En réponse à la chronique de Stéphanie Grammond, « Vos pilules coûteront encore trop cher », publiée le 1er février

Chère Madame Grammond, après lecture de votre article « Vos pilules coûteront encore trop cher », j’ai ressenti le besoin de répondre. Le sujet est sensible et je vais vous donner une réponse sincère et directe.

Depuis deux ans, les pharmacies sont probablement les seules entreprises privées à devoir divulguer les coûtants des produits vendus.

Vous vous désolez que les patients n’aient pas opté pour des pharmacies postales aux honoraires « compressés » à la suite de la facture détaillée. Je me surprends que vous n’en ayez pas tiré les conclusions évidentes.

Allez-vous systématiquement chez le salon de coiffure le moins cher de la ville ?

Allez-vous chez le massothérapeute ou l’ostéopathe le plus économique ? Ou choisissez-vous un certain niveau de service et de qualité ?

Nos patients voient la valeur ajoutée des bons soins de leurs pharmaciens de quartier. Ils comprennent que ça coûte moins cher de livrer des médicaments « rentables » que de préparer les médicaments, faire un suivi et recevoir les patients pour les conseiller (souvent sans frais).

Ils veulent garder une porte ouverte pour les aider dans un système de santé sursaturé où les portes sont trop souvent fermées. Ils savent que notre valeur ne se limite pas à compter les pilules mais à effectuer tout le suivi et le coaching qui vont souvent avec…

Du surplace depuis 20 ans

Vous comparez les prix au privé et au public. Soit. Avez-vous seulement envisagé que c’était la RAMQ qui nous sous-payait ? Ça fait 20 ans que nos honoraires font quasiment du surplace. Ah non, j’oubliais : cette année nous avons eu droit à un généreux 1 % d’augmentation qui ne couvre même pas l’inflation.

Prenons un exemple concret. Un médicament à 2000 $ que nous devons réfrigérer. Pensez-vous sérieusement que 9 $ d’honoraires suffisent à couvrir nos coûts ? La préparation par la technicienne, le conseil par le pharmacien, le suivi effectué, le risque relié à l’entreposage, les coûts d’exploitation et parfois même la livraison chez le patient ? ! Non, madame, cela ne couvre pas nos frais !

Vous avez raison, par contre, de vous préoccuper du coût des soins. Comme vous, je m’en préoccupe et j’aimerais que nous en parlions davantage.

Parlons du coût des médicaments produits par les grandes entreprises pharmaceutiques. C’est le coût des médicaments qui augmente de façon importante, pas les honoraires des pharmaciens de quartier ! C’est le chiffre dans ma petite colonne « cost » qui augmente. Des médicaments à plusieurs milliers, voire des dizaines de milliers de dollars sont de plus en plus courants et je me demande quels sont les mécanismes de contrôle de cela. Pourquoi personne ne parle de transparence dans la facture des fabricants ?

Le coût des assurances

Parlons maintenant du coût des assurances. Une industrie qui fait d’énormes revenus sur la couverture des soins sans être nécessaire aux soins puisqu’elle ne soigne personne… Pourquoi personne ne parle de transparence dans la facture des assurances ?

Pourquoi attaque-t-on ad nauseam ma belle profession, celle du professionnel de la santé le plus accessible du réseau de la santé ? Le seul que vous pouvez souvent consulter sans payer le moindre dollar. Celui qui sert de triage tous les jours. Celui qui prépare les médicaments, en effectue le suivi et alerte le médecin quand c’est nécessaire. Le professionnel de la santé disponible au jour le jour et qui doit parfois mettre un chapeau de travailleur social et qui doit d’autres fois aider des soins à domicile sursaturés.

Pensez-vous sérieusement que ce sont les quelques dizaines de dollars d’honoraires du pharmacien de quartier qui sont le problème ? !

N’est-ce pas plutôt une grande diversion sur les véritables coûts par des corporations milliardaires sur lesquelles nous n’avons aucun contrôle ?

Vous ne comprenez peut-être pas, madame, ma profession et le rôle essentiel que nous jouons dans la première ligne. Les patients, ceux qui ont goûté au système de santé, comprennent bien les enjeux.

Ironiquement, en bas de votre article il est écrit que le journalisme de qualité a un prix. Sachez, madame, que la pharmacie de qualité aussi !

Réponse de Stéphanie Grammond

Je suis parfaitement consciente de l’importance du travail des pharmaciens qui jouent un rôle clé dans notre système de santé. Mais à mon avis, il est injuste que les assurés du privé paient leurs médicaments 19 % plus cher que ceux de la RAMQ. Au comptoir de la pharmacie, la différence n’est peut-être que de quelques dizaines de dollars, mais à la fin de l’année, l’écart atteint un demi-milliard à la grandeur du Québec. Il est donc souhaitable que les assurés du privé portent une plus grande attention aux prix payés pour leurs médicaments. Mais bien sûr, la qualité du service doit aussi peser dans la balance lorsque vient le temps de choisir un pharmacien.

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