Plusieurs mesures législatives furent adoptées au Canada dans le but évident d’affaiblir les Acadiens et les Franco-Canadiens.

Un regard sur l’histoire

Ainsi, en 1864, trois ans avant la fondation du Canada, la Nouvelle-Écosse a voté l’Education Act, qui interdisait l’enseignement en français. En 1871, c’était au tour du Nouveau-Brunswick de voter le Commission School Act qui s’attaquait aux droits des Acadiens, provoquant une émeute à Caraquet.

En 1873, l’Île-du-Prince Édouard a adopté l’Official Language Act, qui abolissait les écoles françaises. Le Manitoba a voté l’Official Language Act en 1890, faisant de l’anglais la seule langue d’enseignement. Pour la Saskatchewan, ce fut le School Act en 1909 qui ne permettait qu’un peu de français dans les écoles, avant son abolition en 1929. L’Alberta a interdit l’enseignement du français en 1905. Les Territoires du Nord-Ouest interdirent les écoles françaises par deux lois en 1890 et en 1892. L’Ontario, à son tour, a mis en place le règlement 17, qui interdisait le français après la deuxième année du primaire.

Tout récemment, en 2015, la Cour suprême a donné raison à l’Alberta qui refusait de traduire ses lois en français.

L’assimilation progresse à un rythme effarant

Les francophones représentaient 30 % de la population canadienne en 1951 et n’en représentent plus que 20 % aujourd’hui.

Les taux d’assimilation sont de 44,7 % en Ontario, 57 % au Manitoba, 75,4 % en Saskatchewan, 70,7 % en Alberta, 74,1 % en Colombie-Britannique, 11,9 % au Nouveau-Brunswick, 53,8 % à l’Île-du-Prince-Édouard, 50,3 % en Nouvelle-Écosse et 68,4 % à Terre-Neuve.

Le fait que le Nouveau-Brunswick soit devenu bilingue en 1969 n’a pas changé la situation, pas plus que l’adoption de la Loi sur les langues officielles la même année. On peut d’ailleurs se demander si les deux langues officielles ne sont pas l’anglais et la traduction simultanée !

Précisons également que c’est au Québec qu’il y a le plus de personnes bilingues et qu’au Canada, 46,2 % des francophones sont bilingues alors que seulement 9,2 % des anglophones le sont.

Pour qui voter ?

Historiquement, les Acadiens et les Franco-Canadiens ont appuyé les libéraux. Ils se rappellent que les conservateurs, sauf sous Mulroney et Stanfield, les ont négligés et dans bien des cas méprisés. Ne pensons qu’à l’actuel premier ministre ontarien, Doug Ford.

Le NPD n’a jamais été au pouvoir, mais faut-il rappeler que Rachel Notley était la première ministre quand la Cour suprême a donné raison à l’Alberta, qui refusait de traduire ses lois en français, et qu’elle n’est pas intervenue pour changer la situation ?

Ne reste donc que le Parti libéral du Canada, mais encore là, nous devons nous souvenir que les textes de la Constitution canadienne ne sont pas encore tous traduits 37 ans après son rapatriement. Rappelons aussi que tout récemment, Justin Trudeau a insulté les Acadiens en nommant Brenda Murphy, unilingue anglophone, lieutenante-gouverneure du Nouveau-Brunswick.

C’est donc sans grand enthousiasme que les Acadiens et les Franco-Canadiens accorderont leur confiance à l’un de ces partis.

Le Bloc offre sa collaboration

Le Bloc québécois ne présente aucun candidat à l’extérieur du Québec, car cela serait pour le moins contradictoire. Cela ne l’a pas empêché toutefois de défendre leurs intérêts à la Chambre des communes, comme l’a reconnu à quelques occasions la Fédération des communautés francophone et acadienne du Canada. Yves-François Blanchet s’est d’ailleurs rendu en Ontario au cours de la campagne pour appuyer les revendications des Acadiens et des Franco-Canadiens.

Souvenons-nous que René Lévesque avait proposé aux provinces canadiennes une politique de réciprocité qui aurait eu pour effet d’accorder les mêmes droits et services aux francophones hors Québec que ceux auxquels avaient droit les Anglo-Québécois. Lévesque avait essuyé un refus total !

Cela aurait été un avancement majeur, car comme l’a indiqué le Conseil de l’Europe dans une résolution adoptée le 10 avril 1997, « la situation de la minorité anglophone du Québec est un excellent exemple de la protection des droits d’une minorité nationale ».

Et si le Québec devenait indépendant ?

Certains disent que si le Québec devenait un pays, les Québécois abandonneraient leurs frères et sœurs acadiens et franco-canadiens et que, conséquemment, ceux-ci perdraient tous leurs droits. Cet argument est fallacieux et insoutenable.

Imaginons un seul instant qu’un souverainiste affirme que le jour où le Québec deviendra un pays, les Anglo-Québécois perdront tous leurs droits. On crierait au nettoyage ethnique, sinon au racisme… avec raison.

Or, dire que les Acadiens et les Franco-Canadiens perdraient tous leurs droits si le Québec quittait le Canada revient au même raisonnement inacceptable.

Les Anglo-Québécois conserveront tous leurs droits dans un Québec souverain, parce qu’ils ont aussi bâti le Québec. Les Acadiens et les Franco-Canadiens devraient avoir les mêmes droits que les Anglo-Québécois non pas parce que le Québec fait partie du Canada, mais bien parce qu’ils ont construit l’Acadie et le Canada. Il est plus que temps que certains cessent de les prendre en otage pour s’opposer à la souveraineté du Québec.

Comme Québécois, nous devons respecter les choix qu’ils feront lors des élections et en tout temps rester solidaires.

* Chef du Bloc québécois de 1997 à 2011, Gilles Duceppe a été député fédéral pendant 21 ans.

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