La mort de cette fillette de Granby est un événement atroce et malheureux qui monopolise l’attention du Québec tout entier.

La maltraitance des enfants demeure toujours l’événement qui sensibilise le plus la majorité, et pour cause. Cependant, les conséquences de la maltraitance ne sont pas toujours aussi extrêmes et dramatiques. Elles sont souvent beaucoup plus subtiles que l’on croit.

La personne qui a vécu des stress importants dans l’enfance va souvent placer ces vécus dans sa mémoire inconsciente.

En fait, la grande majorité de nos blessures d’enfance nous habitent sans que nous en soyons totalement conscients.

Et cela est normal, car enfants, nous n’étions pas « équipés » pour comprendre exactement ce qui nous arrivait. 

Toutefois, ce n’est pas parce que le rappel conscient de l’événement stressant est impossible que l’événement ne touche plus l’enfant. Au contraire, plus nous avons enfoui nos traumatismes, plus ces traumatismes nous habitent. C’est-à-dire qu’ils génèrent une charge affective qui frappe notre système nerveux, notre corps, nos pensées, nos comportements et nos motivations.

Des adultes plus fragiles

Plus un individu s’est construit dans un contexte de vie difficile, plus il gardera en lui des conflits internes. Et garder en soi plusieurs conflits fragilise notre identité et diminue notre capacité d’adaptation.

En plus de manifester un certain niveau de blocage émotif, les adultes qui ont vécu des stress importants sont généralement plus instables au point de vue de leurs comportements et de leurs pensées, car ils deviennent hypersensibles, se sentent facilement agressés et intimidés par les événements qui rappellent leur enfance.

Le couple et les enfants

La relation conjugale est un contexte important qui met en lumière ce phénomène de réactivation des souffrances du passé. En fait, presque tous les conflits de couple ont très peu à voir avec ce que l’autre a dit ou fait, mais plutôt avec ce que la parole ou le comportement de l’autre réactive en tant que conflit non résolu dans l’enfance. À titre d’exemples, l’attitude détachée du conjoint rappelant celle du père ou les attaques verbales de la conjointe réactivant le sentiment de rejet profondément ressenti envers la mère alors que nous étions petits.

Et que dire des premières expériences parentales ? Plusieurs jeunes adultes rêvent d’adopter ce rôle, mais dans les faits, la majorité sont aux prises avec la réalité de ne pas avoir tous les outils pour y faire face. L’enfant demande une attention inconditionnelle que les parents blessés ne peuvent fournir. 

Toutefois, plusieurs parents aux prises avec leurs réelles limites deviennent motivés à faire des ajustements, à modifier leurs traits de personnalité pour le mieux-être de leur enfant.

En ce sens, l’arrivée des enfants est une épreuve difficile pour les couples, mais du même coup représente souvent un tremplin pour le mieux-être du parent.

S’ouvrir à soi

Nos souffrances du passé conditionnent donc constamment la façon dont nous réagissons envers nous-mêmes et les autres. Ce passé comportant un ensemble de vécu marquant qui réorganise et oriente notre quotidien, souvent pour le mieux lorsque nous prenons conscience de notre passé et nous nous en libérons. Et parfois pour le pire, comme ce couple de Granby responsable de la mort de leur enfant qui n’y a rien compris.

Pour arriver à un mieux-être, il est donc nécessaire de s’ouvrir à soi et de ressentir.

Démystifier ce que je suis, ouvrir notre pleine conscience à nos émotions et nos vécus difficiles, cesser d’éviter ce que nous sommes vraiment et accepter notre vulnérabilité, notre fragilité. Cette grande fragilité qui, sans cesse, se réactive devant un événement dramatique comme celui de la fillette de Granby.

Pour grandir, il faut accepter l’enfant en nous, le ressentir émotivement, s’émouvoir et être compatissant face à ce petit être vulnérable et dépendant qui a besoin de l’autre pour l’accompagner, cet autre qui était jadis absent.

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