Vous rappelez-vous cette jeune écolière qui avait entamé une grève pour le climat et venait s’asseoir chaque vendredi sur les marches de son parlement à Stockholm ?

Nous étions alors en pleine campagne électorale au Québec. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) n’avait pas encore publié son rapport sur les conséquences d’un réchauffement global de plus de 1,5 °C.

Ça vous paraît lointain ? C’est normal. Le chemin parcouru depuis par Greta Thunberg et par la jeunesse a été colossal. Et il risque de prendre un nouveau coup d’accélérateur avec le dernier rapport du GIEC sur les océans et la cryosphère rendu public cette semaine.

Car ce que nous dit ce rapport, c’est qu’une action urgente et immédiate est nécessaire si nous ne voulons pas voir les océans devenir nos pires ennemis.

Il existe un lien indéniable entre l’état du climat, celui des océans et notre existence même, et ce nouveau rapport vient confirmer que les impacts des changements climatiques sur les océans et les zones glacées de la planète se font sentir à une plus grande échelle et à une cadence plus rapide que prévu. Ces changements se traduisent déjà dans la réalité. Tandis que l’Islande et la Suisse disent adieu à leur premier glacier, l’Indonésie annonce le déménagement de sa capitale, Jakarta, menacée par la montée des eaux. Mais au-delà de la perte de territoire, c’est bien de la capacité des océans à soutenir la vie sur Terre qu’il est question.

Les océans sont les véritables poumons de la planète. Ils produisent à eux seuls la moitié de l’oxygène que nous respirons et absorbent environ 30 % du carbone émis dans l’atmosphère, soit un million de tonnes de CO2 toutes les heures au rythme actuel.

Mais la surexploitation des ressources marines, dont la pêche industrielle, l’exploitation pétrolière et maintenant minière, pousse les océans au bord de l’effondrement.

Les changements observés auront des impacts irréversibles si les politiciens s’entêtent à défendre des intérêts incompatibles avec la lutte climatique ou la protection des océans.

Vendredi dernier, plus de quatre millions de personnes, essentiellement des jeunes, sont descendues dans les rues partout dans le monde afin de dénoncer l’inaction des décideurs, et une seconde vague de manifestations est attendue aujourd’hui, notamment à Montréal où la présence de Greta Thunberg devrait galvaniser les troupes.

Le 21 octobre prochain

À l’approche des élections fédérales, cela devrait sonner le réveil pour notre classe politique. Pour la première fois, la tranche des 18-38 ans, pour laquelle l’environnement est une préoccupation majeure, formera la plus importante cohorte de l’électorat.

Cette génération, qualifiée d’écoanxieuse, a bien compris que l’action est un remède puissant. Elle n’attend pas des paroles et des promesses électorales, mais des plans concrets permettant l’atteinte de la neutralité carbone d’ici 2050. Elle souligne que les technologies vertes ne sont pas l’unique option qui s’offre à nous pour lutter contre le dérèglement climatique, mais que la restauration et la conservation de nos milieux naturels, des forêts et des océans sont tout aussi indispensables. Enfin, cette génération ne demande pas aux dirigeants de l’écouter, mais d’écouter la science.

Et que nous dit la science ? Que nous devrions traiter les océans comme si leur destin et le nôtre étaient intimement liés, car c’est le cas.

Or, à ce jour, seulement 1 % des océans sont protégés. Mais le futur Traité mondial sur la haute mer pourrait radicalement changer la donne en ouvrant la voie à la création de sanctuaires marins couvrant 30 % des océans. Seul bémol, cette issue positive repose sur la capacité des États à coopérer. Ceux-ci devront se prononcer en mars prochain sur la manière de gouverner et de gérer les océans.

À l’approche du scrutin du 21 octobre, difficile de ne pas repenser à cette phrase prononcée il y a un an par Harrison Ford lors du Sommet mondial sur le climat : « Cessons de mettre au pouvoir des gens qui ne croient pas en la science, ou pire, qui l’ignorent pour défendre leurs propres intérêts. »

Ces mêmes intérêts nous ont fait perdre un temps précieux et nous poussent aujourd’hui dans une trajectoire radicalement différente de celle que nous aurions voulue pour nous, nos enfants et les générations qui les suivront. Il est encore temps de reprendre notre avenir en main. Cela commence par faire comprendre aux dirigeants politiques et d’affaires l’importance capitale de suivre les recommandations scientifiques et de protéger la nature, car ce n’est pas elle qui a besoin de nous, mais nous qui avons besoin d’elle.

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