Mardi, devant les Nations unies, le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a qualifié le président iranien «de loup déguisé en mouton». À l'évidence, l'offensive de charme de Hassan Rohani auprès des Occidentaux déplaît à certains Israéliens. Mais, au-delà de cette rhétorique, Netanyahou n'a-t-il pas manqué une occasion de prendre les Iraniens au mot?

Le premier ministre israélien a de quoi être furieux. Là où la visite à New York et aux Nations unies du leader iranien a fait la manchette des médias du monde entier pendant des jours et lui a valu une conversation avec le président américain, la sienne est pratiquement passée inaperçue.

Netanyahou a pourtant rencontré le président américain et a parlé devant une salle à demi pleine à l'ONU. Il a répété à tous ses interlocuteurs le message qu'il martèle depuis des années: l'Iran est sur le point d'acquérir une bombe atomique et, s'il le faut, Israël agira seul afin de détruire le programme nucléaire militaire iranien. Sur ce plan, le leader israélien emporte l'adhésion de nombreux États qui soupçonnent l'Iran de tricher avec ses obligations internationales et qui reconnaissent à Israël le droit d'assurer sa sécurité.

Le problème n'est pas là. Derrière l'accord sur des principes parfaitement légitimes, Israël parvient mal à maintenir un front uni face à l'Iran. Au sein même de l'establish-

ment politique israélien, des voix s'élèvent contre la manière de faire du premier ministre. 

Son principal partenaire au sein de l'actuelle coalition gouvernementale, le ministre Yair Lapid, a critiqué la décision de la délégation israélienne à l'ONU de boycotter le discours du président iranien en déclarant qu'«Israël ne devrait pas paraître comme étant continuellement opposé aux négociations et comme étant un pays qui n'est pas intéressé par des solutions pacifiques».

Le président Shimon Peres est lui aussi monté au front. À la question de savoir si Obama se laissait tromper par les sourires et les déclarations du président iranien, Peres a répondu qu'«on peut être d'accord ou ne pas être d'accord (avec les Américains), mais je n'aime pas ce ton méprisant (adopté en Israël contre les États-Unis). D'autres ont aussi un cerveau pour réfléchir, pas seulement nous.»

Et c'est bien là la question. Les États-Unis, la France et d'autres pays veulent profiter de l'élection du nouveau président iranien pour favoriser la négociation. C'est le sens de la conversation téléphonique entre Obama et Rohani. 

«Nous avons parlé des négociations entre l'Iran et le groupe 5+1 (États-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) et de la fenêtre qui s'est ouverte», a déclaré le président iranien avant son départ de New York. Il a même fixé une échéance à la conclusion d'une entente dans une entrevue au Washington Post: nous voulons signer un accord dans les «trois à six mois», a-t-il dit, expliquant que son pays voulait régler cette question «dans les mois qui viennent et non les années». 

À l'évidence, les sanctions font mal et les Iraniens, du moins ceux dans l'entourage de Rohani, cherchent à sortir le pays de l'isolement diplomatique et économique.

Le premier ministre israélien devrait saisir l'occasion de cette ouverture: rester ferme sur les principes et les objectifs, mais tendre la main. Après tout, le temps est compté pour l'Iran, et les conditions fixées par Washington et Paris sont claires: il faut plus que des mots, il faut des actes, des gestes concrets en direction d'une neutralisation de la filière militaire du programme nucléaire iranien. 

D'ailleurs, le sérieux des intentions iraniennes sera bientôt mis à l'épreuve. Le 15 octobre, à Genève, les négociations reprennent.

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