Il y a au moins une chose de remarquable dans la nouvelle politique énergétique : l'accent mis sur notre consommation d'énergie.

À deux reprises dans le mot du premier ministre qui ouvre la politique énergétique 2030, M. Couillard écrit qu'il faut « transformer nos habitudes de consommation d'énergie ». Dans les objectifs de la politique, on compte ainsi non seulement favoriser la consommation responsable, mais aussi « tirer pleinement parti du potentiel de l'efficacité énergétique ».

Cela se traduit un peu plus concrètement par une amélioration de 15 % de l'efficacité énergétique et une réduction de 40 % de la consommation de produits pétroliers. Ce changement « radical » de nos habitudes de consommation, comme le premier ministre a dit lors du lancement de la politique le 7 avril dernier, serait à la base de la transition énergétique que le Québec doit amorcer.

Par contre, seulement un outil important a été mentionné :  la création d'un organisme visant l'économie d'énergie et la transition énergétique.

Ce nouvel organisme doit apporter davantage de cohérence, par une gouvernance « complète et intégrée ». Autrement, le gouvernement répète plusieurs recettes du passé. Des crédits d'impôt pour la rénovation verte, des rabais à l'achat de véhicules électriques, des promesses de mise à jour des normes de construction du bâtiment, des réflexions sur l'aménagement du territoire...

Pourra-t-on radicalement changer les consommateurs d'énergie québécois avec un nouvel organisme et des coupons-rabais ? C'est peu probable. La politique ressemble aux résolutions du Nouvel An : de bonnes intentions, sans mécanismes pour y arriver.

Il n'y a évidemment pas de recette parfaitement connue et maîtrisée pour réussir un début de transition énergique d'ici 2030. On sait cependant que pour avoir une influence sur les comportements des consommateurs, à défaut de pouvoir nous instiller une culture de sobriété, les outils dont dispose le gouvernement sont les prix, l'information et la réglementation.

La préparation de notre transition énergétique devrait donc bien plus explicitement indiquer que des signaux de prix vont nous inciter à réduire notre consommation de pétrole et d'énergie en général. Que de l'information sera rendue disponible à tous sur les solutions de rechange, et que, si ces solutions ne sont pas encore là, des plans vont permettre de les développer. Que des réglementations vont nous contraindre à modifier nos habitudes problématiques : celles de l'étalement urbain, de choix de véhicules toujours plus gros et lourds, de construction et de rénovation de bâtiments sans réflexion rigoureuse sur leur consommation d'énergie.

AFFICHER LE SIGNAL

Le marché du carbone doit nous donner un signal de prix, pour nous inciter à réduire notre consommation de pétrole. Mais le prix du carbone est caché, il n'est ni diffusé ni expliqué. C'est tout comme si on voulait enterrer le signal pour que les consommateurs ne puissent pas le décoder. Saviez-vous, ainsi, que les distributeurs d'essence ont payé 17,64 $ par tonne de CO2 aux dernières enchères (17 février), ce qui correspond à 4,16 ¢/litre ?

À ce niveau, invisible en plus, personne ne va sortir de son VUS pour aller acheter une carte Opus mensuelle. Pourtant, l'essence est probablement le seul produit dont on affiche le prix au dixième de cent près. Si les consommateurs peuvent faire des détours pour économiser quelques dixièmes de cent, lorsqu'ils sont informés, peut-être que certains commenceraient à laisser leurs clés de côté si on les informait du prix du carbone actuel, mais surtout à venir. Chaque année d'ici 2020, il y aura de moins en moins de tonnes de carbone à acheter aux enchères. Les acheteurs du nombre record de VUS vendus en 2015 vont s'en rendre compte avec le prix qui monte. Il vaudrait mieux qu'ils puissent anticiper le changement, sinon ce ne sera pas une transition énergétique que nous aurons, mais un choc.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion