Difficile de faire preuve d'optimisme à tout crin quant à l'issue de la crise autochtone. Pourtant, ce n'est certainement pas l'urgence d'agir qui fait défaut dans ce dossier.

Rappelons simplement que le Canada se classe au 8e rang quant à l'indice de développement humain mis en place par l'ONU, alors que les communautés des Premières nations au Canada arrivent au 78e rang mondial. Une véritable honte pour un pays riche et développé comme le Canada.

Certes, certaines communautés s'en tirent mieux que d'autres, mais le fossé qui les sépare des non-autochtones est tel qu'on ne peut plaider l'exception. Dans bien des cas, nous devons reconnaître que le tiers-monde existe bel et bien chez nous.

L'histoire pèse comme une chape de plomb sur ce dossier avec son lot d'incompréhensions, ses relents de colonialisme et parfois aussi une dose énorme de culpabilité qui freine, chez les plus ouverts, le nécessaire esprit critique qui favoriserait un déblocage.

Il y a enfin, et non sans raison, les rapports de ces communautés avec les gouvernements qui sont empreints d'une immense méfiance. De plus, la sociétéė civile majoritaire a trop longtemps fait preuve d'indifférence, quand ce n'est pas d'attitudes discriminatoires ou racistes à l'égard des Autochtones.

Le vrai rayon de soleil dans ce magma de grisaille, c'est Idle No More. Un leadership jeune, frais, tout neuf. Un mouvement citoyen qui repose sur des femmes à l'origine. Un mouvement qui fait de l'espace aux Autochtones des réserves, comme aux Métis et à ceux qui vivent hors réserve et qui constituent aujourd'hui 60% des Autochtones du pays. Un mouvement qui se réclame du pacifisme et qui fait appel à un rapprochement entre les Blancs et les Autochtones. Un mouvement qui rejette le cynisme pour prôner l'action citoyenne. Un mouvement qui s'inscrit dans la modernité et qui n'a pas peur de revendiquer la juste place des autochtones au sein de la société dans laquelle nous vivons tous.

La plus grande force de ce mouvement, c'est de briser le moule des approches uniquement basées sur le juridique et les revendications territoriales. Ce faisant, il pointe du doigt la situation de quasi-apartheid dans laquelle la loi des Indiens nous a tous enfermés. Certes, Idle No More n'a pas tout inventé. Je me souviens de Ghislain Picard qui marchait sur un fil de fer lors du sommet de Mashteuiatsh pour tenter d'avancer sur le travail, sur le développement social et économique... Aujourd'hui, c'est la société civile autochtone qui parle haut, fort et clair! Tant mieux.

Bien sûr, il y a loin de la coupe aux lèvres. Mais pour avancer, il faut d'abord pouvoir démarrer. À ce chapitre, c'est plutôt réussi. Stephen Harper, qui ne s'est jamais distingué par sa souplesse ou son intérêt pour la question autochtone, a fait quelques volte-face utiles. Il s'est enfin assis, après avoir mis le feu aux poudres avec ses lois mammouths. Il faudra maintenant compter sur un mouvement qui continue de pousser, sur l'intelligence politique du premier ministre et sur son habileté à voir venir les crises. Le discours des chefs qui se sont présentés à la rencontre semble avoir pris du tonus et surtout cible des pistes plus porteuses en parlant de partage des ressources naturelles, d'éducation, de développement économique, etc.

On a beaucoup comparé Idle No More à des mouvements comme Occupy, comme le mouvement étudiant. Pour moi, le principal apport d'Idle No More, c'est d'abord la dynamique qu'il impulse sur le leadership autochtone et dans l'ensemble du dossier, en ouvrant des pistes nouvelles pour sortir des éternels culs-de-sac. La pire chose que l'on pourrait faire, ce serait de tenter d'opposer Idle No More au nécessaire travail politique des chefs qui ont voulu s'y inscrire.

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