Dans le deuxième épisode de l’excellente série Tchernobyl, qui a connu un succès retentissant au printemps dernier, un scientifique explique devant un comité de cadres du Parti communiste soviétique que le réacteur de la centrale nucléaire de Tchernobyl a explosé et qu’il faut immédiatement mettre en place des mesures d’urgence. La réponse du cadre soviétique est lapidaire : « Il n’y a pas de place pour cette hystérie alarmiste. » Ce à quoi le scientifique réplique : « Ce n’est pas de l’alarmisme, c’est un fait. »

Cette scène est une formidable métaphore du nouveau déni climatique qui sévit présentement et qui qualifie d’alarmiste l’urgence climatique dans le but de protéger un système qui doit changer.

Pour reprendre l’analogie nucléaire, chaque jour, nous déchargeons dans l’atmosphère 110 millions de tonnes de pollution générée par les activités humaines.

Ces gaz à effet de serre absorbent l’équivalent de l’énergie produite par 500 000 bombes atomiques par jour.

Chaque jour, 365 jours par année, nous bombardons notre planète, et ce chiffre continue d’augmenter. Dans le scénario actuel d’accroissement des émissions, les concentrations de CO2 dans l’atmosphère dépasseront d’ici 10 ans le seuil qui nous poussera dans la zone de dérèglement climatique. Il ne s’agit pas ici d’opinions, mais de mathématiques.

Pour éviter ce scénario, le GIEC nous accorde une décennie pour réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre de la planète entière. Chaque jour qui passe sans agir rend cet objectif improbable, voire impossible à atteindre. L’urgence est réelle, la planète brûle. Nier l’urgence climatique, c’est nier la science du climat elle-même.

Comment en sommes-nous arrivés à n’avoir que 10 ans pour résoudre un problème dont nous connaissons l’existence depuis 50 ans ? Le déni climatique, alimenté par des campagnes sophistiquées financées par centaines de millions par le lobby des énergies fossiles, est premier au banc des accusés. Son objectif ? Retarder une action décisive sur le climat. D’abord en semant le doute sur l’existence de la crise climatique ou sur ses liens avec les activités humaines, puis en attaquant la crédibilité de la science du climat et des scientifiques qui la portent.

Le piratage informatique, les fausses nouvelles et la création de faux groupes citoyens ont fait partie de l’arsenal déployé contre les scientifiques et les écologistes.

La campagne du déni climatique porte aujourd’hui un message différent : elle a fait un repli tactique en concédant que le changement climatique est réel et qu’il est causé par l’action humaine, mais elle affirme désormais que la transition prendra du temps, qu’elle se fera naturellement et graduellement. On oppose cette position « pragmatique » à la position « alarmiste » de la science et des écologistes.

Cible privilégiée

Greta Thunberg, une courageuse jeune femme de 16 ans, est devenue la cible privilégiée de cette attaque concertée. Après avoir semé le doute dans l’esprit du public, on cherche maintenant à endormir les citoyens et à détruire le message d’urgence en attaquant ses messagers.

Nouveau discours, donc, mais même résultat : gagner du temps. Or, du temps, nous n’en avons plus.

Le nouveau déni climatique procède de la même dynamique qui a mené à l’effondrement des marchés financiers en 2008. Chaque jour, chaque semaine, chaque mois et chaque année passés dans le déni rapportent des milliards à des intérêts bien organisés qui jouent notre avenir à la roulette russe, trop heureux de pouvoir refiler la facture à nos enfants.

Mais cette fois-ci, ils échoueront. Nous sommes trop nombreux, de toutes les générations, derrière la jeunesse qui se soulève, à comprendre que chaque jour qui passe est un jour perdu qui nous rapproche du précipice. Le mensonge a assez duré. Faisons tomber le mur du déni et éclater la vérité. Occupons tous les fronts. Il y a urgence. Ne laissons plus le déni climatique nous arrêter. C’est maintenant ou jamais.

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