Le Conseil du trésor a tranché: un enseignant au primaire a une valeur d'emploi supérieure au professeur de cégep. En effet, dans la nouvelle classification gouvernementale, un enseignant de maternelle se retrouve au «rangement 22», alors que le professeur de cégep se fait ranger dans une case inférieure, le «rangement 21».

Se pourrait-il que Pierre Duchesne, ministre de l'Enseignement supérieur, ait un problème de communication avec son homologue du Conseil du trésor? Parce que reconnaître une infériorité à l'enseignement supérieur ressemble à une antithèse.

Au Québec, les fonctionnaires du gouvernement ont classé tous les emplois en 26 rangements jusqu'à maintenant. Alors, comment en sont-ils venus à faire cette erreur de classement? Ils se sont dit que le travail du professeur de cégep se limitait à l'enseignement. 

Voilà qui semble un peu illogique, puisque dans le contrat de travail entre le gouvernement et les professeurs de cégep, on retrouve une série d'obligations professionnelles dépassant les simples fonctions de l'enseignement. La charge comporte: divers services professionnels rendus, participation à des comités de programme, l'évaluation des programmes d'enseignement, des responsabilités départementales et de coordination, d'autres tâches administratives, etc. En somme, si le Conseil du trésor milite en faveur de l'abolition des tâches externes à l'enseignement, pas de problème, nous allons cesser de les faire! 

Qui plus est, il semble que le gouvernement n'attribue aucun niveau de complexité à l'enseignement au collégial. Comment justifier alors que des universités québécoises créditent des cours du secteur technique à l'université? Il s'agit d'un élément d'analyse intéressant. Pour enseigner au collégial, il faut être expert d'une discipline (et avoir le diplôme universitaire s'y rattachant), alors qu'au primaire et au secondaire, il faut être expert de pédagogie.

Un comité de députés a récemment conclu, après des mois de travail (chose que trois comptables avaient tranchée en une seule soirée), qu'il y avait un risque à sous-rémunérer les députés. Comment le Conseil du trésor pense-t-il attirer des professionnels (ex.: des avocats et comptables professionnels agréés) au collégial en limitant la reconnaissance des diplômes à un baccalauréat de trois ans? À force d'être peu exigeant pour la formation et la qualité des candidats retenus pour l'emploi, faudra-t-il se plaindre de la diminution de la qualité de l'enseignement?

Autre aspect important, les problèmes personnels et comportementaux ne s'arrêtent pas à la sortie du secondaire. Des enfants délaissés par leurs parents, il y en a aussi au cégep. Le système octroie des diplômes d'études secondaires à des étudiants avec des difficultés et des troubles d'apprentissages. 

Ces candidats se retrouvent par la suite au niveau de l'enseignement supérieur. Ils demandent de l'encadrement et du temps, beaucoup de temps. Dans son travail quotidien, un professeur côtoie divers problèmes étudiants: drogue, abus, parents absents, violence conjugale, etc. Les professeurs fournissent un support académique et psychologique important à ces étudiants. Cela est-il compris dans le «rangement 21» ?

Si le ministère de l'Éducation désire que les professeurs de cégep traitent leurs étudiants comme des clients ou de simples intrants à un processus de fabrication, qu'il le manifeste. Par contre, dans un lieu d'enseignement supérieur où se font de la recherche, de l'accompagnement et des transferts de compétences, on se doit d'inclure ces éléments dans l'analyse des tâches menant à déterminer un «rangement».

À l'école comme dans la vie professionnelle, lorsqu'on fait des analyses bâclées, on n'obtient pas de diplôme ou on perd son boulot. Messieurs les ministres, faites-vous des analyses de la sorte?

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