En réponse à « Gare à la désinformation », texte de Jim Keon sur les médicaments génériques publié jeudi dernier.

Les médicaments génériques sont essentiels à la viabilité du système de santé et à l’accès pour les patients.

Depuis le 2 août dernier, nos résultats de recherches font la manchette : chez plus de 500 000 Québécois traités pour maladies cardiovasculaires et assurés par le régime public d’assurance médicaments, le passage aux médicaments génériques est associée à une augmentation de 8 à 20 % des consultations aux urgences et des hospitalisations.

En réaction, le 8 août paraissait dans La Presse un texte d’opinion du président de l’Association canadienne du médicament générique. On y suggère que nos études ne rapporteraient aucun résultat méritant considération et que les déclarations faites en lien avec nos travaux se rapprochent de la désinformation. Nous désirons y répondre, car nous croyons fermement que c’est faux.

D’entrée de jeu, on y mentionne : « Il est essentiel que les intérêts commerciaux ne l’emportent pas sur la science. Les patients et les professionnels de la santé méritent mieux. » Nous ne pouvons être plus en accord avec ces propos.

Contrairement aux fabricants de médicaments, nos études ont été conduites de façon indépendante de l’industrie dans le cadre d’un programme de doctorat à l’Université Laval.

L’auteur qui était responsable de l’approbation finale de cette étude, un chercheur hautement reconnu au Québec et à l’international, a déclaré en bonne et due forme tout conflit d’intérêts potentiel en lien avec le sujet à l’étude.

Ensuite, tel que documenté dans les articles, ces études ont été conduites dans le cadre du mandat ministériel québécois de surveillance des maladies chroniques et traumatismes à l’Institut national de santé publique du Québec, et le tout sans financement externe.

Contexte scientifique des questions de recherche soulevées

Rappelons-nous, par exemple, un cas hautement médiatisé en 2012 : à la suite de nombreuses plaintes de patients qui sont passés à la version générique d’un certain antidépresseur, la Food and Drug Administration a commandé une réévaluation de l’équivalence de la version générique comparativement à la version originale. 

Il a été démontré que l’une des versions génériques n’était effectivement pas équivalente à la version originale en ce qui a trait à la proportion de l’ingrédient actif qui atteignait la circulation sanguine, du fait que les ingrédients inactifs différaient entre les deux versions du médicament. Elle a été retirée du marché.

En 2018, dans 22 pays dont le Canada, on apprenait que l’ingrédient actif de certains antihypertenseurs génériques était contaminé par une impureté potentiellement cancérogène, et ce, depuis quelques années. Cela n’avait pas pu être prévenu par les normes actuelles encadrant les médicaments.

Le 8 août, dans un autre média, l’une des auteures des études rapportait qu’évidemment, aucune étude n’est parfaite. Néanmoins, elle affirmait : « [...] Les chercheurs de ce milieu savent à quel point le processus de publication est exigeant, qui comprend une révision rigoureuse par les pairs. Nous répondons à des questions de recherche soulevées en clinique ou par des patients eux-mêmes. Évidemment, il faut toujours être prudents quant à l’interprétation des résultats d’une étude isolée ou de quelques études. Cela dit, devrait-on éviter de discuter publiquement de résultats de recherche sensibles comme ceux-ci ? » C’est ce que certains semblent suggérer.

Et si ce que l’on détecte dans nos études, qui nécessite validation bien entendu (ce n’est pas le moment de s’affoler et d’arrêter son médicament générique), révélait que l’on peut faire mieux avec les normes d’homologation des médicaments génériques ?

Ne laissons donc pas les intérêts commerciaux l’emporter sur la science et continuons les recherches pour améliorer les choses. Pour les patients, pour les professionnels de la santé, et pour la population canadienne.

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