Dans les prochaines semaines, le gouvernement du Québec dévoilera sa politique énergétique 2016-2025 et le gouvernement fédéral réunira toutes les provinces pour concocter un cadre d'action national pour lutter contre les changements climatiques. Notre province a adopté la cible de réduction de gaz à effet de serre (GES) la plus ambitieuse au Canada : 37,5 % d'émissions en moins en 2030, par rapport à 1990.

Selon les chiffres les plus récents, ceux de 2013, nous avons pris 23 ans pour réduire notre taux de 8 %. Dans les 4 ans qui nous séparent de 2020, nous devons couper 12 % (un objectif fixé en 2012 par le gouvernement Charest). Et enfin, nous aurons 10 ans pour abattre les 17,5 % restants. La lutte ne sera pas pour autant finie, puisqu'il faudra alors s'attaquer aux objectifs de 2050 et diminuer encore de plus de 40 % les émissions.

Le secteur de l'énergie est au coeur du combat contre les gaz à effet de serre : il est la source de près des trois quarts de nos émissions (71 %), le reste venant de procédés industriels (13 %), de l'agriculture (9 %), des déchets (6 %) et enfin de l'utilisation de différents produits (moins de 1 %).

Pour atteindre ces objectifs, ce n'est rien de moins qu'une révolution qu'il faut entreprendre.

Ces objectifs sont d'autant plus ambitieux que les Québécois sont déjà ceux qui émettent le moins de GES par habitant au Canada : 10,2 tonnes, contre 20,7, en moyenne. Non seulement nous sommes déjà les plus « maigres », mais nous sommes ceux qui voulons perdre le plus de poids !

Il est donc évident que le statu quo n'est pas acceptable : nos émissions de GES stagnent depuis 2010 autour de 82 millions de tonnes. Il faut amorcer une transition énergétique, centrer nos efforts de manière concertée, mais rigoureuse et ferme, et surtout assurer la plus grande cohérence possible dans nos actions. C'est pour ces raisons que la politique énergétique 2016-2025 du gouvernement Couillard doit être à la hauteur. À cause de l'importance de l'énergie dans les GES, elle orientera vers l'atteinte, ou non, de nos objectifs.

Cette cohérence est pourtant le premier casse-tête du gouvernement, avant même d'avoir à annoncer à la population tous les changements qu'elle devra adopter dans sa mobilité, son logement, son alimentation et sa consommation. Il lui faudrait en effet pouvoir coordonner ses propres forces. 

Or si la politique énergétique émane du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, c'est le ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques qui est responsable du plan d'action sur le climat... qui a un impact direct sur le ministère des Transports, la Régie du bâtiment, les ministères de l'Économie et de l'Agriculture, et évidemment celui des Affaires municipales et de l'Organisation du territoire. Bref, c'est une réforme institutionnelle en profondeur qu'il faudrait mener pour bien coordonner le tout, parce que chaque ministère est une petite forteresse qui ne parle pas forcément aux autres.

Ce n'est sans doute pas ça que nous réserve le gouvernement Couillard à court terme. Mais un peu de ménage pourrait être fait dans la gouvernance d'un secteur clé pour amorcer une réforme plus profonde : celui de l'efficacité énergétique. Celle-ci touche les industries, les bâtiments et le transport. En agissant efficacement et rationnellement dans ces secteurs, toute l'économie québécoise pourrait y gagner, tout en diminuant les émissions de GES. 

Il faut en effet mieux choisir les programmes, mieux dépenser l'argent (du Fonds vert notamment) et insuffler une culture d'efficacité et de productivité. Un secteur de l'efficacité énergétique fort au Québec pourrait être le plus puissant levier de notre transition énergétique, et le déclencheur de la révolution vers une économie sobre en carbone. Elle pourrait commencer cette année, avec la nouvelle politique énergétique - ou alors nous prendrons un retard qui pèsera lourd.

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