Les deux astronautes sont arrivés à l'Agence spatiale canadienne dans leur combinaison bleu royal, le sourire aux lèvres. Des centaines d'employés, dont plusieurs accompagnés de leurs enfants le nez collé aux vitres, leur ont servi un accueil de rock stars.

Le terme «héros» véhicule son lot de clichés. Mais c'est ce que sont devenus Jenni Sidey et Joshua Kutryk cette semaine en coiffant 3770 autres candidats pour s'imposer comme les deux nouveaux astronautes canadiens.

«Ce n'est pas la première fois que je commence un nouvel emploi, mais jamais de ma vie je n'ai reçu un tel accueil!», s'est exclamé Joshua Kutryk en prenant visiblement la mesure du rêve qu'il incarne désormais auprès des Canadiens, et des jeunes en particulier.

Il y avait bien sûr beaucoup de mise en scène dans la présentation médiatique orchestrée hier - des enfants qui posent des questions préparées d'avance aux astronautes à la discussion genre «plateau de télévision» animée par le ministre fédéral Navdeep Bains. Mais cet engouement créé autour des astronautes est aussi rafraîchissant que bienvenu.

Après tout, Carey Price ne manque pas d'applaudissements lorsqu'il saute sur la glace du Centre Bell, et les réseaux sociaux ne se retiennent pas de vibrer chaque fois qu'Arcade Fire dévoile une chanson. Or, contrairement aux mondes du sport, des arts et même des affaires, la communauté scientifique compte peu de vedettes auxquelles le public peut s'identifier. Par la nature mythique de leur travail et l'incroyable processus compétitif par lequel ils doivent passer, les astronautes ont cette capacité de frapper l'imaginaire. Leur métier n'est peut-être pas représentatif de tout ce qui se fait en science, mais ils en sont les meilleurs ambassadeurs.

Carey Price ne fait pas que bloquer des rondelles. Il pousse on ne sait combien de garçons et de filles à enfiler leur équipement de hockey le samedi matin en rêvant à quelque chose de grand. C'est la même chose pour les astronautes. Le plus important n'est peut-être pas les boulons qu'ils iront visser dans l'espace, mais les passions et les carrières qu'ils susciteront et le goût du travail et du dépassement de soi qu'ils insuffleront.

À l'époque des réseaux sociaux, on a vu toute la magie qu'un homme comme Chris Hadfield a pu créer pendant son séjour dans l'espace. En novembre 2018, ce sera au tour d'un Québécois, David Saint-Jacques, de prendre place dans une capsule Soyouz et d'accomplir un rêve de gamin : s'arracher à l'attraction terrestre pour aller vivre six mois dans une structure filant à 28 000 km/h autour de la Terre.

Cette fois, la nomination de Jenni Sidey et de Joshua Kutryk est particulière pour deux raisons. D'abord, pour la première fois depuis des décennies, ces astronautes peuvent rêver d'aller au-delà de la Station spatiale internationale. Ils pourraient un jour fouler le sol de la Lune ou même de Mars, ce qui ajoute une couche de rêve à leur aventure.

Ensuite, au moment où les femmes ne comptent encore que pour 13% des ingénieurs en exercice au Canada et sont sous-représentées dans des disciplines comme les mathématiques, l'informatique et la physique, la nomination de Jenni Sidey est une bénédiction. Souriante et facile d'approche, la femme de 28 ans s'est dite prête à servir de modèle.

«L'ingénierie, c'est utiliser la science pour améliorer la vie des gens. C'est pour tout le monde. Pour les jeunes filles qui ne le réalisent peut-être pas, j'espère avoir un impact et leur apprendre cela», a dit celle qui affirme avoir attrapé le virus de l'espace de la toute première astronaute canadienne, Roberta Bondar.

Les quatre astronautes canadiens s'appellent David Saint-Jacques, Jeremy Hansen, Jenni Sidey et Joshua Kutryk. Apprenons leurs noms et intéressons-nous à ce qu'ils font. Qui sait, on trouvera peut-être ça au moins aussi passionnant que ce que bien des vedettes plus connues nous dévoilent.

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