Une garderie privée subventionnée s'est fait prendre la main dans le sac: on a utilisé un prête-nom rémunéré pour dépasser le quota accordé à un même propriétaire de garderie. Le Titanic des réseaux de garderies subventionnées est ébranlé. Ce cas de figure, révélé hier par Radio-Canada, n'est peut-être que la pointe de l'iceberg.

Pour éviter que des intérêts privés prennent le contrôle sur un réseau de garderies subventionnées, le gouvernement du Québec a prévu des paragraphes à cet effet dans la Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance. Au paragraphe 93.1, on précise: «Un titulaire d'un permis de centre de la petite enfance peut bénéficier d'au plus 300 places dont les services de garde sont subventionnées. Il en est de même d'une personne qui est titulaire de plusieurs permis de garderie ou des personnes liées qui sont titulaires de plusieurs permis de garderie.»

Le 21 octobre 2014, le gouvernement a pourtant adopté une série de paragraphes supplémentaires en ajoutant les paragraphes 93.3 à 93.11 pour préciser la notion de personnes liées. En somme, le ministère de la Famille devait être au courant des mesures de contournement d'un ou de plusieurs propriétaires de garderies privées subventionnées. Pour se sentir obligés de préciser les quotas maximums pour un groupe de propriétaires, les législateurs ont peut-être été témoins d'une tentative de contournement de loi.

Pour que ce type de fraude ait lieu, on peut se permettre de se poser quelques questions. Premièrement, y a-t-il un entremetteur entre certains propriétaires et un réseau d'acquéreurs potentiels? Pour acquérir sur le marché secondaire plus de 300 places, il faut qu'un propriétaire réussisse à connaître les garderies subventionnées à vendre et à offrir le meilleur prix. Il peut aussi tenter d'obtenir un permis directement du gouvernement, mais voilà un exploit, par les temps qui courent.

Deuxièmement, comment se fait-il que cette histoire ne soit pas sortie publiquement avant? Indubitablement, quelqu'un quelque part était au courant dans le réseau. Des complices sont-ils impliqués? Est-ce que le réseau des garderies a pu servir pour des investissements auxquels le gouvernement ne voudrait pas être associé. En somme, a-t-on fermé les yeux?

Autre point, le ministère de la Famille doit absolument réagir. Un propriétaire ayant commis un acte illégal doit se faire retirer son permis lui permettant de dépasser le chiffre de 300 places accordées par la loi. En outre, on doit lui retirer l'ensemble de ses permis de garderie et forcer la vente à des propriétaires honnêtes.

Affirmer que le CPE est la réponse à cette problématique serait le fruit d'une réflexion étroite. Le réseau des CPE a démontré jusqu'à maintenant son incapacité à gérer de façon serrée les fonds publics malgré le fait que les installations étaient financées par le gouvernement. Comment se fait-il qu'un propriétaire de garderies subventionnées puisse tirer un profit appréciable de ses installations, alors qu'un CPE de grandeur équivalente déclare un déficit tout en évitant le coût d'investissement immobilier?

Nous n'en serions pas là si le gouvernement du Québec avait dès le départ opté pour une autre solution que les subventions directes aux services de garde (privés ou non). Globalement, la solution aurait été de donner des avantages fiscaux aux parents, par des crédits ou des déductions tout en leur laissant le libre choix du service de garde. Par contre, cette solution était trop simple, n'est-ce pas?

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