«À ma nouvelle école, on se moque de moi et de mon homosexualité que j'assume ouvertement; on me bouscule en me traitant de fif et de tapette, surtout dans les vestiaires lors des cours d'éducation physique. Ça m'empêche de dormir et m'enlève le goût d'aller à l'école».

Ceux qui croient que l'homophobie a été enrayée prétendront sans doute que ce témoignage n'est qu'un vestige d'un lointain passé. Pourtant, il s'agit de la contemporaine réalité de Joey, un adolescent bien de son temps, racontée sur le site de la Fondation Jasmin Roy.

Sur les réseaux sociaux, certains se sont offusqués de la nouvelle publicité du gouvernement du Québec destinée à lutter contre l'homophobie; ils ont crié au gaspillage de fonds publics et ils se sont inquiétés du sort de leurs enfants ainsi exposés au baiser de deux êtres qui s'aiment. Comment réagir? Quoi leur dire? La vérité, dans des mots simples, est généralement une formule gagnante.

Si les gestes et paroles homophobes sont parfois plus sournois et insidieux aujourd'hui qu'il y a 30 ou 40 ans, leur existence n'en est pas moins réelle et leurs conséquences moins douloureuses pour ceux qui les subissent. Cette publicité ne cherche pas à catégoriser les homosexuels et à les traiter en victimes mais plutôt à transmettre l'idée que l'homosexualité n'est pas incompatible avec une vie équilibrée, heureuse et harmonieuse, exempte de menaces et de discrimination. Ce message réussit assurément à nous faire réfléchir sur nos réactions et comportements face à l'homosexualité et il est porteur d'espoir pour les jeunes homosexuels qui sont soumis à l'impitoyable régime de la cour d'école.

De là à affirmer que toutes les publicités payées à même les fonds publics sont intelligentes et de bon goût, il y a un pas à ne pas franchir. La récente publicité du ministère de la santé de l'Ontario traçant un parallèle entre la «fumeuse sociale» et la «péteuse sociale» s'impose d'ailleurs comme un évident faux pas publicitaire.

Impossible de ne pas sourire, ricaner ou s'esclaffer en regardant cette jeune femme raconter ses épisodes de flatulences entre amis. Ceux qui survivront à ces 30 secondes sans mourir au bout de leur fou rire retiendront peut-être qu'il est tout aussi irrespectueux et offensif pour son entourage de fumer que de péter dans leur salon. Mais bien peu d'entre eux auront compris que le fait de fumer socialement est aussi dangereux pour la santé que l'usage régulier de la cigarette. Les probabilités d'atteindre le but visé par cette publicité et d'influencer positivement les 16-24 ans, public cible du message représentant 26% des fumeurs, sont donc fort minces.

Les campagnes de sensibilisation des gouvernements sur des enjeux sociaux sont utiles, pertinentes et nécessaires. Elles sont généralement percutantes et suscitent réflexions et discussions. Les récents messages sur la dépression, les textos au volant et les accidents de travail méritent mention.

Si la publicité sur l'homophobie s'inscrit parfaitement dans cette catégorie, il en va autrement de celle de la fumeuse sociale, qui couvre les instigateurs du projet et le gouvernement de l'Ontario d'un ridicule aussi peu discret que les activités de la «péteuse sociale».

À défaut de voir leur argent servir la cause de la lutte anti-tabac et de la santé pulmonaire, les contribuables ontariens se seront dilatés la rate grâce à cet exercice publicitaire douteux. On pourrait être tentés d'en rire mais ce serait pour ne pas pleurer devant pareille absurdité.

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