Après 18 mois de combats et de massacres, la Syrie est toujours engagée dans une spirale de la violence. Et rien ne laisse croire à une fin prochaine, encore moins à une intervention humanitaire.

Lundi, devant le Conseil de sécurité de l'ONU, un homme s'est adressé aux représentants de la communauté internationale. Lakhdar Brahimi, l'envoyé spécial sur la Syrie, était bien seul. Il a égrené un chapelet de misères: 1,5 million de Syriens ont fui leur domicile, la situation est extrêmement grave et se dégrade chaque jour, le gouvernement nie la réalité d'une révolte populaire, l'opposition est un regroupement informe et divisé.

Alors, la paix? «Il n'y a pas de progrès en vue aujourd'hui ou demain» pour un règlement du conflit, a-t-il dit, ajoutant n'avoir aucun plan global, seulement «quelques idées».

Ce n'est pas la première fois que Brahimi endosse ce costume d'émissaire international. Il en a vu d'autres aux quatre coins du monde. Les grandes puissances qui l'ont mandaté le savent. Elles font de sa médiation un alibi afin de masquer leurs divisions et leur incapacité à maîtriser le conflit. Après le témoignage de Brahimi, les membres du Conseil ont fini par convenir d'un communiqué dans lequel ils ont exprimé leur «inquiétude» et «offert» leur «total soutien» au diplomate.

On ne parle plus d'intervention, ni même de créer des zones de sécurité pour les populations. La France a déjà pris acte de cette situation. À New York, dès lundi, le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a indiqué qu'il n'était pas optimiste au sujet de la crise. Mardi, à la tribune de l'ONU, Ban Ki-moon et Barack Obama n'ont rien dit de plus. François Hollande, qui a pourtant souligné que la Syrie était «la première des urgences», n'a rien offert de concret. Quant aux États musulmans, ils se sont divisés: d'un côté, le président égyptien a réclamé un changement en Syrie, de l'autre, son homologue iranien a dénoncé «la main» de l'étranger dans le conflit actuel.

La prudence des uns et la division des autres sont les signes évidents de la complexité du casse-tête syrien. Il était plus facile d'intervenir en Libye, quoique les effets actuels dans ce pays et dans les États alentours - comme au Mali où la moitié du territoire est maintenant aux mains d'islamistes et de terroristes arrivés en partie de Libye - fassent maintenant réfléchir.

La Syrie est une tout autre affaire. Le régime en place a des assises politiques et sociales, une armée et des services secrets redoutables, des armes chimiques, des commanditaires étrangers. La position du pays dans les affaires libanaises, palestiniennes, turques et jordaniennes le rend incontournable.

En face, l'opposition est incapable d'afficher la moindre unité. Il y a l'opposition tolérée, celle qui cherche un dialogue et rejette la violence tout en réclamant un changement de régime. Et il y a une rébellion militaire, coriace et déterminée, qui dénonce les opposants tolérés, mais qui est elle-même divisée en factions internes et externes. Après un an et demi de combats et une aide financière et diplomatique importante de plusieurs pays arabes, il est stupéfiant de constater un pareil désarroi. Alors, dans de telles conditions, comment, advenant la victoire, ces oppositions pourraient-elles assumer le pouvoir à Damas?

L'effondrement du régime pourrait causer une onde de choc aux conséquences désastreuses. Faute de solution acceptable aux parties, on préfère, à Paris, à Washington et à Moscou, un conflit localisé que de se retrouver face à un embrasement régional. Le Liban a vécu ce drame pendant 15 ans. La Syrie semble prendre la même direction.

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