus de souligner le travail des intervenants de première ligne qui combattent sans relâche le coronavirus.

Autre lueur d’espoir : nos fictions continuent de voyager depuis des mois. Le réseau américain NBC vient d’acheter la série Transplant, mettant en vedette Laurence Lebœuf. La chaîne française 13e RUE a été séduite par La faille, le thriller de Club illico réalisé par Patrice Sauvé. Enfin, l’hiver dernier, C’est comme ça que je t’aime, disponible sur ICI Tou.tv Extra, a été sélectionnée à la 70e Berlinale, une première pour une série canadienne !

Du côté du septième art, l’équipe de Rouge Quantum, du réalisateur micmac montréalais Jeff Barnaby, a fait contre mauvaise fortune bon cœur.

Elle a organisé des visionnements sur les réseaux sociaux, sachant que ce drame d’horreur autochtone sur les pandémies, le colonialisme et la xénophobie ne pourrait pas prendre l’affiche prochainement.

Pour faciliter la consommation du cinéma local, une nouvelle plateforme vient tout juste de voir le jour à l’initiative du Regroupement des distributeurs indépendants de films du Québec : aimetoncinema.ca. Ce site répertorie près de 1000 films québécois, propose des bouquets de films par genre et par thème et guide les cinéphiles vers les sites de location ou les plateformes de diffusion.

D’autres initiatives virtuelles ont permis de célébrer les histoires et les créateurs d’ici. En avril, le comédien Marc-André Grondin a entraîné les internautes dans un road trip inédit. Pendant 30 jours, il a proposé une production cinématographique ou télévisuelle tournée dans un coin différent du pays, en plus de mentionner sur quelles plateformes elles se trouvent. La liste de ses suggestions figure toujours sur son fil Twitter.

Au cours des quatre prochaines semaines, Sarah-Jeanne Labrosse, le tandem Bianca Gervais-Sébastien Diaz, Jean-Sébastien Girard et Debbie Lynch-White animeront tour à tour un jeu-questionnaire sur notre cinéma et notre télévision sur la page Facebook de la campagne NOUS | MADE. De 19 h 30 à 20 h 30, ils testeront en direct les connaissances des participants, tout en dépoussiérant des classiques oubliés.

Des créateurs à l’arrêt

Même si ces projets sont hauts en couleur, la réalité, elle, n’est pas forcément rose dans le milieu du divertissement présentement. En tant que femmes à la tête du Fonds des médias du Canada, de Téléfilm Canada et de CBC/Radio-Canada, principaux organismes de financement et de promotion du contenu audiovisuel original canadien, nous sommes tristement conscientes que la majorité de nos talentueux créateurs ne pourront pas reprendre le travail de sitôt.

L’arrêt soudain des productions a porté un dur coup à notre industrie. Comme d’autres secteurs lourdement frappés par la pandémie, le nôtre aura besoin d’une aide d’urgence et de diverses initiatives pour assurer son rebond.

Une première enveloppe a été annoncée par le premier ministre et le ministre du Patrimoine canadien. Elle se chiffre à 88,8 millions de dollars pour le Fonds des médias du Canada et à 27 millions pour Téléfilm Canada. Ces sommes permettront à des entreprises culturelles d’éviter la faillite et à des travailleurs de conserver leur emploi.

Une chose est sûre : nous ne laisserons pas ce virus freiner notre momentum.

Des décennies d’investissement dans les contenus d’ici rapportent gros. Aujourd’hui, notre industrie est une force économique majeure à l’origine de 180 000 emplois. En 2018-2019, elle a contribué à hauteur de 12,8 milliards de dollars au PIB canadien. Les enjeux ne sont pas que culturels, ils sont économiques. Ce n’est pas le moment de laisser tomber nos créateurs et nos producteurs.

Plus que jamais, il faut braquer les projecteurs sur l’une de nos plus grandes réalisations collectives : la création d’une industrie du cinéma et de la télévision à notre image, diversifiée et reconnue à l’échelle mondiale.

Gardons espoir et regardons vers l’avant ; vers le jour où nous pourrons dire à nouveau : « Lumière, moteur, action !  » et « À l’affiche dans un cinéma près de chez vous ».

> Visitez le site aimetoncinema.ca

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