L'envoyé spécial conjoint de l'ONU et de la Ligue arabe en Syrie, Kofi Annan, garde un brin d'espoir quant à la situation dans ce pays. Il espère une issue pacifique au conflit si toutes les parties y mettent de la bonne volonté. Aurait-on trouvé l'homme providentiel?

L'ancien secrétaire général de l'ONU jouit d'un immense de prestige dans le monde. Il est l'une des rares personnalités internationales, avec Bill Clinton, à être immédiatement reconnu lorsqu'il apparaît à la télévision. Et il a des états de service. Prix Nobel de la paix, Kofi Annan a souvent pris des initiatives qui ne plaisaient pas aux grands de ce monde lorsqu'il était à la tête de l'ONU. À la retraite depuis cinq ans, il est un médiateur recherché.

Ainsi, en 2008, alors que le Kenya est à feu et à sang après des élections violemment contestées, il réussit au bout de plusieurs semaines de négociations à convaincre la classe politique de former un gouvernement d'union nationale afin d'éviter au pays les affres d'une guerre civile. Aujourd'hui, ce poumon économique de l'Afrique de l'Est est doté d'une nouvelle constitution et se dirige vers des élections présidentielles plus apaisées.

En Syrie, Kofi Annan se retrouve devant une tout autre crise dont les ramifications intérieures et extérieures la rendent d'une grande complexité. Le gouvernement de Bachar al-Assad n'entend aucunement lâcher le pouvoir et exige le désarmement des rebelles avant toute amorce de discussions. Il compte sur la loyauté des forces armées et de sécurité et sur l'appui d'une partie non négligeable de la population.

Les rebelles sont tout aussi obstinés. Pour eux, le préalable à une négociation est le départ de l'ensemble du clan Assad. Et les deux parties comptent sur des soutiens étrangers puissants qui, pour l'instant, ne font preuve d'aucune souplesse dans leur détermination à voir leur faction gagner ce bras de fer sanglant.

Dès lors, comment Kofi Annan pourra-t-il concilier l'inconciliable? La semaine dernière, il a proposé au gouvernement syrien et aux rebelles le déploiement d'une mission d'observation dont le mandat sera de créer un dispositif visant à faire cesser les tueries, à acheminer l'aide humanitaire et à lancer le processus d'une solution politique.

La proposition est honnête et a le mérite d'être endossée, du moins publiquement, par les membres du Conseil de sécurité et de la Ligue arabe. Elle peut, avec un minimum de bonne volonté, être appliquée et servir de cadre à une solution négociée. De telles initiatives ont réussi au Kenya, au Salvador, au Mozambique et ailleurs.

Pour autant, la proposition Annan apparaît impraticable tant les parties du conflit sont campées sur leurs positions et convaincues que la seule issue est l'élimination de l'autre. Cette vision des choses, les parties la tirent de la logique de ce conflit qui, malheureusement, n'a pas épuisé toute sa violence.

En effet, à la notable exception du Kenya, des propositions à la Kofi Annan visant le règlement de ce genre de conflit un peu partout dans le monde ont souvent dû attendre des années de violences et de carnages avant d'être acceptées. On semble oublier que le Liban, le Salvador ou l'Irlande du Nord ont enduré 20 à 30 ans de guerre ou d'affrontements avant de vivre en paix.

En bon expert des conflits, Kofi Annan est bien conscient de la situation actuelle. Il ne voit pas en Syrie un affrontement se déroulant sur 20 ans, mais il demande du temps et de la patience pour arriver à une solution. Il n'est pas certain que les acteurs de ce drame soient prêts à lui en accorder.

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