La réponse du Québec à la crise de la COVID-19 a été, jusqu’ici, exemplaire. Le gouvernement l’a menée avec vigueur et doigté ; le secteur privé a rapidement accepté les règles du jeu et agit dans l’intérêt public ; et la population a largement suivi avec lucidité et solidarité. Bref, c’est le Québec entier qui a pris la mesure de la crise et qui agit en conséquence.

Avant l’arrivée de la COVID-19, le Québec se préparait – à l’instar du reste du monde – à faire face à une autre crise, celle du climat. Le nouveau plan d’économie verte du gouvernement devait rendre notre économie plus efficace et plus sobre en carbone. Ce plan a été mis de côté le temps de notre action collective contre le virus, mais une version adaptée pourrait maintenant servir de pierre angulaire à la relance économique post-COVID.

Car pour le Québec – et plus encore que pour la majorité des États du monde –, la crise du climat offre également des occasions économiques à saisir.

– Rapatrier nos capitaux. Bon an mal an, les Québécois envoient de 5 à 10 milliards de dollars aux États-Unis et en Alberta pour financer leurs activités de production d’énergies fossiles (et les emplois et émissions de GES qui vont avec). Ces paiements, en échange desquels nous importons du pétrole et du gaz pour propulser nos véhicules, chauffer nos bâtiments et alimenter nos industries, représentent la majeure partie de notre déficit commercial. Si nous étions largement impuissants devant cette situation auparavant, la technologie – pensons aux véhicules électriques, par exemple – nous permet maintenant de remplacer ces importations par l’énergie verte produite au Québec.

– Bâtir une économie plus efficace. Soyons clairs : aucune entreprise n’est réellement avantagée par le gaspillage de l’énergie, les ménages non plus d’ailleurs. Or, les règles du jeu au Québec permettent encore beaucoup plus de gaspillage que chez plusieurs de nos concurrents. Que nous dépensions autant de notre richesse, en 2020, pour chauffer l’extérieur grâce à des bâtiments mal isolés, des procédés industriels en « patchage » constant et des véhicules aussi énergivores qu’il y a 20 ans a de quoi choquer la conscience. Nous avons pourtant tout ce qu’il faut, en technologie et en ingéniosité, pour faire beaucoup mieux, mais il nous reste encore à mettre en place les règles du jeu collectives qui nous permettront de réaliser ce potentiel.

Un Panier bleu amplifié

D’après une étude réalisée par ma firme l’an dernier pour le gouvernement du Québec, ce double chantier – améliorer substantiellement l’efficacité énergétique et remplacer les importations d’énergies fossiles par la production d’énergies renouvelables ici – permettrait au Québec de sabrer son déficit commercial tout en atteignant ses cibles de réduction de gaz à effet de serre.

À l’ère de la COVID-19, c’est l’activité économique que ces deux chantiers généreraient à relativement court terme – dans la rénovation des bâtiments, l’installation d’infrastructures de recharge de véhicules, la fabrication de camions et autobus électriques et la construction d’usines de biométhanisation, pour ne nommer que quatre exemples – qui devrait attirer notre attention.

À plus long terme, c’est quelque 5 milliards de dollars – ou plus de 1000 $ par ménage par année – que le Québec pourrait rapatrier pour financer nos emplois et propulser notre économie.

Qui plus est, investir aujourd’hui dans ces chantiers favoriserait le positionnement stratégique de l’économie québécoise face aux besoins mondiaux de la décarbonisation, évalués à plus de 10 000 milliards de dollars annuellement.

Au moment où le Québec commence à envisager l’après-COVID-19, saisissons l’occasion pour faire d’une pierre quatre coups : remettre le Québec en marche, réduire structurellement notre balance commerciale, nous positionner pour l’économie « verte » de l’avenir et respecter nos engagements internationaux en matière de lutte contre les changements climatiques. Le Québec, plus que d’autres en raison de son économie et de sa géographie, a tout ce qu’il faut pour réussir.

* Philippe Dunsky a été président du Groupe de travail sur l’électrification du gouvernement du Québec et copréside l’organisme Efficacité énergétique Canada.

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