Si vous avez déjà écouté la populaire série Mad Men, vous vous souviendrez que tout le monde y fumait. Tout le monde. Partout. Cette superbe série nous permet de voyager dans le temps et de voir à quoi ressemblait l’industrie publicitaire aux États-Unis au début des années 60, où le tabac faisait partie intégrante de la vie quotidienne.

Aujourd’hui, fumer n’est plus la norme. Si vous êtes comme moi, vous vous êtes sûrement dit : « Pourquoi se tuent-ils ainsi à petit feu ? »

C’est au milieu des années 60 que le lien entre la cigarette et le cancer a été confirmé. Graduellement, les mentalités ont changé. Nous avons peu à peu réussi à modifier les perceptions, les lois et nos attitudes à l’égard du tabagisme. Les taxes sur le tabac sont apparues, les publicités ont été interdites, le tabagisme a été banni des milieux de travail et des lieux publics, puis les emballages ont été normalisés et couverts de mises en garde explicites, et les produits ont été dissimulés, dans les magasins. Nos gouvernements ont agi et provoqué des changements dans les habitudes de consommation des fumeurs.

Bien qu’il reste encore du travail à faire, des résultats remarquables ont été obtenus. Le pourcentage de fumeurs a chuté et, parallèlement, les coûts reliés au traitement des problèmes de santé causés par le tabac ont été réduits de moitié. Collectivement, nous avons dénormalisé le tabagisme, diminué son impact sur notre système de santé, et sauvé des vies.

Aujourd’hui, les maladies liées au régime alimentaire surpassent pratiquement celles liées au tabac comme première cause de mortalité au pays.

Nous faisons maintenant face à une nouvelle préoccupation : nos habitudes alimentaires, particulièrement celles de nos enfants. L’obésité infantile a d’ailleurs triplé depuis les années 80.

Les enfants pris pour cible

Plusieurs raisons expliquent ce problème. La consommation de boissons sucrées et d’aliments transformés à forte teneur en sucre, en gras saturés et en sel est devenue la norme pour nos enfants, tout comme l’était le tabagisme il y a plusieurs décennies, quand il était encouragé par de nombreuses publicités faisant la promotion de produits accessibles et abordables.

Nous en voyons les effets tous les jours dans les hôpitaux pour enfants. Il y a quelques années, lors de sa fête de départ à la retraite, une infirmière de notre clinique du diabète a mentionné qu’au milieu des années 70, tous les patients enfants avaient un diabète de type 1 (de cause génétique). Maintenant, ce n’est plus le cas. Un nombre croissant d’enfants ont plutôt un diabète de type 2 causé par leur alimentation, et auront possiblement des problèmes de santé. Pour la première fois, la nouvelle génération risque de ne pas vivre aussi longtemps que les parents.

Nombreux sont ceux qui sont conscients du lien entre l’obésité et les maladies chroniques, telles que le diabète et les maladies cardiovasculaires. En mai, la Société canadienne du cancer a annoncé que le surpoids pourrait devenir la deuxième cause évitable de cancer, tout juste derrière les effets continus du tabagisme.

Que pouvons-nous faire pour régler ce grave problème ?

Plus de 90 % des aliments et boissons que les enfants voient à la télévision et en ligne ont une forte teneur en sucre, en sel et en gras saturés.

Nous devons arrêter ce bombardement de messages faisant la promotion en ligne ou ailleurs de ces produits auprès des enfants.

C’est pourquoi le gouvernement fédéral a pris la sage décision de restreindre les publicités d’aliments et de boissons ciblant les enfants, une solution mise en place au Québec il y a presque 40 ans.

Ce projet de loi S-228 a été proposé au Sénat il y a presque trois ans grâce à la sénatrice conservatrice Nancy Greene Raine, en réponse au rapport L’obésité au Canada. En septembre dernier, le projet de loi a été adopté par les députés élus, puis retourné au Sénat pour ce qui n’aurait dû être qu’une approbation de routine avant sa mise en application.

Le temps presse ! S’il n’est pas approuvé dans les prochains jours, cet indispensable projet de loi va mourir au feuilleton lorsque le Parlement ajournera la session pour l’été et les élections de cet automne. C’est inacceptable.

En 2013, j’ai présidé un comité d’experts en obésité infantile de l’Ontario qui a recommandé ce changement. De nombreux rapports ont réitéré cette recommandation au fil des ans.

Nos enfants ont attendu assez longtemps. Il faut agir au bénéfice des générations futures.

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