Lors de son passage à Tout le monde en parle, Gabriel Nadeau-Dubois a profité de la tribune offerte pour s'opposer aux subventions gouvernementales accordées aux écoles privées. Selon lui, il faudrait carrément éliminer les subventions au secteur privé et transférer l'argent au secteur public. Voilà un voeu pieux, mais est-ce souhaitable ou réalisable? Personne sur le plateau n'a jeté le moindre doute sur son affirmation. Et pourtant...

Au Québec, plus d'un étudiant sur dix étudie dans les écoles privées du primaire et du secondaire, sous la gouverne du ministère de l'Éducation. La première décennie suivant l'an 2000 a généré un transfert marqué des élèves du secteur public au secteur privé. La région montréalaise remporte la palme du recours au secteur privé: 3 étudiants sur 10 bénéficient de celui-ci.

Les parents payant des milliers de dollars au secteur privé pour y envoyer leurs enfants se retrouvent à payer une sorte d'impôt volontaire. En effet, comme une partie de leurs impôts finance déjà le système d'éducation, ne pas profiter de l'école publique gratuite revient à payer le système en double. Bien que l'étudiant moyen du secteur privé soit subventionné en moyenne à 60% du montant de base octroyé à l'étudiant moyen du secteur public, cette façon de procéder permet à l'État de transférer une partie des risques d'affaires et immobiliers aux écoles privées. Cette contribution gouvernementale est supérieure lorsqu'on prend en compte les crédits d'impôt liés à ce secteur d'activité.

Donc, si on élimine du jour au lendemain les subventions au secteur privé, des milliers d'étudiants québécois retourneraient au secteur public par incapacité des parents à éponger une hausse importante des coûts. Ainsi, seulement au point de vue de la logistique, nous nous retrouverions rapidement avec des écoles bondées au public et un secteur privé où certaines écoles seraient à l'agonie.

Mais peut-on penser à une solution mitoyenne? C'est-à-dire s'approcher du point d'inflexion où on subventionne moins les écoles privées, tout en s'assurant de minimiser le transfert massif d'étudiants au réseau public? Ainsi, nous devrions établir une étude de sensibilité par secteur pour déterminer à partir de quel pourcentage de financement, les parents seraient contraints de retourner leurs enfants au secteur public. En d'autres termes, il faut mesurer l'élasticité prix de la famille moyenne des institutions privées.

Ainsi, on diminuerait la subvention aux écoles privées non pas par idéologie, mais bien par quête d'une allocation optimale des ressources financières et gouvernementales.

Gabriel Nadeau-Dubois me répondrait peut-être que l'éducation, ce n'est pas un produit et qu'elle doit être protégée de toutes influences mercantiles. À cela, on pourrait répondre que l'optimisation des ressources a justement pour but de gagner en efficience pour maximiser le résultat obtenu de chaque dollar investi en éducation.

Éliminer les subventions au secteur privé à 100%, n'est-ce pas là une façon de créer cet élitisme parmi les plus aisés et venir réduire la mixité sociale de nos établissements d'enseignement à forte valeur ajoutée?

M. Nadeau-Dubois, vous trouvez que je parle de l'éducation comme un processus? Eh bien, c'est un processus. On ne devrait pas se battre pour que tous les extrants soient identiques, mais bien que la machine à saucisses génère les meilleurs résultats avec les ressources limitées dont elle dispose.

À force de vouloir idéologiquement produire de la saucisse «no name», on finit par gaspiller de la «Hygrade».

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion