L’accord de Paris sur le climat a été ratifié en avril 2016 en réponse à la crise créée par le réchauffement de l’atmosphère. C’est l’aspect universel de cette crise qui a conduit à un accord international. La pollution engendrée par les gaz à effet de serre (GES) ne connaît en effet aucune frontière. Aucun continent, aucun pays, aucun endroit n’est épargné. Pas moins de 195 pays ont signé l’accord, ce qui en fait l’accord le plus largement ratifié dans l’histoire de l’humanité.

Son objectif est de limiter l’augmentation des températures à 1,5 °C. Ce qui exige une réduction de 30 % des GES d’ici 2030. Un objectif ambitieux qui exige des changements profonds, mais un objectif atteignable. Et qui urge. Les événements causés par le réchauffement de l’atmosphère sont de plus en plus fréquents et intenses : canicules hâtives et meurtrières, érosions, inondations, sécheresses, bouleversement de la biodiversité, pour ne nommer que ceux-là.

En se présentant comme le leader de la protection de l’environnement, le Canada avait joué un rôle marquant dans les pourparlers conduisant à l’accord de Paris. Justin Trudeau avait proclamé à la face du monde entier que le Canada était de retour. L’espoir était permis.

Le Canada semblait en voie de vouloir changer le cours des choses. Tout comme il l’avait fait en 1956 lors de l’invasion du canal de Suez par Israël, la France et la Grande-Bretagne. On se souvient qu’il avait convaincu les Nations unies de stopper les agresseurs et d’envoyer une force pour le rétablissement et le maintien de la paix. Ce fut le début des Casques bleus qui depuis ont joué un rôle inestimable. Ce qui valut au premier ministre Pearson le prix Nobel de la paix.

PHOTO DARRYL DYCK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Manifestation contre le pipeline Trans Mountain, à Vancouver, en 2018

Compte tenu de sa solide économie et de ses ressources naturelles abondantes, notamment son potentiel hydro-électrique, le Canada se doit de donner l’exemple. Si un pays comme le nôtre ne le fait pas, pourquoi les pays moins fortunés devraient-ils s’engager dans la réduction des (GES) alors qu’exception faite de la Chine, ils ne sont pas les responsables de la situation.

Malheureusement, le Canada ne s’est pas engagé dans la voie tracée par l’accord de Paris malgré l’importance de la question et l’urgence d’agir.

Comme nous avons pu le constater au cours des derniers mois, Justin Trudeau est incapable de trancher et de prendre une décision difficile. Au lieu de mettre à sa place la ministre Wilson-Raybould qui n’acceptait pas son leadership, il a tergiversé pendant des mois. Son indécision a causé un tort injustifié à SNC-Lavalin, ce fleuron de l’économie québécoise, et à la réputation des entreprises québécoises. Il est vu comme un premier ministre qui ne fait pas le poids aussi bien au Canada que sur la scène internationale.

Sous la pression exercée par le gouvernement de l’Alberta et par l’industrie pétrolière, Justin Trudeau s’est engagé à la fois dans la réduction des GES et dans la production accélérée et hautement polluante du pétrole issu des sables bitumineux. Son gouvernement s’est même porté acquéreur au coût de 4,5 milliards de l’oléoduc Trans Mountain et, à la suite de l’élection des conservateurs de Jason Kenney, il s’est engagé à tripler la capacité de l’oléoduc au coût faramineux de 9,3 milliards.

PHOTO JASON FRANSON, LA PRESSE CANADIENNE

Justin Trudeau rencontre des employés de Kinder Morgan, propriétaire de l’oléoduc Trans Mountain, à Edmonton, en Alberta, en 2018.

Pour justifier sa décision de tripler la production et l’exportation de pétrole, Justin Trudeau a développé une thèse pour le moins tordue et pleine de sophismes. Il affirme sans broncher que le but du projet n’est pas d’augmenter notre production de pétrole, mais d’élargir nos options. Selon lui, le Canada sera ainsi moins dépendant des États-Unis et aura accès au marché asiatique en plein essor. Comme par enchantement, le fait d’ajouter à l’utilisation globale du pétrole et à l’augmentation des GES n’est plus un facteur. Il prétend qu’il est possible de combattre le réchauffement de l’atmosphère de la planète tout en utilisant plus de pétrole.

Le premier ministre vert de la Colombie-Britannique aurait affirmé que la position de Justin Trudeau est aussi logique que de tenter d’éteindre un feu avec un lance-flamme. Nous sommes loin du chevalier vert de l’accord de Paris. L’occasion que Trudeau avait de changer le cours des choses est passée. La réputation du Canada en matière de protection de l’environnement est nulle. Il est difficile d’être vert tout en engloutissant des milliards dans le pétrole.

Le leurre conservateur

Il faut aussi constater que les conservateurs sont farouchement opposés à la taxe sur le carbone introduite par le gouvernement Trudeau. Cette taxe aurait pu permettre au Canada d’atteindre les objectifs établis par l’accord de Paris. Les premiers ministres Kenney de l’Alberta et Ford de l’Ontario refusent de l’appliquer et le chef du Parti conservateur du Canada, Andrew Scheer, s’engage à l’éliminer si son parti prend le pouvoir en octobre prochain.

En définitive, les conservateurs sont déterminés à tripler l’oléoduc Trans Mountain s’ils sont élus. Le programme de protection de l’environnement qu’ils proposent, misant sur d’hypothétiques progrès technologiques, ne sert qu’à leurrer la population.

La question du climat et des GES va sûrement être chaudement débattue d’ici octobre.

Pour ceux qui, avec raison, placent la question en tête de leurs priorités, ni les libéraux ni les conservateurs ne constituent une option.

Ce qui soulève l’option du Parti vert du Canada dont les appuis augmentent graduellement sauf sur la scène politique québécoise. Toutefois, rien ne permet de supposer que ce parti puisse changer significativement les grandes tendances en octobre prochain.

En définitive, il faut conclure que le Canada va rater les cibles fixées par l’accord de Paris. Pire encore, sa part trop élevée des GES à l’échelle mondiale va continuer d’augmenter. De plus, les jours de la taxe sur le carbone, introduite à l’origine par le Québec, semblent bien comptés. Pour le gouvernement Trudeau qui a un bilan plutôt maigre, sauf pour l’inquiétante introduction du cannabis, son échec sur le réchauffement climatique est majeur.

Au Québec, tout indique que les électeurs québécois vont se retrouver en octobre devant des choix difficiles. Mais, face à ce genre de situation dans le passé, ils ont toujours fait preuve d’une grande sagesse collective.

Des initiatives encourageantes fusent de toute part. Citoyens, chercheurs, entreprises, municipalités petites et grandes changent leurs habitudes et progressent dans leurs efforts de réduction des GES. Ce sont eux qui en définitive forceront les gouvernements à prendre les grandes décisions nécessaires.

Il ne faut jamais perdre espoir.

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