Annuellement, des voisins organisent un dîner de cons fiscal. Chacun d'entre eux invite un contribuable payant sa «juste part d'impôts» à venir déguster un repas dans un restaurant chic de Montréal. Avant l'arrivée de leurs invités, les convives expliquent pourquoi ils devraient gagner le concours annuel. Ils effectuent un classement et le dernier paie la facture.

Le premier, un entrepreneur en construction, s'exprime: «J'ai invité Hélène, chef comptable de mon entreprise. Son mari est à la maison et n'a pas de revenu. Imaginez-vous donc qu'elle ne peut pas fractionner son revenu avec celui-ci, même s'ils demeurent sous le même toit. Personnellement, je n'ai pas ce problème. Comme travailleur autonome, je peux affirmer au fisc que ma conjointe et mon fils travaillent pour mon compte. En fait, ils s'occupent officiellement de ma facturation. Je déclare donc un revenu total équivalent, mais ma facture d'impôts est inférieure grâce à ma répartition officielle de revenus. Qui peut véritablement affirmer que le salaire que je leur donne est surévalué par rapport aux services rendus?»

Le deuxième, propriétaire d'épicerie enchaîne: «J'ai invité Jean, mon directeur de la section des fruits et légumes. Imaginez-vous que ce dernier paie son épicerie chaque semaine avec son salaire net! Pour ma part, je n'ai jamais eu véritablement à le faire, puisque parmi les pertes que je déclare, se trouve ma commande hebdomadaire.»

Le troisième, un propriétaire de PME prospère, ajoute: «J'ai invité Steve, un enseignant au primaire. Celui-ci paye tous les frais associés à sa voiture nécessaire pour se rendre au travail. Personnellement, ma voiture Audi est immatriculée au nom de ma compagnie. Dans les faits, je m'en sers principalement pour des fins personnelles, mais je déclare le contraire. Mon fils a d'ailleurs lui aussi une voiture payée par la compagnie pour aller à ses cours au cégep. Comment croyez-vous que le fisc peut réellement détecter cela?»

Le quatrième, un charpentier-menuisier continue fièrement: «J'ai invité Carole, elle travaille dans une cafétéria. Lorsque la période estivale commence, elle perd son emploi et touche l'assurance-emploi. Dès qu'elle travaille quelque part, elle doit cesser de bénéficier de l'assurance-emploi. Pour ma part, lorsque je bénéficie de l'assurance-emploi, je facture de façon postdatée pour pouvoir toucher et l'assurance-chômage et mes revenus de contrats simultanément. Évidemment, je ne parle même pas du fait que je ne déclare pas 30% de mes revenus en me faisant payer en liquide.»

Le cinquième, un dentiste, surenchérit: «J'ai invité François. Lui, c'est le plus tordant. Il a un revenu variable d'une année à l'autre, mais il est imposé sur les revenus gagnés dans l'année fiscale. En tant que propriétaire d'une société incorporée, je peux laisser des revenus dans l'entreprise et différer l'impôt personnel jusqu'à ce que je veuille me verser un salaire ou un dividende. Je peux donc uniformiser mes revenus annuels à ma guise.»

Une chirurgienne conclut: «C'est moi la gagnante! J'ai invité Martin, un infirmier. Comme chirurgienne, je n'ai qu'un seul employeur, c'est-à-dire le gouvernement (par la RAMQ). Malgré mon emploi assuré, le gouvernement considère que j'ai plusieurs clients. Ainsi, même si je devrais être considérée économiquement comme une employée salariée de l'État, je suis payée à l'acte, j'ai donc tous les avantages du travailleur autonome. Mon dernier voyage de famille dans le sud correspondait par hasard à une semaine de formation. N'est-ce pas merveilleux? Une partie de ma luxueuse demeure sert évidemment de bureau aux fins d'affaires!»

Une fois les invités partis, les délibérations s'animent et la chirurgienne conclut: «Finalement, le con, c'est le salarié. Qui s'occupe de la facture? Peu importe, n'est-ce pas un dîner aux fins d'affaires déductible à 50% du revenu d'entreprise?»

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